« charmer », définition dans le dictionnaire Littré

charmer

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

charmer

(char-mé) v. a.
  • 1Exercer une action magique par le moyen d'un charme. Un faux ciel et une terre feinte se présentèrent au pilote ; et l'impression de la divinité trompeuse qui charmait ses yeux…, Fénelon, Tél. IX. Aurait-elle appris la merveille De si bien charmer ses appas Que je pusse la trouver belle ? Malherbe, V, 10. Il [l'amour] croit charmer ses sens [de Mornai], il croit blesser son cœur, Voltaire, Henr. IX. Je puis t'enseigner des prières Pour charmer la fureur des loups, Béranger, Ch. et laitière. Si le roi de Suède s'est jeté dans le péril… le cardinal de Richelieu pouvait-il charmer la balle qui l'a tué ? Voiture, Lett. 74.

    Le serpent charme et attire les petits oiseaux. Ainsi l'oiseau, faible et timide, Veut en vain fuir l'hydre perfide Dont l'œil le charme et le poursuit, Hugo, Odes, IV, 6.

  • 2 Par extension. Voilà de vos chrétiens les ridicules songes ! Voilà jusqu'à quel point vous charment leurs mensonges ! Corneille, Poly. IV, 3.
  • 3Suspendre l'effet d'un sentiment triste et pénible. Tu charmais trop ma peine, et le ciel qui s'en fâche…, Corneille, Hor. III, 1. Rien ne peut-il charmer l'ennui qui vous dévore ? Racine, Bérén. II, 4. Je charmerai ta peine en attendant le jour, Lamartine, Méd. II, 3.

    Rendre agréable ce qui est désagréable ou ce qui peut être considéré comme fatigant. La lecture charme les loisirs.

  • 4Plaire, ravir. Tel Sophocle à cent ans charmait encore Athènes, Corneille, Au roi. Plût aux dieux Que sa bonté touchât la beauté qui me charme ! Corneille, Cinna, III, 2. … Je m'en doutais, seigneur, que ma couronne Vous charmait bien autant du moins que ma personne, Corneille, Nicom. I, 2. Je ne trouve qu'en vous je ne sais quelle grâce Qui me charme toujours et jamais ne me lasse, Racine, Esth. II, 7. Un Dieu si bon ne peut-il vous charmer ? Racine, Ath. 1, 4. C'est maintenant, dit-il au roi, que vous allez charmer vos sujets, Fénelon, Tél. XI. L'heureux talent dont vous charmez la France, Voltaire, Épît. XXV, 1. Ainsi, pour nous charmer, la tragédie en pleurs, D'Œdipe tout sanglant fit parler les douleurs, Boileau, Art p. III.

    Absolument. Là tout charme et rien n'éblouit.

    Familièrement, causer une vive satisfaction. Vous me charmez en m'apprenant cela.

HISTORIQUE

XIIIe s. Maint homme i est à mort charmé [maltraité], Guiart, t. II, p. 458, vers 11908 (20891).

XIVe s. Le suppliant fery le dit Nepveu un seul coup… et le dit coup charmé de paroles seulement, sanz autre medecine ne garison, le dit Nepveu ala de vie à trespassement, Du Cange, carmen.

XVe s. Tous guerirent, excepté icellui Estienne qui fit charmer sa plaie qu'il avoit sur la teste, sans autre remede y querir, Du Cange, ib. Le quel Anglois se fist, comme l'en dit, charmer par un franc archier, Du Cange, ib. Par quoy on doit son faulcon haster de prendre mue, qui en veut charmer et voler la saison d'yver, Modus, f° XC, verso.

XVIe s. Et bon vin, s'ils en peuvent fournir, à fin de charmer la brouée [tuer le brouillard], Paré, XXIV, 7. Je veux parler, maistresse, à quelque vieil charmeur, Pour vous rendre amoureuse, et changer vostre humeur : Je faux : l'amour qu'on charme est de peu de sejour, Ronsard, 236. …pour charmer mon souci, Page, verse à longs traits du vin dedans mon verre, Ronsard, 273. L'humide nuict qui de son voile enferme L'œil et le soing de l'homme qu'elle cherme, Ronsard, 623. Charmer les puces [s'enivrer], Oudin Platon fait inhibition à ceux qui ont charmé les puces, Cholières, Contes, t. I, dans LE ROUX, Dict. comique.

ÉTYMOLOGIE

Charme 1.