« déjeuner », définition dans le dictionnaire Littré

déjeuner

Définition dans d'autres dictionnaires :

Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

déjeuner [1]

(dé-jeu-né ; l'Académie écrit jeûner avec un circonflexe, et déjeuner sans accent) v. n.
  • Faire le repas du matin. Nous causerons de cela en déjeunant. Déjeuner de café, de chocolat, d'un morceau de pâté. Déjeuner avec des amis. Çà, déjeunons, dit-il : vos poulets sont-ils tendres ? La Fontaine, Fabl. IV, 4. Du reste, déjeunons, messieurs, et buvons frais, Boileau, Lutr. IV. Lorsque je lis que Périclès sacrifiait tous les matins aux Grâces, ce que j'entends par là, c'est que tous les jours Périclès déjeunait avec Aspasie, Marmontel, Mém. liv. VII.

    Il se conjugue avec l'auxiliaire avoir.

REMARQUE

Déjeuner de, souper de, dîner de, se disent du mets qu'on a mangé : j'ai déjeuné d'une côtelette. Déjeuner avec, souper avec, dîner avec, se disent des personnes avec qui l'on a mangé : j'ai déjeuné avec quelques amis. Cela est fondé en raison, mais souvent négligé dans la pratique, et on dit couramment : déjeuner avec une tasse de café au lait. Nous avions comme il faut séparé nos relais Et déjeunions en hâte avec quelques œufs frais, Molière, Fâch. II, 7.

HISTORIQUE

XIIIe s. Et quant li très [pavillon] l'empereour fu tendus, si se fist maintenant desarmer, et puis s'est un petit desjeüné de pain biscuit et de vin, H. de Valenciennes, IV. Li vallet foulon se doivent desjeüner en charnage ciez [chez] leur mestre à l'eure de prime, Liv. des mét. 134. … Se vos m'en volez doner, Sire, à cel vilain en donez, Tant qu'il en soit desjeünez ; Qar il est si mal atornez Que à paine se puet ester, Ren. 6194. De fain estoie sormenez, Et bien me suis desjeünez De vos harenz à bone estraine, ib. 4006. Bateiz ces chozes en un mortier de cuyvre, à un peteil [pilon] de fer, desgeuneiz-vos dou jus par trois matins : gariz sereiz de la maladie des vers, Rutebeuf, 257.

XIVe s. Quant les autres compagnons sont venus de leurs questes, ils se doivent desjeuner et donner un peu à menger à leurs chiens, Modus, f° XLII, verso. Jà vivres ont no gent à plenté et assez ; En haste ont repeü ; là se sont desjunez, Guesclin. 20720.

XVe s. Et encore en y avoient en la ville beaucoup qui se dejeunoient par les tavernes et buvoient la garnache et la malvoisie chez Lombards, et rien n'en payoient, Froissart, II, II, 115. … Et illec assez près Nous menerent en lieu bel, cler et frès Pour desjuner, Christine de Pisan, Dit de Poissy.

XVIe s. Ilz se desjeunoyent de baisler [bâiller], Rabelais, Pant. V, 27. La plus querelleuse reformation theologienne de quoy le monde se soit desjeuné il y a long temps, Montaigne, IV, 128. À Nimes le roi fut desjeuné de plaintes contre le mareschal d'Anville, D'Aubigné, Hist. I, 204. … Où il se pensoit reposer, quand on le desjeuna de la prise de Marans, D'Aubigné, ib. III, 109. Ils se desjeunerent [firent leur profit] de ce butin, en se retirant à Thoul, Carloix, VII, 3.

ÉTYMOLOGIE

Dé… préfixe, et jeûner, proprement cesser de jeûner, se mettre à manger ; génev. déjuner. En provençal dejunar, en italien digiunare signifient jeûner. La forme ancienne est se desjeuner, s'ôter du jeûne.