« persuader », définition dans le dictionnaire Littré

persuader

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

persuader

(pèr-su-a-dé) v. a.
  • 1Porter à croire, décider à faire. Vous croirez nous persuader de votre respect envers lui, Pascal, Prov. XII. Elle veut me persuader de passer l'été, et qu'il est ridicule d'aller plus loin, Sévigné, 155. Je ne veux persuader personne, je n'ai que faire d'être persuadé, Fénelon, Dialogue des morts anc. 5. Il lui était impossible de me convaincre, mais elle m'a persuadé, Marmontel, Cont. mor. Misanthr. corr.

    Absolument. L'art de persuader a un rapport nécessaire à la manière dont les hommes consentent à ce qu'on leur propose, et aux conditions des choses qu'on veut faire croire, Pascal, Géom. II. Et peut-être déjà sait-il persuader, Racine, Brit. II, 2. Les anciens ont défini l'éloquence le talent de persuader, et ils ont distingué persuader de convaincre, le premier de ces mots ajoutant à l'autre l'idée d'un sentiment actif excité dans l'âme de l'auditeur et joint à la conviction, D'Alembert, Mél. litt. Œuv. t. III, p. 237, dans POUGENS.

    Se persuader, persuader à soi-même, croire, s'imaginer. Elle s'est persuadé, ils se sont persuadé qu'il fallait partir. Je faiblis, ou du moins ils se le persuadent, Corneille, Au roi, 1676. Nous nous persuadons souvent d'aimer les gens plus puissants que nous, et néanmoins c'est l'intérêt seul qui produit notre amitié, La Rochefoucauld, Réflex. Nos ennemis si jaloux de nos prospérités peuvent à peine se persuader nos malheurs et nos pertes, Massillon, Carême, Mot. de conv.

  • 2Faire croire, en parlant des choses qu'on persuade. Vous serez ébahi, quand vous serez au bout, Que vous ne m'aurez rien persuadé du tout, Molière, Éc. des femmes, I, 1. Les unes [propositions] se tirent, par une conséquence nécessaire, des principes communs et des vérités avouées ; celles-là peuvent être infailliblement persuadées, Pascal, Géométr. II. Vous voulez me persuader la dureté de votre cœur, pour me rassurer sur la perte de votre enfant, Sévigné, à Mme de Grignan, 3 juill. 1677. Ce grand orateur [Cicéron], voyant Antoine près d'envahir la Gaule, persuada au sénat de lui opposer les troupes du jeune César, Vertot, Révol. rom. XIV, 322. Ce don, cet heureux don de tout persuader, Voltaire, Alz. I, 1.
  • 3Se persuader, v. réfl. Donner à soi-même la croyance. On se persuade mieux, pour l'ordinaire, par les raisons qu'on a soi-même trouvées, que par celles qui sont venues dans l'esprit des autres, Pascal, Pens. VII, 10. Se persuader les uns les autres [les luthériens et les zwingliens] était une chose jugée impossible et déjà vainement tentée à Marbourg, Bossuet, Var. IV.
  • 4Devenir l'objet d'une persuasion. La religion se persuade et ne se commande point, Fléchier, Hist. de Théodose, II, 22.

REMARQUE

En 1798, l'Académie mettait dans son Dictionnaire cet exemple : Ils s'étaient persuadés qu'on n'oserait les contredire ; et faisait accorder le participe passé. En 1835 elle écrit persuadé sans s. On peut le faire accorder ou ne le pas faire accorder à son gré : si on supprime l's, on s'appuie sur ce que l'on dit : persuader une chose à quelqu'un ; si on met l's, on s'autorise de ce que l'on dit également : persuader quelqu'un d'une chose.

HISTORIQUE

XVIe s. Le peuple romain se persuada estre desormais assez puissant pour conquerir la monarchie du monde, Amyot, Caton, 29. S'estant essayé de persuader aux Indiens de laisser leur façon et prendre celle des Grecs, Montaigne, I, 117. Sices sottes arguties lui doibvent persuader une mensonge, Montaigne, I, 191.

ÉTYMOLOGIE

Lat. persuadere, de per, et suadere, conseiller.