« sensibilité », définition dans le dictionnaire Littré

sensibilité

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

sensibilité

(san-si-bi-li-té) s. f.
  • 1Qualité de sentir, c'est-à-dire propriété dévolue à certaines parties du système nerveux, par laquelle l'homme et les animaux perçoivent les impressions soit faites par les objets du dehors, soit produites à l'intérieur. Quand la chaleur de la terre s'est assez attiédie pour ne pas offenser la sensibilité des êtres qui nous ressemblent, Buffon, 6e époque, Œuv. t. XII, p. 293. Je ne saurais douter raisonnablement que je ne sois doué de sensibilité, d'entendement, de volonté, parce que j'exerce à chaque instant ces facultés, Bonnet, Œuv. mêlées, t. VIII, p. 236, dans POUGENS. Exister pour nous, c'est sentir ; notre sensibilité est incontestablement antérieure à notre intelligence, Rousseau, Ém. IV. La source de toutes les passions est la sensibilité ; l'imagination détermine leur pente, Rousseau, ib.
  • 2Sensibilité organique, expression encore fréquemment employée mais tout à fait abusive, par laquelle on désigne l'aptitude des éléments anatomiques à s'assimiler certains principes immédiats et leur inaptitude à en assimiler d'autres.
  • 3Il se dit de la susceptibilité à l'impression des choses morales. La sensibilité que j'ai pour tous les intérêts [de ma chère enfant], Sévigné, 9 mai 1680. Il se forme dans les grandeurs une nouvelle sensibilité pour les déplaisirs, dont le coup est d'autant plus rude qu'on est moins préparé à le soutenir, Bossuet, Mar.-Thér. Une âme faible… qui n'apporte jamais à l'autel que des promesses cent fois violées, que des sensibilités de dévotion que le premier plaisir étouffe, Massillon, Avent, Dispos. à la comm. Un reste de respect, et une certaine sensibilité pour la vérité, Massillon, Carême, Parole de Dieu. Ainsi votre sensibilité sur les injures, toujours trop écoutée, a poussé votre orgueil à un tel point, que…, Massillon, Carême, Tiéd. 2. Avoir dans la défaillance de l'âge… la même sensibilité pour le plus léger refroidissement du maître, que dans l'âge le plus vif et le plus florissant, Massillon, Carême, Dang. des prospér. temp. Ainsi la vie se passe, la conscience s'use, la sensibilité au bien s'éteint, Massillon, Carême, Pâques. J'avais apporté de Paris le préjugé qu'on a dans ce pays-là contre la musique italienne ; mais j'avais aussi reçu de la nature cette sensibilité de tact contre laquelle les préjugés ne tiennent pas, Rousseau, Conf. VII.
  • 4Sentiments d'humanité, de pitié. de tendresse. Ce n'était pas ici une de ces sensibilités de caprice, qui n'ouvrent le cœur à certains maux que pour le fermer à tous les autres, Massillon, Or. fun. Villars. Ces sensibilités vulgaires que les faiblesses déshonorent, et où, à force de donner tout à la tendresse, on ne donne rien à la raison et au devoir, Massillon, Or. fun. Madame. La sensibilité fait tout notre génie ; Le cœur d'un vrai poëte est prompt à s'enflammer, Et l'on ne l'est qu'autant que l'on sait bien aimer, Piron, Métrom. I, 3. Il y a une espèce de sensibilité vague qui n'est qu'une faiblesse d'organes, plus digne de compassion que de reconnaissance, Duclos, Consid. mœurs, 14. La vraie sensibilité serait celle qui naîtrait de nos jugements et ne les formerait pas, Duclos, ib. La sensibilité n'est jamais sans faiblesse d'organisation, Diderot, Parad. coméd. Mém. t. IV, p. 13, dans POUGENS. La tendresse se borne au sentiment qui fait aimer ; la sensibilité a pour objet tout ce qui peut affecter l'âme en bien ou en mal, D'Alembert, Synon. Œuv. t. III, p. 329.
  • 5 Terme de physique. Grande justesse d'un instrument qui le rend capable d'indiquer les différences les plus légères. Sensibilité d'une balance.

    Sensibilité de la main, qualité par laquelle le cavalier sent immédiatement si les rênes produisent l'effet nécessaire.

  • 6 Fig. Qualité d'être senti, c'est-à-dire caractère sensible, matériel. Il faut bien prendre garde à tempérer de telle manière la sensibilité de ses expressions que l'on ne fasse que rendre l'esprit plus attentif, Malebranche, Recherche, VI, 3.

HISTORIQUE

XIVe s. L'utilité de la sensibleté de cuir fu que le cors, qui en est avironé, ne fust pas blecié sans le savoir, H. de Mondeville, f° 10, verso. L'excellent sensibleté que le nerf ot [eut], H. de Mondeville, f° 21, verso. Ce [que l'anatomie est nécessaire] puet estre prouvé en trois manieres : la premiere par autorités ; la seconde par sensibilité semblable [un exemple semblable] ; la troisieme par raison, H. de Mondeville, f° 7, verso.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. sensibilitat ; espagn. sensibilidad ; ital. sensibilità ; du lat. sensibilitatem, de sensibilis, sensible.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

SENSIBILITÉ. Ajoutez :
7 Fig. Se dit de la régularité avec laquelle un marché, une bourse obéissent aux plus légères différences. Le marché des grains d'une sensibilité excessive, Horn, l'Écon. pol. avant les physiocrates, ch. IX. En démontrant l'extrême sensibilité de ce jeu de bascule [l'offre et la demande], ID. ib.