« malotru », définition dans le dictionnaire Littré

malotru

Définition dans d'autres dictionnaires :

Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

malotru, ue

(ma-lô-tru, true) s. m. et f.
  • 1 Terme familier. Anciennement, incommodé en sa personne (ce qui est le sens le plus voisin du sens propre).

    Il a été pris adjectivement en ce sens. Parbleu, bon ! je vais par les rues ; Mais je n'y vais pas de mon chef Ni de mes pieds, qui par méchef Sont parties très malotrues, Scarron, le Chemin du marais. Le chevalier de Lorraine est très malotru et très languissant ; il aurait assez l'air d'être empoisonné, si Mme Brinvilliers eût été son héritière, Sévigné, 22 juill. 1676.

  • 2Personne maussade et mal bâtie. Mais, c'est vous, malotru, qui faites le savant, Régnier, Sat. X. Se trouvant à la fin tout aise et tout heureuse De rencontrer un malotru, La Fontaine, Fabl. VII, 5. Si le financier manque son coup, les courtisans disent de lui : c'est un bourgeois, un homme de rien, un malotru ; s'il réussit, ils lui demandent sa fille, La Bruyère, VI. L'impertinent gazetier ! peut-on dire de telles pauvretés avec un ton si emphatique ? le roi est venu en haute personne… eh ! malotru, qu'importe que sa personne soit haute ou petite ? dis le fait tout rondement, Voltaire, Écoss. II, 6. On y voit tous les jours [à la cour] de beaux seigneurs qui n'ont point de conversation, et des malotrus qui parlent avec assurance, Voltaire, Taureau blanc, II.

    Il est quelquefois adjectif en ce sens. Un personnage malotru. Hélas ! tout malotru qu'il est, je voudrais de tout mon cœur être ce misérable, Hamilton, Hist. de Fleur d'épine.

HISTORIQUE

XIIe s. Tant i avoit des paiens malestruz…, Bat. d'Aleschans, V. 6160.

XIIIe s. Mès mon escondire que vaut, Lasse, chaitive, malostrue, Quant je jà n'en seré creüe ? Ren. 9797. Si m'escuse à mon langage Rude, malostru et sauvage, Car nés ne sui pas de Paris, P. Paris, Mss. fr. t. V, p. 45.

XIVe s. Vers le chastel en va li lerres [larron] malostrus, Baud. de Seb. VI, 613. Calamitosus, chetis, malestrus, Gloss. fonds St-Germ. n° 1189.

XVe s. Malotru, quoquart, testu, Je le voy mieux que tu ne fais, la Nat. de N. S. J. Mystère. N'acquierre jà chevance malostrue : Mieulx vault honneur que honteuse richesce, Deschamps, Ballade, Mieux vaut honneur.

XVIe s. Soudain je fuz certain que ceste compagnie Estoit des malautreux, miserables, chetifs, Tant à Dieu desplaisans qu'à sa bande ennemye, Grangier, Dante, III. Communement on les veoid [les mères] s'addonner aux plus foibles et malotrus [enfants], Montaigne, II, 87. Paix malotrue [paix mal faite], Sully, Mém. t. XII, p. 323, dans LACURNE. Ainsi les pauvres malautrus sont aulcunes fois plus de trois semaines sans manger, Rabelais, II, 3.

ÉTYMOLOGIE

Berry, mauletru ; wallon, mâlastru, étourdi, maladroit ; génev. malatru, malotru, et aussi usé, délabré ; provenç. malastruc ; anc. catal. malastruch ; anc. espagn. malastrugo ; anc. ital. malestruo. Il y a deux formes : l'une, française, est malestrut, du latin male instructus, mal pourvu ; l'autre, provençale, est malastrug, du latin malus, mal, et astrum : qui est sous l'influence d'un mauvais astre. Ces deux formes se sont confondues dans le sens actuel de malotru.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

MALOTRU. Ajoutez : - REM. Voici un exemple de la fin du XVIIe siècle, où malotru est pris dans son sens étymologique de male instructus : En la ville nouvelle d'Amsterdam, il y a un amphithéâtre assez malautru, dont la scène est fixe et sur lequel on jouoit des mommeries qui ne sentaient ni sel ni sauge, Sorberiana, éd. de Toulouse, 1691, p. 18.