« polir », définition dans le dictionnaire Littré

polir

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

polir

(po-lir) v. a.
  • 1Rendre uni et luisant à force de frotter. On polit l'émeraude, on tailla le rubis, Boileau, Ép. IX. C'est en polissant les plâtres à l'huile, qu'on leur donne un lustre presque aussi brillant que celui d'un beau marbre, Buffon, Min. t. II, p. 55. De temps immémorial, les Chinois et surtout les Japonais savent travailler et polir l'acier en grand et petit volume, Buffon, Hist. min. Introd. part. expos. Œuv. t. VII, p. 259.

    Fig. Artistes ou plutôt artisans malheureux, dont le sort est de refroidir tout ce qu'ils touchent, et d'user tout ce qu'ils polissent, D'Alembert, Élog. Despréaux.

  • 2 Fig. Orner l'esprit, adoucir les mœurs. Il y a toujours dans cette nation de barbares [les Français] deux ou trois mille personnes très aimables, d'un goût délicat et de très bonne compagnie, qui à la fin poliront les autres, Voltaire, Dict. phil. Supplices.

    Il se dit aussi de la langue. Il se peut que les Arabes aient poli leur langue, Diderot, Opin. des anc. phil. (Arabes)

  • 3Rendre civil, donner les manières de la politesse. On polit un homme de robe, on apprend à vivre à un abbé, on met un jeune homme dans le monde, Dancourt, Été des coq. SC. 1.

    Fig. Un homme de cette sorte est un savant artisan de calomnies… il sait préparer et polir admirablement les mauvais offices, Guez de Balzac, De la cour, 5e disc.

  • 4 Fig. Mettre la dernière main à un ouvrage d'esprit. Vous me dites fort plaisamment que vous croiriez m'ôter quelque chose en polissant vos lettres ; gardez-vous bien d'y toucher, vous en feriez des pièces d'éloquence, Sévigné, 145. Si, deux jours seulement libre du jardinage, Devenu tout à coup poëte et bel esprit, Tu t'allais engager à polir un écrit, Boileau, Ép. X. L'autre en vain se lassant à polir une rime, Boileau, Disc. au roi.
  • 5Se polir, v. réfl. Devenir uni, luisant. Un corps qui se polit par le frottement.
  • 6Se rendre à soi-même le poil luisant. Les écureuils se peignent et se polissent avec les mains et les dents, Buffon, Écureuils.
  • 7Se dit des mœurs qui s'adoucissent et des esprits qui s'ornent. On voit les lois s'établir, les mœurs se polir, et les empires se former, Bossuet, Hist. I, 2. Il en repartit quelque temps après pour voyager, selon la coutume de sa nation, qui croit avoir besoin du commerce des autres pour se polir, et qui en doit parvenir d'autant plus aisément à se rendre plus polie qu'elles, Fontenelle, Tschirnhaus. On voit, lettre LVII [de Sénèque], que la langue latine s'était appauvrie, comme la nôtre, en se polissant, Diderot, Claude et Nér. II, 20.

HISTORIQUE

XIIe s. Atant i vint une [dame] jolie, Qui biele estoit et bien polie, Lai d'Ignaurès. Le front poli et clair, les oils vairs et rians, Sax. V.

XIIIe s. Mais li felon plein de rage Sevent [savent] si biau leur langage Et leur mos polir, Qu'on ne sait choisir [discerner] Li quels a loial corage, Mätzner, p. 53. En son miroer perdurable, Que nus [nul], fors li, ne set polir, la Rose, 17673.

XVe s. Lors le roy… print son escu que portoit l'un de ses escuyers et son glaive, et après se polit et acoustra de ses armes, Perceforest, t. I, f° 27.

XVIe s. Au dedans c'estoit l'ame la plus polie du monde, Montaigne, I, 147. Par une pente doulce et polie, Montaigne, I, 176. Tharrytas, ayant le premier poly les villes de son païs, et orné de lettres grecques, loix et coustumes civiles, Amyot, Pyrrh. 2.

ÉTYMOLOGIE

Prov. polir ; espagn. pulir ; ital. pulire ; du lat. polire.