« guéret », définition dans le dictionnaire Littré

guéret

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

guéret

(ghé-rè ; le t ne se lie pas dans le langage ordinaire ; au pluriel, l's se lie : des ghé-rè-z étendus ; guérets rime avec traits, succès, paix, etc.) s. m.
  • 1Terre labourée et non ensemencée. Le rasement des bâtiments [de Port-Royal], le violement des sépulcres, la profanation de ce lieu saint réduit en guéret, excitèrent l'indignation publique, Saint-Simon, 415, 221. J'aime un gros bœuf dont le pas lent et lourd, En sillonnant un arpent dans un jour, Forme un guéret où mes épis vont naître, Voltaire, Pauvre Diable. Il y a des gens dont la récolte ne craint ni temps ni grêle, et ce ne sont pas ceux qui, versant, labourant, font le meilleur guéret, mais qui, ayant une place, ne font rien ou font la cour, Courier, Gazette du village.

    Lever ou relever les guérets, labourer une terre qu'on a laissée se reposer pendant un an.

  • 2En langage agricole, ancien guéret, la partie non labourée d'un champ qu'on est en train de labourer. Ainsi, la charrue versant à droite, le laboureur a l'ancien guéret à sa gauche, la gauche est le côté de l'ancien guéret.
  • 3 Poétiquement. Toutes terres labourables. La victoire balança ; Plus d'un guéret s'engraissa Du sang de plus d'une bande, La Fontaine, Fabl. IV, 6. Cérès s'enfuit éplorée De voir en proie à Borée Ses guérets d'épis chargés, Boileau, Odes, I.

HISTORIQUE

XIe s. Mort [ils] le trestournent très en mi un guaret, Ch. de Rol. CVI.

XIIe s. Andui s'abatent très enmi le garais, Raoul de C. 101.

XIIIe s. Fuiant s'en va tot un garet, Que grant peor ot des gaingnons [chiens], Ren. 2992.

XVIe s. En temps sec on l'arrouse aiant l'eau commode, et chacune année on le serfoue, pour tenir la terre en gueret, De Serres, 737.

ÉTYMOLOGIE

Berry. garet, guaret, guéret, et guéret, labour, façon ; norm. varet ; provenç. garag, garah ; esp. barbecho ; port. barbeito ; du lat. vervactum, jachère. Vervactum est manifestement représenté dans barbecho, barbeito ; il l'est aussi, bien que d'une manière plus cachée, dans guéret, garag : le gu ou g est pour v, comme cela se voit dans gaine de vagina, gui de viscum, etc ; et le reste s'explique par la chute du v intermédiaire, qui est tombé comme beaucoup de consonnes intermédiaires (voy. meür de maturus, seoir de sedere). Vervactum est le participe passif de vervagere, guéreter.