« embrouiller », définition dans le dictionnaire Littré

embrouiller

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

embrouiller

(an-brou-llé, ll mouillées, et non an-brou-yé) v. a.
  • 1Mettre de la confusion par le brouillement. Embrouiller des brins de fil, des écheveaux.

    Terme de marine. Embrouiller les voiles, les ferler ou les joindre ensemble.

    Fig. Embrouiller une affaire. En embrouillant la question par des termes d'école, Pascal, Prov. 12. Nous traiterons plus à fond cette matière ; mais vouloir tout dire à la fois, c'est embrouiller un discours, Bossuet, États d'orais. II, 26. Ses disciples ont fort embrouillé ses idées, Bossuet, Lett. 177. Il dissipait par les lumières de son esprit ce que la calomnie avait tâché d'embrouiller, Fléchier, t. II, p. 18. Il fallait que sa rage à l'univers funeste Allât encor de lois embrouiller le Digeste, Boileau, Sat. VIII.

    Embrouiller l'esprit, la cervelle, y mettre la confusion, l'incertitude. Selon la saison Qui règne en notre humeur, les brouillards nous embrouillent, Régnier, Sat. IX. Des marauds dont le vin embrouillait la cervelle Vidaient à coups de poing une vieille querelle, Corneille, Suite du Ment. IV, 6. Choisis une heure propre à rentrer en toi-même, à penser aux bienfaits de la bonté suprême, Sans t'embrouiller l'esprit de rien de curieux, Corneille, Imit. I, 20. Il y cherche [dans les textes] des difficultés et non pas des solutions, de quoi embrouiller les esprits, et non de quoi les instruire, Bossuet, Var. 1er avert. § 27.

    Embrouiller quelqu'un de quelque chose, l'en troubler. Voici mon vieux rêveur ; fuyons de sa présence, Qu'il ne m'embrouille encor de quelque confidence, Corneille, la Suiv. V, 4.

  • 2S'embrouiller, v. réfléchi. Devenir embrouillé. Ces écheveaux se sont embrouillés.

    Fig. Perdre le fil de ses idées, et aussi s'embarrasser l'esprit. Répondras-tu pour lui [le prochain] de son peu de vertu ? Ou, si c'est pour toi seul que tu dois rendre compte, Quels que soient ses défauts, de quoi t'embrouilles-tu ? Corneille, Imit. III, 24. L'homme s'embrouille souvent à force de raisonner, Bossuet, Hist. II, 11.

    Terme de marine. Se charger de vapeurs, de nuages, en parlant du temps.

HISTORIQUE

XVIe s. Vous avez tellement embrouyllé cest escheveau qu'on ne le peut desassembler, Palsgrave, p. 494. Il embrouilla tellement Aristides, qu'à la fin il le feit chasser et bannir de la ville l'Athenes, Amyot, Thém. 11. Il cherchoit matiere de nouvelles guerres, esperant que, s'il pouvoit embrouiller et irriter ces roys de l'Asie, mesmement Mithridates, il…, Amyot, Marius, 56. Sertorius, qui ne vouloit point s'embrouiller d'affaires, fut contrainct, pour la sureté de sa propre personne, de prendre les armes…, Amyot, Eum. et Sert. 3. Il y sejourna jusqu'à ce que les affaires les plus embrouillez et plus roublez y fussent un peu appaisez, Amyot, Pomp. 30. Cette infinie et perpetuelle discordance d'opinions et de raisons qui accompagne et embrouille le vain bastiment de l'humaine science, Montaigne, II, 306. Elle [notre âme] s'embrouille et se trouble de cholere, despit, tristesse, joye, faisant des chasteaux en Espagne, Charron, Sagesse, I, 38.

ÉTYMOLOGIE

En 1, et brouiller ; espagn. embrollar ; ital. imbrogliare.