« adroit », définition dans le dictionnaire Littré
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adroit, oite
- 1Qui a de l'adresse, soit de corps, soit d'esprit. Adroit tireur. Adroit à tous les exercices. Homme adroit et entreprenant. Les gens adroits à tromper.
Qu'est devenue cette redoutable cavalerie… ? Ni les chevaux ne sont vites, ni les hommes ne sont adroits que pour fuir devant le vainqueur
, Bossuet, Anne de G.L'homme seul se trouverait-il être sans action ? La nature l'aura-t-elle destiné à une oisiveté éternelle ? L'aura-t-elle formé si beau, si adroit, si désireux de savoir, pour le laisser toujours inutile ?
Bossuet, Pensées chrét. 33.Que la nature est adroite et qu'elle sait bien ménager ses intérêts ! Nous pensons nous défaire d'une passion ; que fait la nature ? en la place de cette passion, elle en substitue une autre toute contraire
, Bourdaloue, Pensées, t. I, p. 428.Ce n'est ni à l'intempérie de l'air, ni à la faute des peuples, ni à la stérilité des terres qu'il en faut attribuer la cause, puisque l'air y est excellent [en France], les habitants laborieux, adroits, pleins d'industrie ; mais aux guerres et au défaut d'économie
, Vauban, Dîme, p. 27. - 2En parlant des choses, où il y a de l'adresse.
La louange agréable est l'âme des beaux vers ; Mais je tiens, comme toi, qu'il faut qu'elle soit vraie, Et que son tour adroit n'ait rien qui nous effraie
, Boileau, Ép. IX.Adroit mensonge
, Racine, Mithr. III, 4.Son adroite vertu ménage son crédit
, Racine, Brit. IV, 4.
REMARQUE
Du temps de Corneille on prononçait aussi adret, adrète ; ce qui est la prononciation normande : Ma sœur vous êtes plus adroite ; Souffrez que je ménage un moment de retraite
, Corneille, Agés. II, 1. D'abord j'appréhendais que cette ardeur secrète Ne fût du noir esprit une surprise adroite
, Molière, Tart. III, 3.
La prononciation adret est fort ancienne, Chifflet, Gramm. p. 201.
SYNONYME
ADROIT, HABILE. Ils donnent l'un et l'autre l'idée d'une action facile et heureuse. Habile exprime davantage l'aptitude générale ; adroit, l'application particulière de cette aptitude générale. Un homme adroit n'est pas nécessairement habile ; un homme habile est nécessairement adroit, et s'il ne l'est pas en une circonstance donnée, c'est qu'il s'oublie. L'adresse ne suppose pas l'habileté ; c'est quelque chose d'inférieur. L'habileté au contraire ne va pas sans adresse. L'étymologie même indique la nuance ; l'habile, habilis, de habere, a une disposition générale qui est bonne pour tout ; l'adroit, de à et droit, met les choses comme droit est, c'est-à-dire se prend bien à ce qu'il fait, à un objet quelconque.
HISTORIQUE
XIIe s. Et moult adroit [il] est arrer retourné
, Roncisv. p. 190.
XIIIe s. En la forest fu Berte, qui est gente et adroite ; D'aler aval le bois moult durement s'esploite
, Berte, 29.
XIVe s. Semblablement celui qui juge adroit des operacions humaines, qui est sain selon l'ame
, Oresme, Eth. 19. Et quiconque conselle bien, il fait adroit
, Oresme, ib. 182.
XVIe s. Carneades souloit dire que les enfants des roys et des riches n'apprenoient rien adroit, qu'à picquer et manier les chevaulx
, Amyot, Comment discerner le flat. de l'ami, 30. Des combattants bien aguerriz et adroicts aux armes
, Amyot, Tim. et P. Aem comp. Leurs vaisseaux adroits et legers pour bien servir en un bon affaire
, Amyot, Pomp. 36.
ÉTYMOLOGIE
Wallon, adreût, convenable ; Berry et norm. adret ; picard, adrot, d'une façon adroite ; de à, droit (voy. DROIT, adj.). Dans plusieurs des exemples anciens, adroit pourrait s'écrire aussi bien en deux mots, à droit, et est une espèce d'adverbe : juger adroit ou à droit ; n'apprendre rien adroit ou à droit ; c'est aussi de cette façon que le picard emploie son adrot. Quelques étymologistes, trompés par une des significations de droit, font venir droit et adroit de dexter ; c'est une erreur ; il vient de addirectus, proprement, dirigé vers, adressé.