« déprendre », définition dans le dictionnaire Littré

déprendre

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déprendre

(dé-pran-dr'), je déprends, tu déprends, il déprend, nous déprenons, vous déprenez, ils déprennent ; je déprenais ; je dépris ; je déprendrai ; je déprendrais ; déprends, qu'il déprenne ; déprenons, qu'ils déprennent ; que je déprenne, que nous déprenions ; que je déprisse ; déprenant ; dépris v. a.
  • 1Séparer deux choses prises ensemble. On déprit de part et d'autre les crampons de fer, Scarron, Rom. com. II, 19.
  • 2 Fig. Détacher, faire qu'on ne soit pas attaché. Ils y tiennent et s'y attachent si fort qu'il n'y a point de moyen de les en déprendre, Guez de Balzac, 4e disc. sur la cour. Jésus-Christ nous a dépris du commerce des choses de la terre, Traduction des lettres de St Augustin, dans RICHELET. Les années, bien loin de déprendre leur cœur de ce qu'ils ont aimé jusqu'à ne pouvoir se résoudre d'y renoncer pour Dieu, ne servent au contraire qu'à les y attacher davantage, Bourdaloue, Purific. de la Vierge, Myst. t. II, p. 283.
  • 3Se déprendre, v. réfl. Se débarrasser, rompre ses liens. Cet oiseau s'était pris à la glu et ne pouvait s'en déprendre. La double serre [l'ancre] ne s'est pas plutôt déprise de la chevelure de l'abîme, qu'un mouvement se fait sentir dans le corps entier du vaisseau, Chateaubriand, Natch. VII, 318.

    Fig. Les mélancoliques ne se déprennent pas aisément de leurs passions, Guez de Balzac, liv. VII, lett. 6. Des biens dont nos cœurs ne se peuvent déprendre, Bossuet, Fr. d'Ass. 2. Elle ne se peut déprendre de ces pensées sensuelles, Bossuet, Purif. 1. Fortifiez-moi par la douleur pour achever de me déprendre de tout, Fénelon, t. XVIII, p. 165. Plus vous paraissez né d'un caractère facile, léger, inconstant, plus il vous sera aisé de vous déprendre de vos attachements criminels et de revenir à votre Dieu, Massillon, Car. Pécher. Si vous ne pouvez vous déprendre de rien, vous retrancher sur rien…, Massillon, ib. Des liens indissolubles dont on ne peut plus se déprendre, Massillon, Prof. rel. Serm. 2. Un secours qui lui aidât [à l'âme] à se déprendre des filets où le monde et le démon l'avaient enlacée, Massillon, Confér. Excell. du sacerd. Nous ne pouvons nous déprendre de nous-mêmes ; nous n'osons rompre des liens qui nous accablent, Massillon, Panég. St Benoît. Ma mère dont, malgré la mort, son cœur n'avait pu se déprendre, Rousseau, Conf. V.

HISTORIQUE

XIIIe s. Povres et esgarés, essiliés et despris, Berte, XX. Quand ma fille en est si de cuer triste et desprise…, ib. LXXVI.

XVIe s. L'ame semble se desprendre [par les larmes], se desmesler…, Montaigne, I, 8. Faire bouillir un corps pour desprendre la chair d'avecques les OS, Montaigne, I, 5. Se desprendre [détacher] de la vie, Montaigne, I, 79. Se desprendre des opinions et mœurs receues, Montaigne, I, 115. Vous ne les desprenez pas à votre poste [les chevaux fougueux], quand ils se sont une fois harpez, Montaigne, I, 359. Pythagoras faict Dieu un esprit universel, d'où nos ames sont desprinses, Montaigne, II, 248. À quoi ils s'opiniastrerent tellement, que la dame eut toutes les peines du monde à les deprendre [séparer], Yver, p. 598. Ars et Rion se mettent à les desprendre, ce qu'ils ne pouvoient faire sans le secours d'un seau d'eau ; ce duel estant separé…, D'Aubigné, Faen. III, 23. Il est necessaire que peu à peu les tendons et les membranes soient desjointes, ou deprises contre la cicatrice, Paré, XIII, 29.

ÉTYMOLOGIE

Dé… préfixe, et prendre ; bourguig. déprarre, déparre.