« atterrer », définition dans le dictionnaire Littré

atterrer

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

atterrer

(a-tê-ré) v. a.
  • 1Renverser par terre. Après un moment de lutte, il l'atterra sous lui.

    Fig. Se ralentir après l'avoir atterré, c'est lui faire reprendre ses forces, Bossuet, IV, Pâq. 1. Après l'avoir ainsi rabattu [l'orgueil] dans tous les endroits où il semblait vouloir s'élever, David l'atterre par ces paroles…, Bossuet, IV, Marie-Thér. Il n'est orgueil endurci Qu'à tes pieds elle [la fortune] n'atterre, Malherbe, II, 2. Tu me subjugues, tu m'atterres, ton génie écrase le mien, Rousseau, Hél. IV, 2. Atterre son orgueil et montre ta puissance à perdre également l'un et l'autre rival, Corneille, Médée, IV, 5. C'eût été pour le parti de M. du Maine le dernier désespoir de se voir privés de la massue qui avait si bien joué sur le jeune prince, et de laquelle ils se proposaient bien de l'atterrer sans ressource avant la fin de la campagne, Saint-Simon, 207, 33.

  • 2Jeter dans l'abattement, l'affliction, l'épouvante. Ce désastre les a tous atterrés. Le coup, le rude coup dont je suis atterré, C'est de me voir par vous ce rival préféré, Molière, D. Garcie, III, 2. Ce dernier coup du sort Atterre mon esprit luttant contre la mort, Voltaire, Triumv. III, 1. Çà, mesdames, qu'en pensez-vous ? C'est à vous de juger les coups. Quoi ! ce spectacle vous atterre ! Béranger, Box. Il semble que la consternation qui avait si longtemps atterré l'esprit des Génois eût passé dans les Allemands, Voltaire, Louis XV, 21.
  • 3 V. n. Terme de marine. Approcher de la terre, reconnaître un parage. Nous atterrâmes à la pointe de l'île. Les marins disent aujourd'hui atterrir.

HISTORIQUE

XIIe s. Cist Crestien m'ont trop mal atierié ; Li dex qu'il servent doit bien estre proisié, Li coronemens Looys, V. 1311. Le piler [pilier] e le chief qui'l [qui le] sustint atterrer, Th. le mart. 149.

XIIIe s. Moult [j'] ai veü et moult ai esprouvé, Mainte merveille eüe et endurée ; Mais ceste m'a le corps si ateré, Que je ne puis avoir longue durée, Anonyme, dans Couci. François lor courent sus, lances baissies, et fiert cascuns le sien, pour lui atierer, se il peüst, H. de Valenciennes, XXVI. Quant Renart se vit delivré, Et il vit celui aterré, Ren. 25054. Dans Hues de Saint-Pol estoit jà aterrés, Et ses chevaus ocis…, Ch. d'Ant. IV, 691. Por povreté, qui moi aterre, Rutebeuf, 24. Ains y est le monde et le dyable, Et char ensemble guerroiable, Que ta grace vainc et aterre, J. de Meung, Tr. 35.

XVe s. Ceux de dedans se defendirent moult longuement et en atterrerent et blesserent plusieurs, Froissart, I, I, 248.

XVIe s. Un pere atteré d'années et de maulx, Montaigne, II, 75. Il y a des maladies qui atterrent jusques à nos desirs et nostre cognoissance, Montaigne, III, 91. Le corps demeure cependant sans action, s'atterre et s'attriste, Montaigne, III, 290. Il sembloit que le bonheur voulut relever ceux qui avoyent esté atterrez, Yver, 704.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. aterrar ; ital. atterrare ; de à et de terre. L'Académie, à côté de atterrer, écrit aussi attérer ; orthographe à rejeter, car terre étant le radical, c'est introduire une anomalie qui déroute.