« ivresse », définition dans le dictionnaire Littré

ivresse

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

ivresse

(i-vrè-s') s. f.
  • 1Ensemble des phénomènes que détermine un excès de boissons fermentées, depuis le trouble commençant de la raison jusqu'à l'état de délire, de sommeil involontaire et même de mort. Les gardes, assoupis dans leur infâme ivresse, Laissaient un accès libre à ma main vengeresse, Voltaire, Triumv. IV, 6. À travers son ivresse on voit qu'il ne manque ni d'esprit, ni d'une certaine éducation, Beaumarchais, Barb. de Sév. II, 15. Le comte : Fi donc ! tu as l'ivresse du peuple. Figaro : C'est la bonne ; c'est celle du plaisir, Beaumarchais, ib. I, 4.

    Fig. L'on prend [chez le guerrier] pour grandeur d'âme ou une férocité de naturel qui le rend intrépide, ou une ivresse de raison qui lui cache le danger…, Massillon, Panégyr. St Louis.

  • 2 Fig. Trouble produit dans l'âme par une passion, par une possession. De l'absolu pouvoir vous ignorez l'ivresse, Racine, Athal. IV, 3. Le libertinage des mœurs ne se soutient que par une ivresse qui ne dure pas, Massillon, Carême, Vérit. culte. Le réveil suit de près vos trompeuses ivresses, Et toutes vos richesses S'écoulent de vos mains, Rousseau J.-B. Odes, I, 15. Si le crime insolent dans son heureuse ivresse Écrasait à loisir l'innocente faiblesse…, Voltaire, Oreste I 2. Mon bonheur est détruit, l'ivresse est dissipée, Voltaire, ib. I, 4. Je l'ai vu des plaisirs chercher la folle ivresse, Voltaire, Triumv. I, 1. L'enthousiasme et l'ivresse étaient au dernier degré, D'Alembert, Lett. au roi de Prusse, 1er juill. 1778. De cette noble ardeur que j'aime à voir l'ivresse ! Ducis, Roméo, I, 3. Les splendeurs de la cour et sa bruyante ivresse, Delavigne, Vêp. sicil. II, 1.

    On dit de même : l'ivresse des sens. Je vois que de ses sens l'impétueuse ivresse L'abandonne aux excès d'une ardente jeunesse, Voltaire, Adél. du Guesclin. I, 1.

  • 3L'enthousiasme poétique. Dans une poétique ivresse. Je les fis toutes deux [l'Iliade et l'Odyssée] plein d'une douce ivresse : Je chantais, Homère écrivait, Boileau, Poés. div. XX.

HISTORIQUE

XIIe s. Fust [soit] par ivresse, fust [soit] par ire, Assez tost oï Richard dire Que vilains comune faseient, Wace, Rou, 5975-6074.

XIIIe s. Et bien sacent [sachent] tuit que nus [nul] vilain cas de crieme n'est escusés par yvreche, Beaumanoir, VI, 25.

XIVe s. Nul secret n'est là où regne yvresse, Ménagier, I, 9.

ÉTYMOLOGIE

Ivre ; provenç. yvreza, ybrieza ; ital. ebbrezza. Le latin ebrietatem aurait donné ivreté.