« bruine », définition dans le dictionnaire Littré

bruine

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

bruine

(bru-i-n') s. f.
  • Petite pluie très fine et froide. Une rosée qui ressemblait à la bruine qui tombe sur la terre, Voltaire, Phil. IV, 143. Ils se convertissent en bruine ou gelée blanche, Descartes, Météor. 6.

HISTORIQUE

XIIe s. Une broïne commence à espoissier, Qu'on ne pooit veoir ne charoier, Li coronemens Looys, 2295.

XIIIe s. Ô vos, rosées et broïne, beneissiez à vostre seigneur, Psautier, f° 192. Et le joedi après, par un poi de bruin, Vœux du paon, f° 80, dans Chevalier au cygne, Glossaire. Il sont issu à camps [champs], mais il faisoit bruine ; Falos, cierges, brandons et feux les enlumine, ib. Ne guerre ne bruin [querelle], Chevalier au cygne, v. 5280. Mettre en bruine [en querelle], ib. V. 31941. Ils veoient la montaigne par dessus la bruine, Joinville, 282. Celi samedi leva une bruine et descendi de la terre sur la mer, et pour ce cuiderent nos mariniers que nous feussions plus loing de l'ille de Cypre que nous n'estions, Joinville, 283.

XIVe s. La nuit y ot bruine, grande fu l'oscurtez ; Encor veoient po quant solaux fu levez, Guesclin. 3777. Le crestien [je] matai et mis à grant bruine, Baud. de Seb. II, 21.

XVe s. Or fut dit au roi de Castille… Sire, sire, entendez à nous… car une bruine [au figuré] trop felle et perilleuse se nourrit entre vous et le duc de Lancastre, Froissart, II, III, 109. Et la bruine chue [tombée], Froissart, II, II, 197. Il faisoit si grand bruine qu'on ne pouvoit voir un demi bonnier de terre loin, Froissart, I, I, 134.

XVIe s. … Vit eslever bruynes et frimatz Qui procedoient d'un vieil gouffre aquatique, Marot, J. V, 60. Et tomba tant de bruine et de gresil, que les vignes et les olives gelerent, Amyot, Démétr. 15. Les bruines causent aux raisins des picotures noires, dont ils perissent, De Serres, 154. Les costeaux soleillez de pampre sont couvers, Mais des hyperborés les eternels hyvers Ne portent que le froid, la neige et la bruine, Du Bellay, J. VI, 6, recto.

ÉTYMOLOGIE

Bourguig. bruène ; picard, breuaine, brouaine ; wallon, brouhène ; namurois, bruhène, bruwène ; rouchi, bruène. On a indiqué le latin pruina, gelée blanche ; mais le passage du p au b est toujours difficile à admettre en français ; de plus bruine veut dire non pas gelée blanche, mais brouillard qui tombe ; c'est le sens actuel et le sens des anciens textes. A la vérité, le sens de gelée blanche se trouve dans l'italien brina, provençal moderne brino, breino, milanais prinna, qui probablement viennent du latin pruina, et qui peuvent servir d'intermédiaire entre le p et le b, comme l'italien en sert pour brugnon avec prunus ; quant au sens, passer du brouillard qui tombe à la gelée blanche qui en résulte souvent est une métonymie admissible. On a dit bruin au masculin. Bruine a eu le sens de querelle, tumulte, comme on le voit dans un exemple de Froissart ; il y en a aussi des exemples plus anciens : c'est un sens figuré, sans doute analogue à celui de nuage, quand nous disons : il y a un nuage entre nous. Grandgagnage le tire du celtique bru, pluie.