« redire », définition dans le dictionnaire Littré

redire

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

redire

(re-di-r') v. a.

Il se conjugue comme dire, et par conséquent il fait à la 2e pers. du plur. de l'indicatif présent et de l'impératif redites.

  • 1Dire de nouveau, dire une même chose plusieurs fois. Il l'interrogea, et lui fit redire plusieurs fois toutes les circonstances de ce songe, Fléchier, Hist. de Théodose, IV, 54. M. Letellier sut quelquefois employer son temps pour compatir à des misérables à qui il ne reste d'autre consolation que celle de redire ennuyeusement leur misère, Fléchier, Letellier. Obéissez ; c'est trop vous le faire redire, Racine, Mithr. III, 1. Je me souviens toujours que je vous dois l'empire, Et, sans vous fatiguer du soin de le redire…, Racine, Brit. IV, 2. J'ai dit et je redis que la mort de la maréchale d'Ancre et celle du maréchal de Marillac sont la honte éternelle des lâches barbares qui les condamnèrent, Voltaire, Polit. et lég. la Méprise d'Arras. Si tôt que j'ai su chanter des airs notés, je n'en ai pu retenir aucun, et je doute que de ceux que j'ai le plus aimés, j'en pusse aujourd'hui redire un seul tout entier, Rousseau, Confess. VIII. Le roi se fit redire ces vers jusqu'à trois fois, loua beaucoup l'épître, et fit la guerre, D'Alembert, Éloges, Despréaux.

    Ne pas se le faire redire, obéir aussitôt à un avis, à une injonction. L'autre deux fois ne se le fait redire, La Fontaine, Lun.

  • 2Répéter ce qu'un autre a dit. L'écho redit la dernière syllabe. On dit, et sans horreur je ne puis le redire, Qu'aujourd'hui par votre ordre, Iphigénie expire, Racine, Iph. IV, 6. Les pères raconteront à leurs enfants le bonheur qu'ils eurent de vivre sous un si bon maître ; ceux-ci le rediront à leurs neveux, Massillon, Pet. carême, Incarnat. Ils lui répondirent avec beaucoup de respect, que c'était une chose qu'on n'osait redire à une grande reine, et se défendirent longtemps de la répéter, Fontenelle, Dial. I, Morts mod.

    Raconter. Muse, redis moi donc quelle ardeur de vengeance De ces hommes sacrés rompit l'intelligence, Boileau, Lutr. I. Ce prince, dont mon cœur se faisait autrefois Avec tant de plaisir redire les exploits, Racine, Andr. V, 1. Muse, redites-moi ces noms chers à la France, Consacrez ces héros qu'opprima la licence, Voltaire, Henr. IV.

    Fig. Et toujours mes soupirs vous rediront ma peine, Racine, Thèb. V, 6. Ma joie, mes soupirs et mes larmes même, te rediront sans cesse mes amours, Montesquieu, Temple de Gnide, 6.

  • 3Révéler par indiscrétion. Cet homme n'est pas sûr, il redit ce qu'il entend. Vous êtes donc un causeur, et vous allez redire ce qu'on vous dit en secret, Molière, G. Dandin, II, 7.
  • 4Blâmer, censurer ; il ne s'emploie en ce sens qu'à l'infinitif et avec à. Ils prendront droit par là de me persécuter plus que jamais, et voudront trouver à redire aux choses les plus innocentes qui pourront sortir de ma plume, Molière, 2e placet au roi. Il… pense que louer n'est pas d'un bel esprit, Que c'est être savant que trouver à redire, Molière, Mis. II, 5. Je ne suis donc bonne qu'à discourir, à trouver à redire à ce qui est mal, Sévigné, 603. La principale chose que l'on trouve à redire dans la manière dont M. Descartes fait naître le soleil, les étoiles, la terre et tous les corps qui nous environnent, c'est qu'elle paraît contraire à ce que l'Écriture sainte nous apprend de la création du monde, Malebranche, Rech. VI, II, 4. Ils sont trois ou quatre qui portent chacun une aune de ses cheveux en bracelets, sans qu'on y trouve à redire, Hamilton, Gramm. 9.

    Trouver à redire, regretter, être sensible à la perte, à la privation, à l'absence de… Nous badinâmes quelque temps ; et ce fut là où nous commençâmes à vous trouver à redire, Bussy-Rabutin, à Mme de Sévigné, 1er sept. 1677. Je vous ai trouvée bien à redire depuis quinze jours, Bussy-Rabutin, 15 sept. 1677.

    Aimer à redire, aimer à reprendre, à blâmer

    À redire, s'emploie aussi en parlant d'un compte, d'une appréciation qui ne sont pas fidèles, d'une espérance qui est trop grande. Il y avait à redire aux comptes qu'il a remis. Il se flatte de faire vite fortune, peut-être y trouvera-t-il à redire. Des cadeaux si vous faites cas, Vous y trouverez à redire [vous n'en aurez pas autant que vous en espérez], Béranger, Filleule.

  • 5Se redire, v. réfl. Être redit. Les vérités utiles ne sauraient trop se redire.

HISTORIQUE

XIIe s. Deus nostre sires dit : les meies leis [mes lois] guardez ; Li prophetes redit : wai vus [malheur à vous] qui estorez Les lois de felunie, e vus qui les guardez, Th. le mart. 80.

XIIIe s. Lors li dit le roy, que il redeist tout ce que il avoit dit au matin, Joinville, 259. Tot cil qui voient, redisoient Que si biel homme ne savoient, Le beau desconnu, dans Arch. des missions scientifiques, t. V, p. 169.

XVe s. …chacun s'atire Le mieulx qu'il pot de vesture, et se mire, Si qu'en l'atour il n'y ait que redire, Christine de Pisan, Li dit de Poissy.

XVIe s. Il n'est pas loisible de publier ny redire à autruy ce que l'on y a cogneu, Amyot, Fab. 10. Elle ne peut produire un homme si parfaict ne si bien composé à la vertu, qu'il n'y ait tousjours quelque chose à redire, Amyot, Cimon, 5. Nostre charge [dans les leçons reçues] ce n'est que redire ce qu'on nous a dict, Montaigne, I, 160. Le serviteur, pour n'estre plus en peine de luy redire si souvent mesme chose…, Montaigne, II, 108. Les paroles redictes [rapportées] ont, comme aultre son, aultre sens, Montaigne, IV, 230. Elle [Catherine de Médicis] estoit joviale, et aimoit à dire le mot, et où il y avoit à redire, Brantôme, Dames illustres, p. 49.

ÉTYMOLOGIE

Re…, et dire ; provenç. redire, redir ; espagn. redecir ; ital. ridire.