« glaner », définition dans le dictionnaire Littré

glaner

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

glaner

(gla-né) v. a.
  • 1Recueillir dans les champs les épis échappés au moissonneur. Glaner les épis après la moisson faite.

    On dit dans le même sens glaner un champ. Dans l'Ancien Testament, Dieu défend aux propriétaires de glaner leurs champs.

    Par extension. Voilà l'enfant des chaumières Qui glane sur les bruyères Le bois tombé des forêts, Lamartine, Harm. II, 1.

    Absolument. Booz dit à Ruth : Écoutez, ma fille, n'allez point dans un autre champ pour glaner, et ne sortez point de ce lieu, Sacy, Bible, Ruth, II, 8.

    Fig. L'indigence glane chez d'autres, Mais elle moissonnait chez lui, Béranger, Étoil. qui filent.

  • 2 Fig. Recueillir le peu qui a été laissé ou négligé par d'autres, en parlant de profits. Ces nations [Anglais, Français] n'ont fait que glaner après les riches moissons [en Amérique] des Espagnols, Voltaire, Mœurs, 149.
  • 3 Fig. Il se dit en un sens analogue des choses d'esprit. Cette époque a été bien étudiée ; à peine y pourrait-on glaner quelques faits. Lire Homère, Aristote, et, disciple nouveau, Glaner ce que les Grecs ont de riche et de beau, Régnier, Sat. XII.

    Absolument. Mais ce champ ne se peut tellement moissonner, Que les derniers venus n'y trouvent à glaner, La Fontaine, Fabl. III, 1. Tout est dit… depuis six mille ans qu'il y a des hommes, et qui pensent… l'on ne fait plus que glaner après les anciens, La Bruyère, I. Les anecdotes sont un champ resserré où l'on glane après la vaste moisson de l'histoire, Voltaire, Louis XIV, 25. L'ouvrage de Sénèque est un champ où l'on trouve toujours à glaner, Diderot, Règne de Claude et Nér. II, 3.

HISTORIQUE

XIIIe s. Et si ne soit si hardis gleneres ou gleneresse ki voist [aille] à camp glener en jour de feste ne en diemence souz le fourfait de cinq sols, Tailliar, Recueil, p. 410. Se j'ai trové aucun espi Après la main es mestiviers, Je l'ai glané molt volentiers, Hugues de Mery, le Tournoiement de l'antechrist, p. 104.

XVe s. Chascuns pense de glainer sa moisson, Et d'amasser joiaulx, or et finance, Deschamps, Administrat. de l'hôtel du prince.

XVIe s. Celui ne choisit pas qui glane, Leroux de Lincy, Prov. t. I, p. 75,

ÉTYMOLOGIE

Génev. gléner, glainer ; picard, glainer ; Berry, glainer, glener ; provenç. grenar, dans Gramm. de Faidit, publiée par GUESSARD, 2e éd. p. 31 ; bas-lat. glenare (si quis in messem alienam glenaverit, texte de la fin du VIe siècle). Diez note l'étymologie indiquée par Leibnitz : kimry, glain, glân, net ; à quoi il ajoute le scandinave glana, éclaircir ; de sorte que glaner serait proprement nettoyer. Cela est possible sans être très satisfaisant ; il ne faut donc pas perdre de vue le bas-latin geliba, gelima, gelina, gerbe, poignée ; anglo-saxon, gelm, gilm, poignée. Ici le sens est satisfaisant, et les variations de la consonne laissent jour à la transformation. Il reste donc de l'incertitude entre une étymologie bonne pour la forme, moins bonne pour le sens ; une autre bonne pour le sens et moins bonne pour la forme. Le provençal grenar paraît être une forme accidentelle, et ne se rattacher en rien à granum, grain.