« orner », définition dans le dictionnaire Littré

orner

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

orner

(or-né) v. a.
  • 1Pourvoir de ce qui embellit. Je lui bâtis un temple et pris soin de l'orner, Racine, Phèdre, I, 3. Ma mère Jézabel devant moi s'est montrée, Comme au jour de sa mort pompeusement parée… Même elle avait encor cet éclat emprunté Dont elle eut soin de peindre et d'orner son visage, Racine, Ath. II, 5. Si vous ne voulez pas que le riche orne sa maison, vous ruinez cent artistes, Voltaire, Polit. et législ. Idées républicaines, XX. Des trésors du croissant ornez nos saints autels, Voltaire, Tancr. V, 1.

    Rendre plus beau, avec un nom de chose pour sujet. Il [l'arbre] servait de refuge Contre le chaud, la pluie et la fureur des vents, Pour nous seuls il ornait les jardins et les champs, La Fontaine, Fabl. X, 2.

  • 2 Fig. Donner un éclat, un embellissement, comparés à 'éclat, aux embellissements matériels. Ce qui distingue ses amis [de Dieu] de tous les autres, c'est la piété ; jusqu'à ce qu'on ait reçu ce don du ciel, tous les autres non-seulement ne sont rien, mais encore tournent en ruine à ceux qui en sont ornés, Bossuet, Louis de Bourbon. Saint Augustin considère parmi les païens tant de sages, tant de conquérants, tant de graves législateurs… tous privés de la connaissance de Dieu et exclus de son royaume éternel… mais pourquoi les a-t-il faits ?… il les a faits, nous dit-il [saint Augustin], pour orner le siècle présent, Bossuet, Louis de Bourbon. Courons, venez orner ce triomphe d'un frère, Voltaire, Oreste, V, 7. [Catherine de Médicis] Assurait Coligni d'une amitié sincère, L'ornait de dignités, le comblait de bienfaits, Voltaire, Henr. II. Cet illustre savant a eu le mérite rare d'orner le savoir par le goût, et de joindre à la littérature profonde la littérature agréable, D'Alembert, Éloges, Bouhier. Pour voir et pour orner le succès d'un rival, Delavigne, Vêpr. sicil. III, 2. Ah ! de ces dons heureux les mains qui l'ont orné [un homme heureusement doué] à des tourments sans fin ne l'ont pas condamné, Delavigne, ib. III, 1.

    Orner la mémoire, mettre dans sa mémoire des passages beaux ou utiles de différents auteurs et de différents genres.

  • 3 Fig. Pourvoir des ornements du style, de la rhétorique. Les figures servent beaucoup à orner le discours. Pour orner une telle vie, je n'ai pas besoin d'emprunter les fausses couleurs de la rhétorique, et encore moins les détours de la flatterie, Bossuet, Bourgoing.
  • 4S'orner, v. réfl. Se couvrir de ce qui embellit. La campagne s'ornait de verdure et de fleurs.

REMARQUE

ORNER, PARER, DÉCORER. Orner, du latin ornare qui signifie pourvoir, équiper, marque l'addition d'une chose solide en même temps que brillante. Parer, du latin parare, préparer, apprêter, signifie donner un air d'apprêt ou d'apparat, de cérémonie, de fête, comme est celui que se donnent particulièrement les femmes. Décorer, du latin decus, gloire, honneur, c'est donner un air grandiose, faire paraître superbe ou resplendissant : on pare une chambre ; on décore un palais ; le soleil orne les cieux, il ne les pare ni ne les décore.

HISTORIQUE

XVIe s. Ce n'est, dist le moyne, que pour orner mon languaige, Rabelais, Garg. I, 39. [Dieu] Du vent de sa bouche Fit ce qui attouche Et orne les cieux, Marot. Un beau mourir orne la vie humaine, Ronsard, 600.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. ornar, hornar ; espagn. ornar ; ital. ornare ; du lat. ornare. Curtius rapporte ornare au sanscrit varna, couleur, qui provient du radical vri, couvrir. Dans l'ancien français, on disait aorner, du latin adornare.