« cloche », définition dans le dictionnaire Littré

cloche

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

cloche

(klo-ch') s. f.
  • 1Instrument d'airain, en forme de coupe renversée, produisant des sons retentissants à l'aide d'un battant suspendu dans l'intérieur et mis en mouvement par le branle de la cloche, ou à l'aide d'un marteau placé à l'extérieur et mû directement ou par des ressorts. Sonner, tinter la cloche. Bénir une cloche. On sonnait la cloche à volées. Les cloches dans les airs de leurs voix argentines, Appelaient à grand bruit les chantres à matines, Boileau, Lutr. IV. Tandis que dans les airs mille cloches émues D'un funèbre concert font retentir les nues, Boileau, Sat. VI. Du dîner j'aime fort la cloche, Mais on la sonne en peu d'endroits, Béranger, Tournebr. On se sert du son des cloches pour dissiper les nuées, Bossuet, Conn. III, 3.

    Fig. Faire sonner la grosse cloche, faire intervenir dans une affaire celui qui a le plus de pouvoir.

    N'être pas sujet au coup de cloche, être maître de son temps. Les horloges étaient défendues dans tous ses États, et on eût réputé pour insensé un homme ou une femme qui se fussent asservis à un coup de cloche, Segrais, Princesse de Paphlagonie, t. II, p. 217.

    Fondre la cloche, prendre un parti, une résolution extrême ; en venir au fait, à l'exécution.

    Être étonné, être penaud comme un fondeur de cloche, être fort surpris de voir manquer une chose sur laquelle on comptait. Locution tirée de ce qu'il arrive parfois que l'opération de jeter la cloche en moule manque. Si Foy eût pu soutenir ce style, la scène changeait ; M. Pasquier, surpris comme un fondeur de cloches, eût remis ses lois dans sa poche, et moi, petit propriétaire, ici je taillerais ma vigne sans crainte, Courier, Lettre X, t. I, p. 220.

    Gentilshommes de la cloche, noblesse de la cloche, nom que l'on donnait aux descendants des maires et des échevins, maîtres, en leur qualité d'officiers municipaux, de la cloche de la commune, et anoblis en certaines villes par quelques charges municipales.

    Coup de cloche, un coup frappé contre la cloche et qui la fait sonner ; et fig. un avertissement. Il est vrai que j'ai été fort malade ; ces petits avertissements sont des coups de cloche que bientôt il n'y aura plus d'heure pour nous, Voltaire, Lett. Schomberg, 31 août 1769.

  • 2 Terme de cuisine. Ustensile concave qui sert à faire cuire des fruits.

    Couvercle en fer-blanc pour tenir les plats chauds.

    Vase de verre dont on couvre le fromage pour le servir sur la table et sous lequel il se fait.

  • 3Dans le jardinage, vase de verre dont on couvre les plantes délicates. Plantes venues sous cloche.

    Fig. Il était vrai que dès lors je pointais fort, mais c'était sous cloche, Saint-Simon, 217, 181.

  • 4Dans les laboratoires, manchon ou cylindre creux en verre, ouvert par une extrémité et fermé par l'autre.
  • 5Nom d'une machine qui a la figure d'une cloche, et dans laquelle un homme peut demeurer sous l'eau pendant assez longtemps. Cloche à plongeur ou cloche à plonger.
  • 6Vésicule de sérosité qui se forme sur la peau. Il a des cloches aux pieds.
  • 7 Terme de vétérinaire. Un des noms vulgaires de la cachexie aqueuse des bêtes à laine.
  • 8 Terme de botanique. Fleur en cloche, fleur monopétale ayant à peu près la forme d'une cloche.

    Double cloche, espèce de datura ; primevère doublée par la culture.

  • 9 Terme de marine. Cylindre d'un cabestan.

    Partie supérieure d'une manche à vent.

  • 10 Terme de mineur. Cavité qui se forme au toit d'une galerie.
  • 11 Terme de sondeur. Cloche à galets, tige creuse pour saisir une tige de sonde.
  • 12Ornement de monture de chandelier.

    Dans la poterie, bouillonnement.

PROVERBES

On ne peut sonner les cloches et aller à la procession, c'est-à-dire on ne peut faire deux choses à la fois.

C'est le son des cloches auxquelles on fait dire tout ce qu'on veut, c'est-à-dire ce sont des paroles qu'on interprétera comme on voudra, ou c'est un homme qui dit tantôt d'une façon et tantôt d'une autre. Locution fondée sur une ancienne superstition qui faisait regarder les cloches comme pouvant annoncer l'avenir ; le son des cloches n'ayant rien de déterminé, on y entendait toujours ce qu'on désirait.

