« volupté », définition dans le dictionnaire Littré

volupté

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

volupté

(vo-lu-pté) s. f.
  • 1Plaisir corporel, plaisir des sens. Il y a de la volupté à boire quand on a soif. Ô douce volupté, sans qui dès notre enfance Le vivre et le mourir nous deviendraient égaux ; Aimant universel de tous les animaux, Que tu sais attirer avecque violence ! Par toi tout se meut ici-bas, La Fontaine, Psyché, II, p. 215. C'est un des malheurs de ces pays [la Turquie] que la plus grande partie de la nation n'y soit faite que pour servir à la volupté de l'autre, Montesquieu, Espr. XV, 12.

    Par antiphrase, la volupté de souffrir, le plaisir que l'on goûte à de vertueuses souffrances. Afin, dit Tertullien, qu'il [Jésus] mourût rassasié pleinement de la volupté de souffrir, Bossuet, 2e sermon, Nécessité des souffr. 1. L'affliction devient la volupté lugubre d'une âme infortunée, Diderot, Cl. et Nér. II, 44.

    Absolument, au sing. ou au plur. Source délicieuse, en misères féconde, Que voulez-vous de moi, flatteuses voluptés ? Corneille, Poly. IV, 2. Volupté, volupté qui fut jadis maîtresse Du plus bel esprit de la Grèce [Épicure], La Fontaine, Psyché, II, p. 216. Si Bourdaloue, un peu sévère, Nous dit : craignez la volupté ; Escobar, lui dit-on, mon père, Nous la permet pour la santé, Boileau, Poésies div. IV. La volupté lâche et infâme, qui est le plus horrible des maux sortis de la boîte de Pandore, amollit les cœurs, et ne souffre ici aucune vertu, Fénelon, Tél. IV. D'autres vinrent annoncer aux hommes que la volupté était le souverain bien, Massillon, Carême, Vérité de la religion. Il paraît que le mot volupté mal entendu rendit Epicure odieux, Diderot, Cl. et Nér II, 69.

    Particulièrement. Les plaisirs de l'amour. La vertu de ce prince [Philippe le Bon, duc de Bourgogne] n'excluait pas en lui la volupté et l'amour des femmes, qui ne peut jamais être un vice que quand il conduit aux méchantes actions, Voltaire, Mœurs, 80. Les premières voluptés sont toujours mystérieuses ; la pudeur les assaisonne et les cache, Rousseau, Ém. IV.

  • 2Il se dit aussi des jouissances de l'âme. Quelle pure volupté on trouve dans la vertu ! Toute volupté naît, ou de la sensation d'un objet présent, et elle est sensuelle ; ou de l'attente d'une chose, de la prévoyance des fins, de l'importance des suites, et elle est intellectuelle, Diderot, Opin. des anc. phil. (hobbisme).

HISTORIQUE

XVe s. Les superflues voluptés qui empeschent la liberté des sens, Christine de Pisan, I, 13.

XVIe s. Passion violente et volupté, qui attire à soy l'entendement mesme, Charron, Sagesse, I, 15. Pour ne souiller le mariage qui estoit nom de dignité, et non pas de volupté, Pasquier, Ménophile, p. 71, dans LACURNE. Il n'est en somme aulcune si juste volupté en laquelle l'excez et l'intemperance ne nous soit reprochable, Montaigne, I, 227.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. voluptat ; ital. voluttà ; du lat. voluptatem, de volop, volup, agréable, rattaché au grec ἔλπομαι, espérer (pour ϝέλπομαι). La commune racine est le sanscrit var, choisir, désirer, qui a fait velle et βούλεσθαι.