« abêtir », définition dans le dictionnaire Littré

abêtir

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

abêtir

(a-bê-tir ; quelques-uns disent a-bé-tir)
  • 1 v. a. Rendre bête. Une crainte perpétuelle abêtit l'esprit. Cela vous fera croire et vous abêtira, Pascal, Moyens, I. Ils n'ont songé [le roi et Mme de Beauvilliers], s'écriait-il [le duc de Berry], qu'à m'abêtir et à étouffer tout ce que je pouvais être, Saint-Simon, 243, 252.
  • 2S'abêtir, v. réfl. L'esprit s'abêtit dans l'oisiveté complète.
  • 3Abêtir, v. n. Devenir bête. Les enfants qu'on maltraite abêtissent de jour en jour.

REMARQUE

L'Académie dans ses précédentes éditions écrivait abétir ; c'est qu'en effet la prononciation, devant une finale aussi sonore, a une grande tendance à changer l'e ouvert en e fermé.

SYNONYME

ABÊTIR, RABÊTIR. Rabêtir indique une action plus forte, de la résistance à vaincre dans le sujet. Un maître abêtit l'enfant, quand il laisse ses facultés sans exercice ; il le rabêtit, si, toutes les fois que l'élève manifeste quelque tendance à se développer, le maître la refoule. On abêtit peu à peu, lentement ; on rabêtit par des réprimandes infligées par occasions. On a abêti cet enfant par une mauvaise éducation. Il est tout rabêti par les reproches qu'il vient de recevoir, LAFAYE.

HISTORIQUE

XVe s. Etj'ai repris à mes despens Ce de quoi je me hontioie [j'avais honte] ; Dont grandement m'abestioie ; Car mieux vaut science qu'argens, Froissart, Buisson de jeun. Gens qui cuident estre si sages, Qu'ils pensent plusieurs abestir, Si bien ne se sauront couvrir Qu'on n'aperçoive leurs courages, Orléans, Rond. Il sembloit que ses ennemis fussent aveugles et abestis, Commines, VIII, 4.

XVIe s. Combien ai-je veu d'hommes abestis par temeraire avidité de science ! Montaigne, I, 181. Il nous fault abestir pour nous assagir, Montaigne, II, 214. Laissant ces pompes de farces qui esblouissent les yeux des simples et abestissent leurs sens, Calvin, Inst. 1062. En la fin, ayant là fiché leurs yeux et leurs sens, ils s'y sont abestis, Calvin, ib. 59. Ung homme par maulvais gouvernement se peult abestir, Palsgrave, p. 773. A sa contenance, il ressembla proprement à une personne estonnée ou abestie, et qui a perdu le sens et l'entendement, ne se souvenant plus qu'il estoit le grand Pompeius, Amyot, Pomp. 102. Le plus souvent les princes s'abestissent De deux ou trois que mignons ils choisissent, Ronsard, 651.

ÉTYMOLOGIE

À et bête.