« enflé », définition dans le dictionnaire Littré

enflé

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

enflé, ée

(an-flé, flée) part. passé.
  • 1Qui est devenu plus volumineux qu'il n'était. Il a le corps tout enflé. Son pied est enflé d'une entorse. J'ai la tête plus grosse que le poing, et si n'est-elle pas enflée, Molière, Bourg. gent. III, 5.

    Être enflé, être hydropique.

    Par extension. Une puissance qui est d'accident, qui ne peut pas durer, qui n'est pas naturelle, et qui est plutôt enflée qu'agrandie, Montesquieu, Rom. 16.

    Substantivement. Un gros homme. C'est ce gros enflé de conseiller, Beaumarchais, Mar. de Fig. III, 16.

    Dans les parades et dans un langage très trivial. Hé l'enflé ! en appelant un gros homme dont on ne sait pas le nom.

  • 2Qui a été grossi par insufflation. Un ballon enflé.

    Être enflé comme un ballon, être très enflé ; et fig. avoir un orgueil excessif.

  • 3À qui la confiance, le courage, la présomption ont crû. Et ces grands cœurs enflés du bruit de leurs combats, Corneille, Nic. II, 1. Enflé de sa victoire et des ressentiments Qu'une perte pareille imprime aux vrais amants, Corneille, Pomp. II, 4. Cet orgueilleux esprit enflé de ses succès, Corneille, Nic. II, 4. Et quand je puis venir, enflé d'une nouvelle, Donner à son repos une atteinte mortelle, C'est lors que plus il m'aime, Molière, D. Garcie, II, 1. Il le voyait enflé d'orgueil par sa qualité de…, Pascal, Prov. 11. Ce vainqueur, enflé de ses titres, tombera lui-même à son tour entre les mains de la mort, Bossuet, Duch. d'Orl. Enflés d'une si belle origine, ils se croyaient saints par nature et non par grâce, Bossuet, Hist. II, 5. Cependant, à les voir enflés de tant d'audace, Se promettre en leur nom les faveurs du Parnasse…, Boileau, Disc. au roi. Mais croyez-vous qu'un prince enflé de tant d'audace…, Racine, Alex. I, 2. Il est enflé de sa victoire, Fénelon, Tél. XII.
  • 4Grossi. Un compte enflé. Un son enflé.

    Par extension. On se persuade… que nos faibles efforts enflés de nos titres et de nos dignités ont le même poids dans la balance du souverain juge que les justices les plus abondantes, Massillon, Panég. St Louis.

  • 5Qui a de l'emphase. Le défaut du style enflé, c'est de vouloir aller au delà du grand, Boileau, Longin, Sublime, chap. 2. Il [Claudien] a trop de saillies de jeunesse, et est trop enflé, Rollin, Hist. anc. liv. XXV, ch. I, art. 2, § 3. Quand le style des lois est enflé, on ne les regarde que comme un ouvrage d'ostentation, Montesquieu, Espr. XXIX, 16.

    Substantivement. Je hais également le bouffon et l'enflé, Pascal, dans COUSIN.

SYNONYME

1° ENFLÉ, GONFLÉ. Enfler c'est in-flare ; gonfler, c'est con-flare ; ces deux mots ont donc le même radical, flare, souffler, avec un préfixe différent. Au propre, la nuance n'est pas saisissable ; on enfle ou on gonfle un ballon ; le pied foulé enfla ou se gonfla. Au figuré, on dit enflé d'orgueil ou gonflé d'orgueil, sans différence notable. Mais, quand on dit enflé par ce succès, ou gonflé par ce succès, une différence devient visible : enflé par ce succès, signifie que le courage, la confiance ont crû ; gonflé par ce succès signifie que ce qui a crû, c'est l'orgueil, la vanité.

2° ENFLÉ, BOURSOUFLÉ, en parlant du style. Le style enflé est celui qui, comme dit Longin, va au delà du grand ; le style boursouflé enchérit encore sur l'enflure, et manque d'une certaine dignité que le style enflé ne perd pas.