« gai », définition dans le dictionnaire Littré

gai

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

gai, gaie

(ghé, ghée) adj.
  • 1Qui a de la gaieté. Un jour, gaie et l'esprit plus content que jaloux, Je suivais en Argos cet infidèle époux, Rotrou, Herc. mour. II, 2. C'est, dit Tertullien, à la vérité seule qu'il appartient de railler, parce qu'elle est gaie, Furetière, 3e factum, t. I, p. 319. Sans raison il [l'homme] est gai, sans raison il s'afflige, Boileau, Sat. VIII. Dût ma muse par là choquer tout l'univers, Riche, gueux, triste ou gai, je veux faire des vers, Boileau, Sat. VII. J'ai encore une chose à vous dire, mon héros, dans ma confession générale ; c'est que je n'ai jamais été gai que par emprunt ; quiconque fait des tragédies et écrit des histoires, est naturellement sérieux, quelque Français qu'il soit, Voltaire, Lett. Richelieu, 19 août 1766. Sans être naturellement gai, il s'animait de la gaieté des autres, Marmontel, Mém. VI.

    Gai comme un pinson ou comme pinson, très gai.

    Familièrement.Être un peu gai, être un peu animé par le vin. Comme ils devenaient un peu plus gais sur la fin du repas, selon la coutume des philosophes qui dînent, Voltaire, Oreilles, 5.

    Cheval gai, cheval qui a de la vivacité.

    Terme de blason. Cheval gai, cheval nu et sans harnais.

  • 2Qui porte le caractère de la gaieté, en parlant des choses. Humeur gaie. Esprit gai. Un œil gai. Son visage était gai, sa bouche était vermeille, Tristan, Panthée, II, 2. Deux siens voisins se laissèrent leurrer à l'entretien libre et gai de la dame, La Fontaine, les Remois. La cour veut toujours unir les plaisirs avec les affaires… tout est couvert d'un air gai, et vous diriez qu'on ne songe qu'à s'y divertir, Bossuet, Anne de Gonz.

    Où règne la gaieté. Notre repas fut le plus gai du monde, et j'y fus plus gai que personne, Marivaux, Pays. parv. 2e part.

  • 3Qui inspire de la gaieté. Une chanson, une vue gaie. Le vert est plus gai ; vous avez raison, il n'y a qu'à le laisser comme cela [un ameublement], Dancourt, Vert galant, sc. 26.

    Appartement gai, appartement bien exposé, qui a une vue agréable.

    Temps gai, temps serein et frais.

    Avoir le vin gai, être de belle humeur quand on a un peu bu.

    Terme de peinture. Couleurs gaies, couleurs vives, légères et brillantes. Vert gai.

    La gaie science, le gai savoir, noms que portait autrefois la poésie des troubadours.

  • 4 Terme de musique. Synonyme d'allegro. Un air d'un mouvement gai.
  • 5Propos, conte gai, se dit quelquefois de propos, de contes un peu libres.
  • 6Dans un langage technique, qui a trop de jeu, qui n'est pas assez serré. Cette vis est trop gaie. Ma tabatière était trop gaie, elle s'est ouverte dans ma poche.

    Terme de marine. Se dit d'un mât ou de tout autre objet, lorsqu'il est trop au large dans son trou ou dans la place qu'il occupe.

    Terme de pêche. Hareng gai, celui dans lequel on ne trouve ni laite, ni œufs.

  • 7 S. m. Grand gai, petit poisson qu'on nomme aussi pucelotte.
  • 8Gai ! interjection qui s'emploie pour exciter à la gaieté et aussi au mouvement, à l'action. Gai, divertissons-nous. Allons, gai ! vous a-t-on donné votre congé ? Regnard, le Joueur, III, 2. Gai ! gai ! serrons nos rangs, Espérance De la France ; Gai ! gai ! serrons nos rangs, En avant, Gaulois et Francs ! Béranger, Gaulois et Francs.

SYNONYME

GAI, ENJOUÉ, JOYEUX. L'homme gai est de belle humeur ; c'est l'effet du tempérament ou de quelque heureuse circonstance. L'homme enjoué se joue, il a la plaisanterie agréable, le désir et le talent d'amuser. Joyeux se dit des affections du moment : un homme très froid et posé peut être joyeux s'il apprend une nouvelle qui lui fait grand plaisir.

HISTORIQUE

XIIe s. Donc jà n'arez à tel jor le cuer [cœur] gai, Raoul de C. 197.

XIIIe s. Le premier jour de mai, Cil douc tans cointe et jai, Mss. de poésies fr. avant 1300, t. II, p. 833, dans LACURNE. Fille, dist la royne, soiez joians et gaie, Berte, VIII.

XIVe s. Du feu a demandé l'abbé de Malepaie, Tout pour bouter le feu en celle ville gaie, Guesclin. 20349. Et soit vert gay [d'un vert gai], Ménagier, II, 5.

XVIe s. Et ainsi print congé, gai comme Perot, Despériers, Contes, XXIV. En une petite chambre haute assez gaye, Sat. Mén. p. 222. Si ne feirent les autres que prendre garde seulement, que ceste poultre [jument] avoit le poil et les crins rouges fort luysans, et comme elle estoit vifve et guaye, à ouyr son clair et fier hennissement, Amyot, Pélop. 39. Sa maniere d'escrire est guaye et austere, sententieuse et toutefois familiere, Amyot, Caton, 14. … Il n'y a pas de si beaux bois, ny des forest verdoyantes, guayes prairies ny autres lieux de plaisance…, Amyot, Flam. 4. L'œil malade refuit les couleurs vifves, guayes et brillantes, Amyot, Phoc. 2.

ÉTYMOLOGIE

Berry, gai, au féminin gaitte ; provenç. gai, guay ; anc. espagn. gayo ; ital. gajo ; de l'anc. haut-allem. gâhi, prompt ; allem. mod. jähe. Toutefois on peut noter, ne fût-ce que pour mention, le nom propre latin Gaius, qui était un nom de bon augure, et que les langues italiotes offrent sous la forme de Gavius, lequel semble signifier le réjouissant ; Gaius aurait donné sans peine gajo ; mais les intermédiaires manquent.