« fève », définition dans le dictionnaire Littré

fève

Définition dans d'autres dictionnaires :

Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

fève

(fè-v') s. f.
  • 1Plante de la famille des légumineuses qui produit des semences alimentaires. Rogner des fèves, couper le sommet de la plante pour faire nouer et grossir les graines. D'autres assurent qu'il [Pythagore poursuivi par les Crotoniates] rencontra dans son chemin un champ de fèves qu'il fallait traverser, que jamais Pythagore ne put s'y résoudre : Il vaut mieux mourir ici, dit-il, que de faire périr toutes ces pauvres fèves, Fénelon, Pythagore.
  • 2Les semences de cette plante. De grosses fèves. Écosser des fèves.

    La fève de marais, la grosse fève, celle qui se sert sur les tables, par opposition à la féverole qui ne se donne guère qu'aux bestiaux (toutes deux étant des variétés de la même espèce botanique et portant le nom de vicia faba, L.).

    La robe d'une fève, l'enveloppe que l'on ôte quand on veut la manger. Des fèves dérobées, des fèves dépouillées de cette enveloppe.

    Gâteau de la fève, gâteau dans lequel on met une fève le jour des Rois.

    Roi de la fève, celui à qui est échue la fève du gâteau qu'on partage à la fête des Rois. Grâce à la fève, je suis roi ; Nous le voulons, versez à boire ! Béranger, Couronne.

    On dit aussi : la royauté de la fève.

    Fig. Trouver la fève au gâteau, faire une bonne trouvaille, ou trouver le nœud d'une affaire, d'une question. Pensant avoir trouvé la fève du gâteau, Régnier, Sat. VII.

    Donner un pois pour une fève, donner quelque chose, afin d'obtenir davantage.

    Rendre fève pour pois, ou bien, s'il me donne des pois, je lui rendrai des fèves, c'est-à-dire rendre la pareille à qui nous a fait du mal. À la pauvrette il ne fit nulle grâce Du talion, rendant à son époux Fève pour pois et pain blanc pour fouace, La Fontaine, Faiseur.

  • 3Les Grecs se servaient de fèves pour les suffrages du peuple. La fève blanche signifiait absolution ; la noire, condamnation.
  • 4 Par extension, semences de certaines autres plantes. Fève de haricot, le haricot (en plusieurs provinces, Normandie, Lorraine, etc. la fève désigne le haricot).

    Fève à cochon, la jusquiame.

    Fève du Bengale, nom sous lequel on a désigné le myrobolan citrin, qui est le fruit du terminalier citrin (Indes orientales) de Roxburgh.

    Fève de Calabar, légumineuse du Calabar, pays d'Afrique, laquelle est un poison, et est aussi l'antidote de la beiladone.

    Fève d'Égypte nom du fruit du lotos sacré, nelumbium speciosum, Willdenow, nelumbo nucifera, Gaertner, nymphaea nelumbo, Linné, plante qui a disparu du Nil, mais se retrouve dans l'Inde et aux Moluques.

    Fève de Saint Ignace, semence de l'ignatia amara, Linné fils, plante sarmenteuse des Philippines ; elle contient de la strychnine.

    Fève tonka, semence du coumarouna odorata, plante de la Guyane, d'une odeur forte et assez agréable, dont on se sert souvent pour aromatiser le tabac.

    Tabac à la fève, tabac ainsi aromatisé.

  • 5Dans le langage vulgaire, nom donné à la chrysalide des insectes. Nous [vers à soie] nous transformons en fève, mais en fève qui sent, qui se meut, Fénelon, t. XIX, p. 73. Nous devenons comme elle [la chrysalide] pendant neuf mois une vraie chrysalide que les paysans appellent fève, Voltaire, l'Homme aux 40 écus, Mariage.
  • 6 Terme de vétérinaire. Fève ou lampas, dénomination vulgaire donnée au gonflement du palais du cheval.

    Germe de fève, marque noire qui vient au creux des coins chez le cheval, vers l'âge de cinq ans, et qui, durant jusqu'à sept ou huit ans, sert à faire connaître son âge.

    PROVERBE

    Les fèves sont en fleur, les fous en vigueur, se dit pour reprocher à quelqu'un une folie ou une faiblesse. On dit dans le même sens : Il a passé par un champ de fèves en fleurs. Ces locutions viennent de ce qu'on attribuait à la fève la propriété d'hébéter l'esprit.

HISTORIQUE

XIIIe s. Et furent cil dedens si à poi de viandes, que on n'i avoit mais de douze feves de livrison le jour, Chr. de Rains, p. 139. Glorieux flum, glorieuse eve, Qui lavas ce qu'Adam et Eve Ont par leur pechié ordoié [souillé], Tu trovas au gastel la feve, J. de Meung, Tr. 228.

XIVe s. Au sixieme an [du cheval] viennent les crochès dont le fons est creux, et est la teve ou [au] fons du creux ; au septieme an les bors du creux des crochés si usent, et n'y a mais point de creux ne de feve, et devient tout plat et tout aouni, et de là en avant on n'y congnoist aage, Ménagier, II, 3. L'on cognoist les feves des marais à ce qu'elles sont plates, et les feves des champs rondes, ib. II, 5.

XVe s. Quel roy ? de la feve ou des pois ? Mart. de St Denis.

XVIe s. Le monde donques en sagissant [en devenant sage] plus ne craindra la fleur des febves en la primevere, Rabelais, Pant. Ve livre. Feves flories, temps de folies, Leroux de Lincy, Prov. t. I, p. 72. Dites febve, c'est pour vous [se disait quand on donne un grand coup à quelqu'un, par similitude du soir des Rois où l'on dit fève en partageant le gâteau], Cotgrave Vous avez mangé plus de feves que d'amandes pellées, Palsgrave, p. 457.

ÉTYMOLOGIE

Normand, feuve ; provenç. fava ; espagn. haba ; portug. et ital. fava ; du latin faba.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

FÈVE.
4Ajoutez :

On donne aussi le nom de fève d'Égyte à un légume dit escalope (voy. ce mot au Supplément), qui depuis quelque temps se vend à Paris.