« maîtriser », définition dans le dictionnaire Littré

maîtriser

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

maîtriser

(mê-tri-zé) v. a.
  • 1Se rendre maître de. La voyant aimer Dieu et la chair maîtriser, Régnier, Sat. XII. La postérité le mettra [Charles 1er] au rang des grands princes, si son histoire trouve des lecteurs dont le jugement ne se laisse pas maîtrise" aux événements ni à la fortune, Bossuet, Reine d'Anglet. Il y a bien de la force dans un esprit qui n'est pas maîtrisé par les impressions du dehors, même les plus légères, Fontenelle, Montmort. Je fais plus ; de mes sens maîtrisant la faiblesse, J'ose de mon rival appuyer la tendresse, Voltaire, Adél. du Guesclin. I, 1. Aimez, mais en héros qui maîtrise son âme, Voltaire, ib. II, 7. Comment un écrivain supérieur sait à la fois enhardir et maîtriser une langue timide et minutieuse, D'Alembert, Élog. Boss. note 7. Il s'était rendu maître de toutes les passions, à l'exception d'une seule qui le maîtrisait, et qui, enrichie de la dépouille des autres, était devenue tyrannique, injuste, incapable de pardonner une offense : c'était un amour excessif de la gloire, Barthélemy, Anach. ch. 1.

    Maîtriser la fortune, faire tourner les événements à son avantage. Quand je vois… La France sous tes lois maîtriser la fortune, Boileau, Disc. au roi. Quelquefois la sagesse a maîtrisé le sort ; C'est le tyran du faible et l'esclave du fort, Voltaire, Pélop. I, 1.

  • 2Gouverner en maître. Ce sénat de tyrans dont l'orgueil nous maîtrise, Voltaire, Brut. II, 1. Oh ! que j'ai de chagrin De voir ces deux fripons maîtriser mon parrain ! Collin D'Harleville, Vieux célib. II, 4.
  • 3Dompter par une force supérieure. Deux gardiens vigoureux purent à peine maîtriser ce fou.
  • 4Se maîtriser, v. réfl. Être maître de soi-même, contenir ses passions.

HISTORIQUE

XIIe s. Car fine amors tient mon cuer et maistroie, Couci, XVI. À Cantorbire vindrent parler e coseillier à dan Randulf del Broc, e pur lui enticier [exciter] Qu'il deüst l'arcevesque e les suens maistreier, Th. le mart. 122.

XIIIe s. [La femme] Qui porta tel roÿne qui ainsi nous maistrie [tyrannise], Berte, LXXII.

XIVe s. Par sobrieté on maistrie le corps si comme le cheval par le frain, Ménagier, I, 3. Comme le suppliant ne povoit maistrier le dit cheval, Raynouard, Gloss.

XVe s. Certes, corps, tu auras mesaise ; Jamais ne me mestrieras ; Jà sy fort ne me tempteras, Mir. de Ste Gener. Celle ville de Dam est bonne assez ; elle vous venra bien à point pour mestrier Bruges et l'Escluse, Froissart, II, II, 230.

XVIe s. Il ne peut avec la raison maistriser sa cholere, Amyot, Pélop. 60. Alors descouvrit on evidemment qu'il estoit ambitieux oultre mesure, de se laisser maistriser à ceste passion de jeunesse au decours de sa vieillesse, Amyot, Flamin. 39. Elle ne se contentoit point d'estre maistresse de son mary en son privé, ains le vouloit maistriser estant en magistrat, Amyot, Ant. 14. D'amour, de la fortune et des grands maistrisé, Qui m'ont payé de vent pour toute recompense, Desportes, Œuvres chrestiennes, Sonnets, 1.

ÉTYMOLOGIE

Maîtrise ; provenç. majestrar, maestrar, maistrar, maestreiar, maistreiar, maestriar ; anc. espagn. maestrar ; espagn. mod. maestrear ; ital. maestrare.