Qui n'entend qu'une cloche, n'entend qu'un son, c'est-à-dire, en toute chose, il faut entendre le pour et le contre.

HISTORIQUE

XIIIe s. Les cloche de la ville sonnerent hautement, Berte, IX. De camelin, pour la pouriere [poussière], [ils] Avoient clokes [chapes] paringaus [semblables] Fourées de vermeus cendaus, Bl. et Jehan, v. 5436.

XIVe s. Quant li bourgois oïrent la choze deviser, La cloque de la ville ont fait tantost sonner, Baud. de Seb. X, 76.

XVe s. Adonc alla dire Lydore la royne : venez à moi, Lyriope belle fille ; si vous osteray la cloche que vous avez vestue, et si nous servirez, Perceforest, t. I, f° 122.

XVIe s. Tous utenciles de cuisine faits de metail de cloche, de cuivre, de leton, De Serres, 881. La chappe ou cloche d'un alambic, De Serres, 889. À conseil de fol, cloche de bois, Cotgrave Dont il feut plus estonné qu'ung fondeur de cloches, et s'escria…, Rabelais, Pant. II, 29. L'on a beau battre les cloches devant que les paroissiens soient venus, Leroux de Lincy, Prov. t. I, p. 7. Mieulx vault à cloche se lever que à la trompette, Leroux de Lincy, ib. Rapporter les cloches d'un tel lieu [avoir des ampoules aux pieds pour y être allé], Oudin, Curiosités fr. Si es dites vignes est trouvé gros bestail avec cloche fermée ou bouschée en temps de fruicts, de nuit, le seigneur du bestail court l'amende de vingt sols tournois, Coustum. génér. t. II, p. 681.

ÉTYMOLOGIE

Bourguig. cloiche ; picard et Berry, cloque ; provenç. cloca, clos ; piémontais, cioca ; bas-lat. clocca, cloca, dans des textes du VIIIe siècle ; anglo-sax. clucge, IXe siècle ; anc. h. allem. clocca, IXe siècle, ordinairement avec un g, glocca ; anc. scandinave, klucka ; allem. mod. Glocke ; kymri, cloch ; irl. clog ; bas-bret. cloc'h. Ce mot est d'origine obscure ; car on ne sait pas précisément s'il est allé des langues romanes dans les langues germaniques et celtiques, ou s'il a suivi le chemin inverse. Dans le premier cas, on le rattacherait à clocher, boiter, à cause du mouvement d'oscillation et, pour ainsi dire, de claudication de la cloche en branle. Dans le second cas on le rattacherait à l'ancien haut allemand klochôn, battre, frapper, bien plutôt qu'à l'anglo-saxon cloccan, anglais cluck, glousser, dont la signification ne peut convenir. Clocher est probable ; V. clocher la cloiche, à clocher ? Par assimilation une chape a été dite cloche ou cloque, en anglais cloak.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

CLOCHE. Ajoutez :
13 Fig. et populairement. Déménager à la cloche de bois, déménager sans tambour ni trompette. Les logeurs parisiens, sans cesse exposés aux déménagements furtifs, à la cloche de bois, comme on dit dans le peuple, ne se gênent pas pour…, le Figaro du 21 mars 1876.
14Anciennement, cloche de carrière, l'ouverture d'une carrière. Que le nommé Maimbré, carrier à Charonne, sera tenu, dans le jour, de faire mettre des barrières suffisantes autour de la cloche de sa carrière, et que les piliers qui sont à l'entrée seront renversés, Ordonn. de police, 15 avril 1782.
15Dans le commerce du houblon, la cloche désigne une certaine quantité. On a payé de 34 à 35 francs au dernier marché d'Alost ; 100 francs la balle à celui de Poperinghe ;… de 80 à 90 francs à Bischwiller, et les grosses cloches de 55 à 60 fr. Journ. offic. 30 sept. 1872, p. 6268, 3e col.
16Sifflet à cloche (voy. SIFFLET au Supplément).

REMARQUE

Plus étonné qu'un fondeur de cloches, locution qui trouve son explication dans cette phrase-ci : Le cavalier crotesque arrive en son logis à beau pied sans lance, plus penaut qu'un fondeur de cloches qui a manqué de métail, Oudin de Préfontaine, Les maistres d'hostels aux halles, le cavalier crotesque et l'apothicaire empoisonné, nouvelles comiques, Paris, 1670, p. 216 (cité par M. Defrémery, dans Rev. critique, 20 mars 1875, p. 189)

HISTORIQUE

XIVe s. Ajoutez : pour pourfiller la cloche [la chape d'une robe], Mandements de Charles V, 1376, Paris, 1874, p. 680.

ÉTYMOLOGIE

Ajoutez : Bas-lat. gloggae, dans Vita sancti Sturmi, an 779.