« douloir », définition dans le dictionnaire Littré

douloir

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

douloir (se)

(dou-loir) v. réfl.
  • Usité seulement à l'infinitif et encore rarement ; il est dommage que ce verbe si commode et si expressif soit tombé en désuétude. Ressentir de la douleur, se plaindre. On l'entendit se douloir d'une façon lamentable. Et faut bien que ça soit vrai, car j'ai commencé à me douloir dans tous les membres, Beaumarchais, Barb. de Sév. II, 6.

    Régnier l'a encore employé au présent : Mais ce dont je me deulx est bien une autre chose, Sat. VI.

HISTORIQUE

Xe s. Doleants, Frag. de Valenc. p. 468. Tu douls mult ad [à]…, ib. p. 469. E io [je] non [ne] dolreie de tanta millia hominum, si perdut erent [étaient] ? ib.

XIIe s. Bien est droit que je me dueille, Couci, VIII. Jo duil sur tei, chier frere Jonathas, bels e amiables, que jo amoue [aimais] si cum la mere sun fil qui n'ad mais un, Rois, 123. De Deu aiez beneicun, ki dulez ensemble od mei, ib. 91.

XIIIe s. Forment lui deult li cuers, mout fut en grand esmoi, Berte, VII. Ce n'estoit pas merveille se li cuers lui douloit, ib. XXVIII. Si qu'encore s'en deulent cil de ceste lignie, ib. CXLIV. Je departi de li [d'elle] outre mon gré ; C'estoit là riens dont je plus me doloie, Anonyme, dans Couci. Roonel ne lor vost [voulut] mot dire, Einçoiz plore moult et sospire ; Moult li diaut le dos et l'eschine, Ren. 18755. Car li cuers de riens ne se diaut, Quant li oel [les yeux] voient ce qu'il viaut [qu'il veut], la Rose, 2761. Li oignemens moult me valu, Mès toutes voies me dolu La plaie, si que la dolor Me faisoit muer la color, ib. 1880. Tant ai amé, tant aim, tant amerai, Ke je m'en duel et dueluc [du latin, dolui] et daurai Trestous les jours que je serai en vie, Bibl. des Chartes, 4e série, t. V, p. 490. Se le [la] partie contre qui le commandement est fes, se deut [plaint], il se pot traire au segneur, Beaumanoir, 23. À le [la] requeste du païs ou d'aucun de cix [ceux] qui s'en daurroient [plaindraient], Beaumanoir, XXV, 7.

XIVe s. Selon amitié qui appartient à communication de nature humaine, un ami se doit esjoir du bien de l'autre et douler du mal, Oresme, Eth. 26. Temps doulu [temps perdu, temps dont on se deult], Traité d'alch. 279.

XVe s. Celle chose ne peut longuement durer ainsi, que le pays ne s'en aperçoive et dueille, Froissart, III, IV, 56. Dict le proverbe : où la dent se deult, la langue va, Bouciq. IV, ch. 7. Et luy douloit bien de cette division, Commines, I, 15. La royne d'Arragon se doulust de la sentence que le roy donna au prouffit du roy de Castille, Commines, II, 8.

XVIe s. Au despartir, cette très noble dame, Doulante en cueur, navrée jusqu'à l'ame, Marot, J. V, 86. Mais le vrai dueil scez tu bien qui le porte ? C'est cestui-là qui sans tesmoin se deut, Marot, J. III, 175. Il vous deult de ce baiser-cy, Marot, J. III, 192. Je m'en voys au train de tressaillir, comme d'une faveur nouvelle, quand aulcune chose ne me deult, Montaigne, III, 307. L'inconvenient dont toy et moy nous deuillons, La Boétie, 341. Ils doutent si la partie qui se courrouce, qui appete, qui se deult, qui s'esjouit en nous, peut bien obeïr à la raison, Amyot, De la vertu morale, 8.

ÉTYMOLOGIE

Normand, douler ; Berry, se doler, se douler ; provenç. et espagn. doler ; catal. dólrer, dóldrer ; portug. doer ; ital. dolere ; du latin dolere.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

DOULOIR. - HIST.

XIIIe s. Ajoutez : Main ù dout, oil ù vout, proverbe, la main va où l'on souffre, l'œil où l'on veut, Romania, t. III, p. 123.