« garnir », définition dans le dictionnaire Littré

garnir

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

garnir

(gar-nir) v. a.
  • 1Pourvoir un objet de ce qui est nécessaire pour le mettre en état de remplir sa destination. Garnir une boutique. Garnir un buffet de vaisselle, une bibliothèque de livres. Garnir un étui, un nécessaire. Garnissant sa quenouille immense, Clotho lui dit : oui, travaillons, Béranger, les Parques.

    Populairement. Se garnir le ventre, la panse, bien manger.

    Terme de boulangerie. Garnir le four, mettre à sécher dans le four, immédiatement après une fournée, le bois qui doit servir à la fournée suivante.

  • 2Munir de ce qui est nécessaire pour la défense. Garnir une place de guerre. Garnissez l'Aventin, les portes de Pouzzole, Voltaire, Catil. IV, 2.
  • 3Entourer d'une chose comme ornement ou accessoire, etc. Garnir un chapeau de rubans, un col de dentelles. Garnir un lit. Garnir de persil une pièce de bœuf. Garnir une chambre de tableaux.

    Garnir une robe, y mettre une garniture. Mon cœur, aimez-vous la couleur de ma robe ? - Je la trouve un peu fade, d'ailleurs elle est médiocrement bien garnie, Genlis, Théât. d'éduc. les Dangers du monde, II, 2.

    Garnir des fauteuils, un canapé, les rembourrer de crin, de laine.

    Garnir une épée, y mettre une garde.

    Garnir un ragoût, un mets, y mettre des champignons, etc. Garnir une salade, y mettre de petites herbes hachées.

    Garnir un drap, une étoffe de laine, les lainer, y faire venir le poil par le moyen du chardon.

  • 4Il se dit des choses mêmes avec lesquelles on garnit. Les meubles qui garnissent un appartement. De belles dents garnissaient sa bouche.
  • 5Remplir, occuper un espace. Des femmes élégamment parées garnissent les loges. La troupe garnit les retranchements.
  • 6Renforcer. Garnir des volets de tôle.

    Garnir une tapisserie, y mettre d'espace en espace des bandes de toile pour la conserver.

    Garnir des bas, y mettre des morceaux de bas ou passer des fils à l'envers près les uns des autres dans la longueur des mailles pour faire comme une doublure, surtout aux talons et au bout des pieds. Garnir à l'aiguille, c'est-à-dire garnir avec des fils.

  • 7Se garnir, v. réfl. Se munir. Il a soin de se garnir. Se garnir contre le froid, se vêtir de manière à être préservé du froid.

    Se garnir, se dit d'une femme qui s'entoure de linge, lorsqu'elle est en couches, ou lorsqu'elle a ses règles.

    Se garnir d'argent, en prendre sur soi.

  • 8Être garni. Cette robe se garnit avec de la dentelle.
  • 9Devenir plein. La salle se garnit lentement. Cette campagne commence à se garnir de beaux arbres.

HISTORIQUE

XIe s. De Saragoce Charles guarnist les tors [tours], Ch. de Rol. CCLXIX.

XIIe s. Et France la garnie, Ronc. p. 10. Tuit garni de lor armes si com pour hostoier [faire la guerre], Sax. VI. Vous irez à Cologne la fort cité garnie, ib. VII. E pur ço vus devez de conseil si guarnir, Th. le mart. 83.

XIIIe s. Et ceste ville si est moult riche et moult bonne, et de tous biens garnie, Villehardouin, XLIX. Et li consaus [conseil] fu teus [tel] qu'il issit fors à tout son ost pour reconquerre sa terre, et laissast Constantinoble garnie, car novelement estoit conquise, Villehardouin, CXIII. Il n'i ot si coart qui maintenant ne fust garnis de hardement, H. de Valenciennes, IV. En mi la chambre aveit deux liz, Ben aturnez e ben garniz, Lai del desiré. Et por ce se doit cascuns porveir comment il vient garnis de conseil à son plet, Beaumanoir, V, 20. Je m'estoie garni [approvisionné] de gelines et de chapons, Joinville, 278. Sire, il me semble que il ert [sera] bon que vous retenez les formens et les orges et les ris, et tout de ce quoy en peut vivre, pour la ville garnir, Joinville, 216.

XIVe s. Car un usage ont borjoise tos jours : Jà n'ameront, tant soit de grant valour, Home, s'il n'ait la borse bien garnie, Hist. littér. de la France, t. XXIII, p. 630.

XVe s. Si ne purent gagner le pont, car il estoit bien garni et fut bien defendu, Froissart, I, I, 276. Trop estoient les Bretons courroucés de ce que ils [les Anglois] partoient si pleins et si garnis, Froissart, II, II, 215. Homme garni n'est jamais deceu, Percefor. t. IV, f° 77. Si vueil qu'à force et main garnie, Tantost les allez attraper, Rec. de farces, p. 377.

XVIe s. Ses vaisseaux estoient legers et bien garniz de forçaires, Amyot, Anton. 84. Dedans lequel portique y avoit un conclave garny de sieges tout alentour, Amyot, Brut. 15. Ledit procureur du roy au baillage de Senlis, garny [assisté] de l'advocat dudit seigneur, Coust. gén. t. I, p. 336. Garnir la main de justice, c'est quand un debiteur, lorsque les commandements lui sont faits de payer par un sergent, fournit la somme qu'il doit, ou baille des meubles exploitables, ou qu'il paye provision après la schedule reconnue, Laurière, Gloss. du droit franç.

ÉTYMOLOGIE

Bourguig. gani ; provenç. garnir, guarnir ; anc. espagn. guarnir ; ital. guarnire, guernire ; du germanique : anc. haut-allem. warnôn ; anglo-sax. varnian, avoir soin ; allem. mod. warnen, avertir. C'est le même radical war que dans garer et garder (voy. ces mots).