« ruse », définition dans le dictionnaire Littré

ruse

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

ruse

(ru-z') s. f.
  • 1Détours, expédients du lièvre, du cerf, du renard, quand on les chasse (ce qui est un des sens primitifs). Les ruses et les moyens que les animaux sauvages mettent en œuvre pour se dérober à la recherche, ou pour éviter la poursuite et les atteintes des chiens, sont peut-être plus merveilleux que les méthodes les plus fines de l'art de la chasse, Buffon, Quadrup. t. I, p. 359.
  • 2Moyen qu'on emploie pour tromper. La ruse la mieux ourdie Peut nuire à son inventeur Et souvent la perfidie Retourne sur son auteur, La Fontaine, Fabl. IV, 11. Tu prétends être fort habile ; En sais-tu tant que moi ? j'ai cent ruses au sac, La Fontaine, ib. IX, 14. Ce n'est plus que la ruse aujourd'hui qui l'emporte, Molière, Mis. V, 1. Osez-vous recourir à ces ruses grossières, Et croyez-vous les gens si privés de lumières ? Molière, ib. IV, 3. La ruse est un talent naturel au sexe ; et, persuadé que tous les penchants naturels sont bons et droits par eux-mêmes, je suis d'avis qu'on cultive celui-là comme les autres ; il ne s'agit que d'en prévenir l'abus, Rousseau, Ém. V.

    De ruse, par la ruse. Ainsi du genre humain l'ennemi vous abuse : Ce qu'il ne peut de force, il l'entreprend de ruse, Corneille, Poly. I, 1.

    Fig. À partir des choses les plus simples dans la vie, il serait aisé de prouver que nous ignorons tout, et nous voulons pénétrer dans les ruses de la sagesse ! Chateaubriand, Génie, I, I, 3.

    Ruse de guerre, moyen qu'on emploie pour tromper les ennemis sur ses desseins, sur ses opérations, etc. Gélon était fort habile dans le métier de la guerre, surtout pour les ruses, Rollin, Hist. anc. Œuv. t. I, p. 252, dans POUGENS. Une lettre de Berthier à Kutusof, datée du premier jour de cette marche de flanc, fut à la fois une dernière tentative de paix et peut-être une ruse de guerre, Ségur, Hist. de Nap. IX, 1.

    Ruses innocentes, petites finesses dont on se sert à bon dessein.

    Ruses de l'enfer, les suggestions insidieuses du démon. Après m'avoir montré cette soif du baptême, Pour opposer à Dieu l'intérêt de Dieu même, Vous vous joignez ensemble ! ah ! ruses de l'enfer ! Corneille, Poly. V, 3.

HISTORIQUE

XIVe s. Comment li chiens sont si sages, qu'ilz deffont toutes les ruses que les cerfs font, Modus, f° 24, verso.

XVe s. Et quand ledit Jean estoit hors de la prison… il rentroit en sa ruse comme devant, Froissart, II, II, 106. Ruses de commeres, dist Passalion, trop ay entendu, Perceforest, t. IV, f° 109. Le suppliant, tout par ruse [jeu] et par esbat, comme dit est, recula un bien peu, Du Cange, rusare.

ÉTYMOLOGIE

Voy. RUSER ; Berry, ruse, reculement, pièce du harnais d'un cheval de trait (le sens de reculer est un des sens primitifs de ruser) ; picard, avoir des ruses, avoir beaucoup de mal à faire quelque chose.