« délié », définition dans le dictionnaire Littré

délié

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

délié, ée [1]

(dé-li-é, ée) adj.
  • 1Menu, grêle, mince, fin. Trait de plume fort délié. Taille déliée. Les petits animaux sont doués d'organes très fins et de membres très déliés. Cette coiffe est un peu trop déliée ; j'en vais querir une plus épaisse, Molière, Pourc. III, 2. Il porte des chemises très déliées, La Bruyère, XIII.

    Un fil délié, un fil très menu ; et fig. une liaison difficile à comprendre. Je vais vous développer, par un ou deux exemples, le fil secret et délié qui les a conduits dans le choix délicat de leurs accessoires, Diderot, Essai sur la peint. ch. 3.

    Fig. La gloire est une passion qu'il ne connaît point, qui est trop déliée et trop spirituelle pour lui, Guez de Balzac, Disc. à la régente. Cette erreur est si déliée, que, pour peu qu'on s'en éloigne, on se trouve dans la vérité, Pascal, Prov. 3. Au milieu des flatteries, le consul désigné, Cérialis Anicius, dit un mot délié que Néron entendit sans doute et dont il ne s'offensa point, Diderot, Ess. s. Claude et Néron.

  • 2Délié se dit aussi, dans un langage technique, des humeurs des corps vivants. Le canal destiné à conduire dans l'estomac du fourmi-lion les sucs plus ou moins déliés dont il se nourrit, Bonnet, Observ. 39e, Insectes.
  • 3Habile par l'adresse et la finesse. Fagon, délié courtisan, et connaissant parfaitement le roi, Mme de Maintenon, la cour et le monde, Saint-Simon, 14, 158. Les Suisses n'étaient pas réputés les hommes les plus déliés, Voltaire, Mœurs, 128. Métaphysicien assez délié pour vouloir réconcilier la théologie avec la métaphysique, Voltaire, Louis XIV, 34. Le médecin Fonseca, Portugais, Juif établi à Constantinople, homme savant et délié, capable d'affaires et le seul philosophe peut-être de sa nation, Voltaire, Charles XII, 5.

    Discours, style délié, discours, style dont on ne démêle pas du premier coup l'artifice. Ce terme, donné par quelques littérateurs, n'est pas fort usité.

  • 4 S. m. Terme de calligraphie. La partie fine et déliée d'une lettre, par opposition aux pleins. Il ne fait pas un seul délié.

HISTORIQUE

XIe s. L'herbe du champ qui est verte et delgie, Ch. de Rol. CCXLVI.

XIIe s. Parmi le piz [il] fu larges, et delgiés par le bu, Sax. 28. Et desus un surpliz blanc et delié [sans doute deljé ; en tout cas, de deux syllabes] e bel, Th. le mart. 155. Sanglant [il] en ot son ermine delgié, Raoul de Cambrai, 68.

XIIIe s. Il ot chemise de cainsil Vestue, delie et sobtil, Lai du trot. Plus beaus chevoils ne plus dulgez, Plus ascemez ne mieuz treciez, Lai du désiré.

XVe s. La poudriere du delié sablon qui là estoit, commença à lever à l'empainte des chevaux, Froissart, III, IV, 83. Cil Janekin Clinton estoit delié et menu de membres, Froissart, II, II, 81.

XVIe s. Les ames basses et vulgaires sont souvent aussi reglées que les plus desliées, Montaigne, III, 277. À mesure que ces espines domestiques sont plus dures et desliées, elles nous mordent plus aigu, Montaigne, IV, 71. Se lever si soudain engendre le haut mal et nuit à ceux qui veulent avoir le teint delié, Yver, p. 573. Peau deliée, cheveux unis, Paré, Introd. 7.

ÉTYMOLOGIE

Lat. delicatus (voy. DÉLICAT), qui a donné dans l'ancien français deljé et délié ; dans le provençal delguat, dalgat ; dans l'ancien catalan delgat ; dans l'espagnol et le portugais delgado. Delicatus a donné deljé ou délié, suivant qu'on y supprimait l'i bref (delcatus, deljé), ou qu'on y supprimait le c (deliatus, delié, comme vocalis, voyelle). Les deux formations sont dans l'analogie de la langue.