« manie », définition dans le dictionnaire Littré

manie

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

manie [1]

(ma-nie) s. f.
  • 1Égarement d'esprit. Depuis que parmi nous leurs brutales manies [des sectaires] Ne causent que des pleurs, Malherbe, II, 12. Maudite ambition, détestable manie, Corneille, Cid, II, 3. Ainsi sans m'aveugler d'une vaine manie, Boileau, Disc. au roi. Quelle étrange manie Vous peut faire envier le sort d'Iphigénie ? Racine, Iphig. IV, 1. Tel aux premiers accès d'une sainte manie Mon esprit alarme redoute du génie L'assaut victorieux, Rousseau J.-B. Odes, III, 1. Délires insensés ! fantômes monstrueux, Et d'un cerveau malsain rêves tumultueux ! Ces transports déréglés, vagabonde manie, Sont l'accès de la fièvre, et non pas du génie, Chénier, l'Invention.
  • 2Folie dans laquelle l'imagination est constamment frappée d'une idée particulière. Sa manie est de se croire de verre, de se croire le grand Turc.

    Ce sens est une acception vulgaire, et non l'acception médicale du mot manie.

  • 3Travers d'esprit. De ces combats, dont la manie Est l'éternelle ignominie De Jarnac et de Moncontour ? Malherbe, III, 3. Certes les chrétiens ont d'étranges manies, Corneille, Poly. IV, 5. Je flattais ta manie, afin de t'arracher Du honteux précipice où tu vas trébucher, Corneille, ib. V, 2. Élans de l'âme et du génie, Du calcul la froide manie Chez nos pères vous remplaça, Lamartine, Méd. I, 10.

    Habitude bizarre, contraire à la raison. Il a la manie de se faire toujours peindre en habit romain. Elle [une abbesse] était sœur de la Rochefoucauld si connu par son esprit, et elle en avait beaucoup aussi ; mais l'esprit n'empêche pas d'avoir des manies, il les rend seulement plus remarquables, Staal, Mém. t. I, p. 5.

    Goût porté jusqu'à l'excès. Sa manie pour les tulipes, pour les coquilles l'a ruiné. J'ai cette manie de vouloir donner généralement sur tout ce qu'il y a de plus beau, Molière, Préc. 10. L'amour de vos aïeux passe en vous pour manie, Boileau, Sat. V.

  • 4 Terme de médecine. Aliénation caractérisée par un délire général avec agitation, irascibilité, penchant à la fureur.

HISTORIQUE

XVIe s. La façon de se vestir presente luy [à notre peuple] faict incontinent condamner l'ancienne, d'une resolution si grande et d'un consentement si universel, que vous diriez que c'est une espece de manie qui lui tourneboule ainsi l'entendement, Montaigne, I, 369.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. espagn. ital. mania ; du lat. mania ; grec μανία, folie. On a rattaché mănia à mānia (voy. MANIE 2), la mère des larves, des mânes, qui trouble l'esprit ; mais c'est une erreur ; μανία n'a rien de commun avec mānia, et tient au sanscrit manyu, colère, fureur ; comparez manas, μένος, mens, et voy. MENTAL.