« convier », définition dans le dictionnaire Littré

convier

Définition dans d'autres dictionnaires :

Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

convier

(kon-vi-é), je conviais, nous conviions ; que je convie, que nous conviions v. a.
  • 1Inviter quelqu'un à un repas, à une cérémonie. Convier à un festin, à une assemblée. Je l'ai convié à un dîner.
  • 2 Par extension, engager, exciter à. Ni l'honneur, ni le gain n'étaient suffisants à me convier à les apprendre, Descartes, Méth. À se rendre moi-même en vain je les convie, Corneille, Cid, IV, 3. Quel sujet si pressant à sortir vous convie ? Corneille, Poly. I, 2. L'honneur te le commande et l'amour t'y convie, Corneille, Héracl. I, 5. Va marcher sur leurs pas où l'honneur te convie, Corneille, Cinna, I, 3. Et ce déchaînement aujourd'hui me convie à faire une action qui confonde l'envie, Molière, F. sav. IV, 4. À le sauver enfin c'est moi qui vous convie, Racine, Andr. III, 7. Faut-il qu'à feindre encor votre amour me convie ? Racine, Baj. IV, 1. Puisque mon roi lui-même à parler me convie, Racine, Esth. III, 4. On nous convie par le succès qu'ils [les saints] ont eu à marcher sur leurs traces, Massillon, Car. Salut. Tout le convie à retourner dans les bras de Dieu, Massillon, ib. Fautes légères. L'insensé de l'Évangile, se croyant dans l'abondance pour une longue suite d'années, conviait son âme à se reposer, Massillon, ib. Prospérit. Lui apprenez-vous à juger de la vocation du ciel par les impressions de la grâce, qui ne cesse de nous y convier en secret ? Massillon, ib. Vocation. Vous conviez le pécheur à vous demander des grâces, Massillon, ib. Prière, 2. Aux dons que ta bonté mesure Tout l'univers est convié, Lamartine, Harm. I, 7.

    Convier de… Le prince les convia de voir passer la garnison, Sarrasin, 69. L'empereur Ferdinand convia Élisabeth de ne point se séparer de la créance des princes chrétiens, Maucroix, Schisme, liv. III, dans RICHELET. Toi qui dedans un cloître as renfermé ta vie, De toutes les vertus tâche de l'enrichir ; C'est sous ce digne effort que tu dois y blanchir, Ta règle te l'apprend, ton habit t'en convie, Corneille, Imit. I, 19. Soyons amis, Cinna, c'est moi qui t'en convie, Corneille, Cinna, V, 3.

    Convier de est aujourd'hui peu usité ; cependant l'euphonie pourrait demander qu'on en fît usage. D'ailleurs le vers célèbre de Cinna tend à conserver cette tournure.

SYNONYME

CONVIER, INVITER. Ces deux verbes ne sont synonymes que quand convier prend le sens général d'inviter. Mais comme le sens propre en est inviter à un banquet, à une solennité, il garde, dans l'acception détournée que l'usage lui a donnée, une nuance qui dérive de l'acception primitive et a quelque chose de plus solennel ou de plus amical qu'inviter : On l'invita à prendre sa place ; le Cid convie les chefs des Maures vaincus à se rendre.

HISTORIQUE

XVIe s. Sembloit il pas le convier à interposer son decret ? Montaigne, I, 60. Les conviez [en parlant d'un festin], Montaigne, I, 76. Aulcuns me convient d'escrire…, Montaigne, I, 103. Une humeur curieuse me convia à tel effect esloingné de ma nature, Montaigne, I, 96. L'ennemy n'a rien qui le convie à honorer son ennemy mort, sinon l'admiration de sa vertu, Amyot, Pélop. et Marcel. comp. 6. Il se feit un banquet, auquel estans tous les chefs de l'armée conviez, il…, Amyot, Lysand. 29. L'honneur et la réputation qu'il acquit depuis, le convierent à tourner du tout son estude et son ambition aux armes et à la guerre, Amyot, Sertor. 2. Il te reconviera si une fois tu le convies, et te donnera à soupper quand tu luy en donneras, Amyot, De la mauvaise honte, 5. Ils depeschent encore à Famaguste, demandant des hommes, et Balcon le general se convia d'y aller, mais ceux de la ville le retindrent, D'Aubigné, Hist. I, 343. Et pource qu'ils estoient fort chargez de bribes, il se convia à les soulager, D'Aubigné, ib. II, 462. A baiser vostre main le desir me convie, Ronsard, 246. Je m'en vais saoul du monde ainsi qu'un convié S'en va saoul du banquet de quelque marié, Ronsard, 305. Quand il n'y auroit autre occasion que ceste derniere, elle seule deust bien convier les princes à lire souvent et affectueusement les histoires, Amyot, Préf. XVIII, 46.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. convidar, covidar ; espagn. convidar ; ital. convitare ; d'après Raynouard, il vient du latin convivare ou convivari, donner, prendre un repas ; mais le v ne peut se changer en t ou en d. D'après Diez, il vient d'invitare, inviter, avec la substitution du préfixe con, au préfixe in, sous l'influence de convivium, repas ; mais là contre il y a cette objection, non absolue il est vrai, qu'en cette hypothèse les langues romanes auraient fait avec un radical inusité en ce sens (vitare) un composé con-vitare qui n'existe pas dans la latinité. Si l'on prend les acceptions de l'italien convitare, on voit qu'il signifie convier à un repas, et tenir table ouverte ; convito, repas, banquet. Les choses étant ainsi, il faut ou croire avec Diez que invitare a donné la forme du mot, et convivium, le sens ; ou que l'italien convitare, l'espagnol convidar sont formés du préfixe con, et de vita, vie, convitare, vivre ensemble, faire repas ensemble, comme convivium, d'où inviter à un repas, et, en général, inviter. D'ailleurs, ce mot une fois formé, la ressemblance qu'il a avec invitare y aura introduit sans peine le sens de ce verbe. Dans le français, convier, dont on n'a jusqu'à présent des exemples que du XVIe siècle, a été formé sur convi qui est plus ancien.