« forêt », définition dans le dictionnaire Littré

forêt

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

forêt

(fo-rê ; le t ne se lie pas ; au pluriel, l's se lie : des fo-rê-z immenses) s. f.
  • 1Vaste terrain planté de bois ; terrain couvert d'arbres exploités pour le chauffage, les constructions, etc. Rassembler les humains dans les forêts épars, Boileau, Art p. IV. Il me faut du repos, des prés et des forêts, Boileau, Ép. VI. Les forêts de nos cris moins souvent retentissent, Racine, Phèd. I, 1. Nourri dans les forêts, il en a la rudesse, Racine, ib. III, 1. Dieux ! que ne suis-je assise à l'ombre des forêts ! Racine, ib. I, 3. Dans le fond des forêts votre image me suit, Racine, ib. II, 2. Au-dessous [des neiges, dans le Liban] on voit une vaste forêt de cèdres antiques, qui paraissent aussi vieux que la terre où ils sont plantés et qui portent leurs branches épaisses jusque vers les nues, Fénelon, Tél. III. Dans l'état de nature, l'agami habite les grandes forêts des climats chauds de l'Amérique, et ne s'approche pas des endroits découverts, et encore moins des lieux habités, Buffon, Ois. t. VIII, p. 272, dans POUGENS. Si notre indolence dure, si l'envie pressante que nous avons de jouir continue à augmenter notre indifférence pour la postérité ; enfin si la police des bois n'est pas réformée, il est à craindre que les forêts, cette partie la plus noble du domaine de nos rois, ne deviennent des terres incultes, Buffon, Hist. nat. t. VIII, p. 358. Ces masses, ici couronnées d'impénétrables et antiques forêts qui n'ont jamais retenti du bruit de la cognée, Raynal, Hist. phil. VII, 24.

    Forêt close, forêt interdite aux usagers.

    Forêts vierges, vastes forêts des pays inhabités.

    Forêts sous-marines, forêts souterraines, forêts dont on retrouve les débris au fond des mers ou dans la terre.

    Terme de chasse. Mesurer une forêt, se dit en parlant du cerf ou de toute autre bête qui la traverse.

    Fig. et familièrement. Vous étiez là dans une forêt, c'est-à-dire vous étiez au milieu des fripons.

    On dit dans le même sens : C'est la forêt de Bondy, à cause qu'il y eut un temps où la forêt de Bondy près Paris était infestée de voleurs.

  • 2Eaux et forêts, les forêts, les étangs, les cours d'eau, en tant qu'ils sont l'objet d'une surveillance exercée par l'État.

    Les eaux et forêts, l'administration des cours d'eau, des lacs, des bois dépendants du domaine public. Conservateur, inspecteur des eaux et forêts.

    Autrefois, eaux et forêts, juridiction qui connaissait de la chasse, de la pêche, des bois et des rivières, tant au civil qu'au criminel. Grand maître des eaux et forêts. L'arpent des eaux et forêts valait une fois et demie l'arpent de Paris.

  • 3 Terme d'ancienne coutume. Droit de forêt, droit que le seigneur avait d'empêcher de couper du bois sur ses terres et de pêcher dans ses eaux.

    Concession de forêts, exprimait la permission d'abattre du bois et de pêcher.

  • 4 Par extension, grande quantité, amas de choses longues et menues. Une forêt de lances. Une forêt de mâts. Une forêt de cheveux. De dards, de javelots une forêt pressée, Saurin, Spart. IV, 1.
  • 5Grande quantité de pièces de bois qui forment le comble de quelque vaste édifice. La forêt du dôme des Invalides.

SYNONYME

FORÊT, BOIS. La forêt est toujours une grande étendue de terrain couverte d'arbres ; le bois peut être un terrain très petit. De plus, dans la forêt croissent les grands arbres qui sont propres à la contrée ; dans le bois peut croître toute espèce d'arbres.

HISTORIQUE

XIIIe s. Si comme Berte fut en la forest par lui [seule], Berte, I. Et tu, forès, qu'ici t'espans, Qui tant es anciene et grans, Fabliaux mss. n° 7989 2, f° 64, dans LACURNE.

XIVe s. Bien samble une forest des lanches qu'il y a, Hugues Capet, v. 3466.

XVIe s. Dire ne doibs ton secret derriere paroi ne forest, Leroux de Lincy, Prov. t. I, p. 73.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. forest, foresta ; espagn. et portug. floresta ; ital. foresta ; du bas-latin foresta, foreste, forestum, forasta. On a longtemps tiré ce mot de l'allemand Forst, forêt ; mais aujourd'hui les étymologistes allemands déclarent que ce mot est venu des langues romanes dans leur langue. À la vérité, ce mot roman forest, on a voulu le rattacher au haut allemand foraha, pin ; mais Diez fait remarquer que la disparition de l'h s'expliquerait mal, et qu'un suffixe est ou ast est fort rare. En conséquence il incline vers une étymologie latine déjà proposée par Frisch, à savoir foris, dehors. C'est l'étymologie véritable ; le grammairien Placidus connaît déjà un adjectif forasticus, extérieur ; et cet adjectif subsiste dans l'italien forastico, le sicilien furestico, le provençal foresgue, sauvage, rude, rétif ; l'italien forestiere a le sens d'étranger, d'homme du dehors. Sur ce modèle le bas-latin a formé forestare, mettre dehors, bannir. Foresta signifie donc primitivement un ban, une proscription, et un terrain sur lequel on avait prononcé un ban, une proscription de culture, d'habitation, dans l'intérêt de la chasse seigneuriale. De là forestare signifia créer une forêt, parce que ces prohibitions s'appliquaient surtout aux bois où se trouvaient les bêtes fauves, et que d'ailleurs les arbres poussaient bientôt dans les campagnes ainsi soustraites à la culture. Telle a été la transition historiquement constatée entre foresta, territoire prohibé, et forêt.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

FORÊT. - ÉTYM. Ajoutez, en confirmation de l'étymologie qui est donnée, que, dans les Hautes-Alpes, forest, qu'on y rencontre à chaque pas comme nom de localité, y a le sens d'habitation isolée, DE ROCHAS, De l'utilité d'un glossaire topographique, p. 20.