« creuset », définition dans le dictionnaire Littré

creuset

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creuset

(kreû-zè ; le t ne se lie pas dans le parler ordinaire ; au pluriel, l's se lie : des kreû-zè-z en platine ; creusets rime avec traits, succès, paix) s. m.
  • 1Vaisseau de terre ou de métal, de forme et de grandeur variables, mais ordinairement rétréci vers son fond, destiné à être mis au milieu du feu, pour obtenir la fusion des corps très réfractaires. Un autre avantage bien rare de la porcelaine des Indes, c'est que sa pâte est admirable pour faire des creusets et mille autres ustensiles de ce genre, Raynal, Hist. phil. V, 27. Leurs successeurs [de Newton et Leibnitz] s'imaginèrent tenir Dieu dans leurs creusets et dans leurs télescopes, Chateaubriand, Génie, I, IV, 3. Ton art [l'alchimie] est sûr ; le Pactole et Jouvence Dans le creuset vont marier leurs flots, Béranger, Alchim.

    Creusets brasqués, creusets dont l'intérieur est garni d'une pâte faite avec du charbon de bois pulvérisé, légèrement humecté et fortement battu.

    Terme de métallurgie. Partie inférieure et distincte d'un fourneau, dans laquelle se tient le métal fondu.

  • 2 Fig. Sa main est un creuset qui fond l'argent, Sévigné, 439. Chez Mme de Maintenon, sans nom de maîtresse ni d'épouse, était déjà le creuset de la cour et de l'État [c'est-à-dire le lieu où se fondaient, se décidaient toutes les affaires de la cour et de l'État], Saint-Simon, 413, 188. Tout son mérite [de Corneille], à l'heure qu'il est, ayant été mis par le temps comme dans un creuset, se réduit à huit ou neuf pièces de théâtre qu'on admire, Boileau, Longin, réflex. 7e. Raffinez sur tous les plaisirs, subtilisez-les, mettez-les dans le creuset, Massillon, Pet. car. Malh. Hélas ! j'aimais en vous un or faux et perfide, Par le creuset du temps en vapeur converti, Rousseau J.-B. Odes, III, 9. Feu sacré dont brûla ton âme généreuse Qui s'épurait encore au creuset du malheur, Voltaire, Odes, XI.
  • 3Nom de quelques champignons ayant la forme d'un creuset.

    Sorte d'agaric des caves très humides, nommé aussi basset.

HISTORIQUE

XIIIe s. Croiseus por argent fondre, Tailliar, Recueil, p. 19.

XVe s. Encore firent faire ceux de Gand un engin, et asseoir devant la ville qui jetoit croisseux de cuivre tout bouillans, Froissart, II, II, 161.

XVIe s. Fourneaux avec creusets, pour faire reduction des metaux calcinés, Paré, t. III, p. 638.

ÉTYMOLOGIE

Wallon, crizou ; namurois, crîjou ; espagn. crisol, creuset ; crisuelo, lampe ; ital. crogiuolo, crociuolo, creuset ; crogiolo, cuisson ; crogiare, rôtir ; angl. cruset ; bas-lat. crosollus, cresollus, cruselinum, crusellus ; anc. franç. creuseul, croissol, crusset, crasset, espèce de lampe. Mot d'origine difficile. Diez, sans s'occuper des autres formes, tire l'espagnol crisuelo et, par suite, crisol du basque criselua, cruselua, lampe. La forme primitive en français est croiseul (creuset n'en est qu'une altération) ; à croiseul répondent l'espagnol crisuelo, crisol, et l'italien crogiuolo ; cet accord paraît écarter l'étymologie prise au basque, qui dès lors a plutôt emprunté que donné ce mot. L'étymologie est certainement le bas-latin crucibulum qui n'a pu être refait sur les mots romans et qui au contraire leur a donné naissance. Crucibulum paraît être dérivé de crux, croix, et avec la finale instrumentale bulum, parce que ces sortes de lampes portaient deux mèches en croix, ce qui faisait quatre becs. De lampe, le sens a passé à creuset.