« truie », définition dans le dictionnaire Littré

truie

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

truie

(truie) s. f.
  • 1La femelle du verrat. La truie que l'on mettait anciennement sur la porte des temples pour en étranger [éloigner] les juifs, Naudé, Rosecroix, IX, 5. La truie doit avoir le corps long, le ventre ample et large, les mamelles longues, Buffon, Quadrup. t. I, p. 298. Vingt-cinq truies ont fait leurs petits après des gestations de 109 à 133 jours, ou quatre mois et treize jours ; il y en a eu cinq au 113e, Tessier, Instit. Mém. scienc. 1817, t. II, p. 12.

    Fig. Tourner la truie au foin, changer de discours, parler d'autre chose, éviter de répondre.

    Il en avalerait autant qu'une truie de lait clair, se dit d'un gourmand qui mange avidement de quelque chose.

    C'est une bonne truie à pauvre homme, se dit d'une femme qui fait beaucoup d'enfants.

  • 2Un des noms donnés au zée forgeron, poissons acanthoptérygiens.

    Truie de mer, la scorpène scrofe, acanthoptérygiens de Cuvier, la scorpène truie de Lacépède.

  • 3Truie ou plate, nom qu'on donne, à Granville, à la morue préparée en vert quand elle est maigre et plate.

HISTORIQUE

XIIIe s. Il resemblent la truie qui de boe est cargie [chargée], Arch. des miss. scient. 2° série, t. v, p. 199. Se une truie tue un enfant, il le [la] pendent et trainent, Beaumanoir, LXIX, 6.

XIVe s. Che que li truie fait, compere [paye] maintes foiz Li petis pourchelez, dont che n'est mie drois, Baud. de Seb. IV, 47.

XVe s. Un grant engin que on appelle truie, lequel engin estoit de telle ordonnance que il jetoit pierres de faix, et se pouvoient bien cent hommes d'armes ordonner dedans, Froissart, II, II, 5. Ce qui fut aux truyes, je tien Qu'il doit de droit estre aux pourceaulx, Villon, Grand test. Mieulx aime truye bran que rose, Leroux de Lincy, Prov t. I, p. 204. Qui touche le fan de la truie, Tant soit petit, il grogne et crie, Leroux de Lincy, ib.

XVIe s. La nature des truies, qu'estant bien saoulles, se couchent quand on les gratte, Bonivard, Source de l'idolâtrie, p. 81. Et, tournant la truye au foin, commença deviser d'autre chose, Straparole, 6e nuit, fable 1. Vous entendez, respondit Panurge, en exposition de ces recentes propheties, comme fait truye en espices, Rabelais, III, 18.

ÉTYMOLOGIE

Wallon, trauie ; génev. cela s'en va en chair de truie, cela se détériore, se perd ; bourguign. treue ; Berry, treue, true, truie et cloporte, treu, un homme malpropre ; provenç. trueia, truiga, truoia ; catal. truja ; ital. troia ; bas-lat. troga, truiga, truia. D'après Diez, qui écarte la fausse citation de Pomponius Sabinus dans du Cange, la plus ancienne mention du mot est donnée par les Gloses de Cassel. Il faut y joindre ce témoignage-ci qui n'est pas moins ancien : Truyes est une localité dans l'arrondissement de Loches dite en latin Troicis en 844, Troium en 860, Troilis en 1010. Truyes est au pluriel et représente le pluriel troicis, dont le singulier est troica. On avait songé au latin sus trojanus, porc farci, ainsi dit du cheval de Troie rempli d'hommes et d'armes. Diez, qui a conçu de son côté cette étymologie, l'a fortifiée. Suivant lui le sus trojanus a donné porco di Troia, abrégé en troia ; il cite un ancien auteur espagnol qui a nommé troya un sac rempli de comestibles, et cavallo di Troya, nom que les Napolitains donnent à un goinfre, à celui qui se remplit le ventre. Cela est très ingénieux et certainement très possible. Mais, dans cette hypothèse, que faire du c que présente la plus ancienne forme, celle de l'an 844 ; c qui se retrouve dans le bas-lat. troga et dans le provençal truiga ? On peut penser que le celtique (gaélique, torc, verrat, bas-bret. tourc'h) rend mieux compte de la forme et pour le moins aussi bien du sens.