« épurer », définition dans le dictionnaire Littré

épurer

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

épurer

(é-pu-ré) v. a.
  • 1Rendre pur, purifier. Épurer de l'eau en la filtrant. Le feu épure les métaux. Il règne en dieu sur les airs qu'il épure, Des prés, des bois ranime la verdure, Malfilâtre, Narcisse, ch. I.

    Fig. Le malheur avait épuré l'armée ; ce qui en restait n'en pouvait être que l'élite, d'esprit comme de corps, Ségur, Hist. de Nap. v, 2.

  • 2Rendre plus pur, en parlant des choses morales. Épurer les mœurs, les sentiments. Dieu veut épurer votre charité par les afflictions, Bossuet, Souff. 2. Dégageant l'âme des sens, elle épure la vue de la foi, Massillon, Car. Tiéd. 1. Mais je parle à Brutus… Dont le cœur inflexible, au bien déterminé, Épura tout le sang que César t'a donné, Voltaire, M. de Cés. III, 2. Je fais en frémissant ce sacrifice impie, Mais mon devoir l'épure, et mon trépas l'expie, Voltaire, Orphel. IV, 6. Il ne sera jamais question, pour des Français, dont la constitution vient d'épurer les idées de justice, de faire ou de concerter une guerre offensive, c'est-à-dire d'attaquer les peuples voisins lorsqu'ils ne nous attaquent point, Mirabeau, Collection, t. III, p. 301.

    Purger de. Mais qui connaît, Seigneur, les péchés d'ignorance ? Épure-m'en dès aujourd'hui, Corneille, Psaume XVIII.

    Épurer un auteur, l'expurger.

    Épurer le théâtre, n'y mettre rien qui puisse blesser les mœurs.

  • 3Rendre poli, châtié, en parlant du langage et des ouvrages d'esprit. Cet auteur a contribué à épurer la langue. La satire, en leçons, en nouveautés fertile, Sait seule assaisonner le plaisant et l'utile, Et d'un vers qu'elle épure aux rayons du bon sens, Détromper les esprits des erreurs de leur temps, Boileau, Sat. IX. On a voulu épurer notre langue depuis François 1er, peut-être a-t-on fait comme ces médecins qui, à force de saigner et de purger, précipitent leur malade dans un état de faiblesse d'où il a bien de la peine à revenir, D'Olivet, Rem. Racine, § 13. Trop heureux l'écrivain qui dans la solitude… Épure ses travaux dans le creuset du temps, Millevoye, Indépendance du poëte. Écrivain soigneux et correct, il [Robertson] s'attachait à épurer son style de ces idiotismes écossais qu'affecte aujourd'hui le célèbre romancier d'Édimbourg [W. Scott], Villemain, Littér. franç. 18e siècle, 2e part. 3e leçon. Ces premiers critiques qui épurèrent notre langue, Patru, Vaugelas, Regnier-Desmarais, étaient des esprits justes et fins qu'on n'a pas surpassés dans la même œuvre, Villemain, Diction. de l'Acad. préface, p. XI.
  • 4Éliminer d'une compagnie, d'un corps, les membres qui sont jugés indignes d'en faire partie.
  • 5S'épurer, v. réfl. Devenir plus pur. L'or s'épure dans le feu, Bossuet, Hist. II, 9. Par lui tout s'embellit, et s'épure et s'anime, Delille, Paradis perdu, XI.

    Fig. Cette purification par laquelle l'âme s'épure peu à peu, Bossuet, Lett. Corn. 75. Ainsi parmi les souffrances et dans les approches de la mort, s'épure comme dans un feu l'âme chrétienne, Bossuet, le Tellier. Dont les âmes se sont épurées dans la solitude, Bossuet, I, Paq. 1. Plus il approche de la mort et plus il s'épure, Sévigné, 48. Les intérêts personnels qui s'épurent par leur réunion, se sont isolés entièrement, et la corruption est devenue générale, Raynal, Hist. phil. II, 26.

    Devenir plus châtié, en parlant de la langue. La Bruyère et Fénelon paraissent croire que la langue de leur temps s'était trop épurée, avait rejeté trop d'anciens mots expressifs, et l'Académie a été chargée de ce tort, Villemain, Dict. de l'Acad. préface, p. XX.

HISTORIQUE

XIIIe s. Cilz qui argent espure, Armuriers, guainiers, chapeliers, Dict des peintres. Ainsi fut luxure lavée D'omme, de femme, et espurée, St-Graal, v. 171.

XVIe s. Avoir le jugement affiné et le discours espuré par raisons de philosophie, Amyot, Aratus, 12.

ÉTYMOLOGIE

É- pour es- préfixe, et pur.