« crotte », définition dans le dictionnaire Littré

crotte

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

crotte

(kro-t') s. f.
  • 1Fiente globuleuse de certains animaux. Crottes de cheval. Crottes de brebis, de lapin. [L'escarbot] Sur la robe du dieu fit tomber une crotte ; Le dieu, la secouant, jeta les œufs à bas, La Fontaine, Fabl. II, 8.
  • 2Boue des rues. Il fait bien de la crotte. Il y a de la crotte sur votre habit. Ce sont des incommodités de Paris que j'appréhende beaucoup plus que les crottes, ni que la rencontre de charrettes, Guez de Balzac, liv. VII, lett. 27. Des crottes dans toutes les rues, Scarron, Sonnet sur Paris. Nouvelle pension fatale à ma calotte, Précipice élevé qui te jette en la crotte, Boileau, Chapelain décoiffé. Sa mignonne chaussure fut bientôt percée ; elle enfonçait dans la crotte, Rousseau, Conf. IX.

    Les chiens ont mangé les crottes ou la crotte, se dit quand la gelée a séché les rues.

    Fig. Être, tomber dans la crotte, être, tomber dans une condition basse et misérable.

  • 3Cicatrices, croûtes sur la peau. Et fut pour étriller mes galles et mes crottes, Régnier, Sat. X.

    Vieillie en ce sens.

REMARQUE

Le sens primitif est fiente de certains animaux ; aussi, quand ce mot a passé au sens de boue, on l'a d'abord employé au pluriel. Aujourd'hui, au contraire, avec cette acception de boue, il ne se dit guère qu'au singulier.

HISTORIQUE

XIVe s. Les fientes des lievres et des connins sont apelées crotes, Modus, f° VI, verso.

XVe s. Sinon aux trahistres chiens mastins Qui m'ont fait manger dures crostes Et boire eau maintz soirs et matins, Que ores je ne crains pas trois crottes, Villon, G. testam.

XVIe s. Verole de Rouen et crottes de Paris ne s'en vont jamais qu'avec la piece, Le Duchat, sur Rabelais, p. 98, dans LACURNE. Ses paroles s'entretiennent comme crottes de chevre [sont sans suite], Oudin, Curios. fr. add. Au jugement, crotte de chat vaudra autant que marc d'argent, Oudin, ib.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. crota de cabra, crotte de chèvre. On le tire ordinairement de crusta, croûte ; mais la forme provençale ne permet pas cette dérivation. Diez demande s'il ne viendrait pas du germanique : suédois, klôt ; allemand, Kloss, masse globuleuse ; le changement de l'l en r ne faisant pas difficulté. Il n'est pas complétement sûr que crotte, dans le sens de croûte, cicatrice, soit de même origine que crotte dans le sens de boue ou de fiente ; à la vérité, on peut croire que crotte, dans le sens de galle ou cicatrice, provient d'une comparaison de l'apparence qu'a un visage couturé avec un visage sali par des crottes ou de la crotte ; mais il est possible aussi que crotte ait ici le sens de creux, cavité, qu'il a dans l'ancien français (voy. GROTTE).

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

CROTTE. Ajoutez :
4 Crotte du diable, nom vulgaire des nodules de phosphate de chaux, lequel est un bon engrais, les Primes d'honneur, p. 169, Paris, 1874.