« hypocrite », définition dans le dictionnaire Littré

hypocrite

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

hypocrite

(i-po-kri-t') adj.
  • 1Qui a de l'hypocrisie, qui affecte des apparences de piété, de probité, de douceur, etc. Quoi ! la feinte douceur de cette âme hypocrite Vous fera démentir…, Molière, Tart. III, 6. Ô ciel ! qu'entends-je ici ! il ne vous manquait plus que d'être hypocrite pour vous achever de tout point, et voilà le comble des abominations, Molière, D. Juan, V, 2.

    Se dit aussi des choses. Ce doucet… sous son minois hypocrite Contre toute ta parenté D'un malin vouloir est porté, La Fontaine, Fabl. VI, 5. De ces femmes pourtant l'hypocrite noirceur Au moins pour un mari garde quelque douceur, Boileau, Sat. X. Assez longtemps l'étiquette des cours a proclamé des deuils hypocrites, Mirabeau, Collection, t. III, p. 394. D'une bouche hypocrite il regrettait son fils, Chénier M. J. Tibère, IV, 3.

  • 2 Substantivement. Un hypocrite, une hypocrite, un homme, une femme hypocrite. Lorsque vous priez, ne ressemblez pas aux hypocrites, qui affectent de prier en se tenant debout dans les synagogues et aux coins des rues pour être vus des hommes, Sacy, Bible, Évang. St Math. VI, 5. Notre ermite Les renvoya, fit le bon hypocrite, La Fontaine, Herm. La profession d'hypocrite a de merveilleux avantages : c'est un art de qui l'imposture est toujours respectée, et, quoiqu'on la découvre, on n'a rien à dire contre elle, Molière, D. Juan, V, 2. Les hypocrites n'ont point entendu raillerie ; ils se sont effarouchés d'abord, et ont trouvé étrange que j'eusse la hardiesse de jouer leurs grimaces, Molière, Préf. du Tart. Il y a des hypocrites qui ont dessein de tromper ; il y a des hypocrites qui trompent et n'en ont pas précisément le dessein, mais qui agissent par bienséance et ne veulent point donner de scandale ; les premiers sont plus dangereux pour les autres, et les seconds pour eux-mêmes, Bossuet, Pensées détachées, 4. Un homme [Cromwell] s'est rencontré d'une profondeur d'esprit incroyable, hypocrite raffiné autant qu'habile politique, Bossuet, Reine d'Anglet. J'appelle hypocrite quiconque, sous de spécieuses apparences, a le secret de cacher les désordres d'une vie criminelle, Bourdaloue, Jugem. dern. 2e Av. p. 358. Un dangereux hypocrite, s'il écrit ce qu'il ne pense pas, Diderot, Claude et Nér. II, 4.

    Par antiphrase. Hypocrite de vice, celui qui feint d'avoir un vice qu'il n'a pas. On ne voyait jadis que des hypocrites de vertu ; on trouve aujourd'hui des hypocrites de vice, Duclos, Consid. mœurs, ch. 5.

HISTORIQUE

XIIIe s. Une ymage ot emprès escrite Qui sembloit bien estre ypocrite ; Papelardie est apelée, la Rose, 408. Li papelart et li faus ypocrite, qui monstrent ce que il ne sont, por decevoir Dieu et le monde, Latini, Trésor, p. 423.

XVe s. Combien que le faulx hypocrite que les cardinaux de la partie de là eslurent dernierement, se monstra bonne et sainte personne, Bouciq. III, 5.

XVIe s. Nictatio, clignement d'œil, œil d'hypocrite, Paré, XV, 5. La nuict est plus propre pour les hypocrites de guerre que le jour qui de son beau soleil esclaire nos vices et vertus, Brantôme, Marignan.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. ypocrita ; espagn. et ital. ipocrita ; du lat. hypocrita, qui vient du grec ὑποϰριτὴς, comédien, de ὑποϰρίνεσθαι, jouer un personnage, répondre, de ὑπὸ, sous, et ϰρίνειν, juger. Marot a dit hypocritique.