« écuelle », définition dans le dictionnaire Littré

écuelle

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

écuelle

(é-kuè-l' ; kuè est diphthongue et ne fait qu'une syllabe) s. f.
  • 1Vase creux contenant la portion ordinaire d'une seule personne. Écuelle de bois, de terre, d'argent. Il faut, perdant le jour, esprit, sens et vigueur, Mourir comme Enguerrand ou comme Jacques Cœur, Et descendre là-bas où, sans choix de personnes, Les écuelles de bois s'égalent aux couronnes, Régnier, Sat. XVI. Diogène n'avait pour tout meuble qu'un bâton, une besace et une écuelle ; encore, ayant aperçu un jeune enfant qui buvait dans le creux de sa main : il m'apprend, dit-il, que je conserve encore du superflu, et il cassa son écuelle, Rollin, Hist. anc. liv. XXVI, 1re part. ch. II, art. 6. Mon cher maître, répondit Cacambo, Cunégonde lave les écuelles sur le bord de la Propontide, chez un prince qui a très peu d'écuelles, Voltaire, Cand. 27.

    Prendre l'écuelle aux dents, se mettre à manger. Au fond d'un antre sauvage Un satyre et ses enfants Allaient manger leur potage Et prendre l'écuelle aux dents, La Fontaine, Fabl. V, 7.

    Ils se raccommoderont à l'écuelle comme des gueux, c'est-à-dire en mangeant ensemble.

    Verser son écuelle, faire mal ses affaires.

    Manger à la même écuelle, manger ensemble ; et, fig. avoir des affaires, des projets communs.

    Il a plu dans son écuelle, il lui est venu beaucoup de bien.

    Rogner l'écuelle à quelqu'un, lui retrancher de sa subsistance, de son revenu.

    Cela est propre comme une écuelle à chat, se dit de quelque chose de sale. D'autres, vu que le chat est un animal qui lèche les plats comme si on les lavait, attribuent à cette locution un sens opposé et la disent de quelque chose de propre, de net.

    Mettre tout par écuelles, ne rien épargner pour faire grand'chère à quelqu'un. Et notre pédant commença incontinent de mettre tout par écuelles, chargeant la table d'une honnête collation, Francion, liv. IV, p. 151.

    On dit dans un sens analogue : tout va par écuelles. Comment ! vous vous plaignez que tout va par écuelle ? Legrand, Roi de Cocagne, I, 3.

    Anciennement. Archer de l'écuelle, archer chargé d'arrêter les mendiants [les mendiants portaient écuelle].

    Au moyen âge, dans les dîners, même les plus grands, la part de chaque convive se servait dans des écuelles.

  • 2Le contenu d'une écuelle. J'ai vu mille pauvres recevoir mille écuelles de soupe à la porte de Marmoutiers, Courier, I, 183.
  • 3Écuelle d'eau, plante ombellifère qui croît dans les marécages (hydrocotyle vulgaris), dite aussi herbe aux Patagons.
  • 4 Terme de marine. Plaque de fer creuse sur laquelle s'appuie et tourne le pivot du cabestan d'un navire. On dit aussi chaudron ou saucier.
  • 5 Terme de zoologie. Disque que les deux nageoires ventrales forment en se réunissant, chez certains poissons.

PROVERBES

Il n'y a dans cette maison ni pot au feu, ni écuelles lavées, c'est une maison où tout manque pour la cuisine.

J'aime mieux mon écuelle vide que rien dedans, c'est-à-dire j'aime mieux n'avoir rien que d'avoir quelque chose en apparence et rien en réalité.

Qui s'attend à l'écuelle d'autrui a souvent mal dîné, c'est-à-dire celui qui fait trop de fonds sur autrui est souvent déçu.

HISTORIQUE

XIIe s. Hom d'Aroaise ne vaut une cinele ; Trop par sont bon por vuidier escuele, Raoul de C. 48.

XIIIe s. À tart manjue qui à autrui escuele s'atent, Leroux de Lincy, Prov. t. II, 195. Et doit, por grace deservir, Devant le compaignon servir, Qui doit mengier en s'escuele, la Rose, 13605. Et si [la femme de Rutebeuf] n'est pas gente ne bele, Cinquante anz a en s'escuele, S'est maigre et seche, Rutebeuf, 6.

XIVe s. Lesquelx jouerent ensemble toute nuit à croix et à pille, et entre deux escuelles, et à autres jeux, Du Cange, escuallium.

XVe s. Avant que je fisse ce marché, il ne me demeureroit plat d'argent ni escuelle à vendre ou à engager, Froissart, III, IV, 25. Il y eut jusques à huyt cent chevaliers seans à table, et si n'y eut celuy qui n'eust une dame ou une pucelle à son costé ou à son escuelle, Perceforest, t. I, f° 21. Ainsi aura chascun une mienne niepce à son escuelle, ib. f° 125. Vint Lizane sa damoiselle qui apportoit l'escuelle du premier mets, ib. f° 91. Lors vindrent les servans et servirent du dernier mets, qui estoit de chevrots de presse confitz en espices, et c'estoit le souverain mets que on servist adonc, et en avoit à chascune escuelle le quartier d'ung, ib. f° 130. En grant escuelle peut l'en faire mauvaise part, Leroux de Lincy, Prov. t. II, p. 196. Qui est loing de son escuelle est près de son domaige, ib. p. 391.

XVIe s. Bassins, plats, plats-escueles, assietes, escueles-à-oreille, salieres, cueillers…, De Serres, 881.

ÉTYMOLOGIE

Wallon, hièle ; namur. sicuale, chuèle ; provenç. escudella ; espagn. escudilla ; portug. escudela ; ital. scodella ; du latin scutella, diminutif de scuta, écuelle. Dans l'ancienne versification, cuel, dans escuele, faisait deux syllabes.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

ÉCUELLE.

Ajoutez : 6° Nom donné aux intervalles qui séparent les filets d'un pas de vis, Manuel du tourneur, Roret.