« muer », définition dans le dictionnaire Littré

muer

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

muer

(mu-é), je muais, nous muions, vous muiez ; que je mue, que nous muions, que vous muiez.
  • 1 V. a. Changer. Qui de Méduse eût vu jadis la tête Était en roc mué soudainement, Voltaire, dans le Dict. de BESCHERELLE.

    Usité en ce sens dans le style marotique seulement.

  • 2 Terme de vénerie. Muer sa tête, se dit d'un cerf qui quitte son bois.
  • 3 V. n. Être dans le temps de la mue. Un paon muait ; un geai prit son plumage, Puis après se l'accommoda, La Fontaine, Fabl. IV, 9. Voyant muer quelquefois sa peau [du serpent], ils [les hommes] durent croire qu'il rajeunissait, Voltaire, Mœurs, Us. et sent. Communément, c'est vers la fin de l'été et en automne que les oiseaux muent, Buffon, Ois. t. I, p. 61. Il y a des chevaux qui muent de corne, cela arrive surtout à ceux qui ont été élevés dans des pays humides et marécageux comme en Hollande, Buffon, Quadrup. t. I, p. 123.

    Muer se conjugue avec l'auxiliaire avoir quand on veut exprimer l'acte : l'oiseau a mué hier ; avec l'auxiliaire être quand on veut exprimer l'état : l'oiseau est mué depuis quelques jours.

  • 4Prendre un certain timbre rauque, en parlant de la voix des jeunes gens qui atteignent la puberté. Sa voix mue, ou plutôt il la perd, Rousseau, Ém. IV.
  • 5 Terme d'ancienne musique. Exécuter une muance ; changer de ton, et, par suite, de manière de solfier.

HISTORIQUE

XIe s. Set cenz chameaux et mil hosturs [autours] muez, Ch. de R. III. Li reis Marsile ad la color muée, ib. XXXIII.

XIIe s. Et de cors et de membres [elle] par fu si avenanz, Qu'onques Dex ne fist homme, tant soit vielz ne crolanz, Se l'osast esgarder, ne li muast talans [désir], Sax. V.

XIIIe s. Car ele n'ot nouvele qui en mal ne se mue, Berte, LXXX. Note que fort chose est mouer consentement, Liv. de just. 184. [Il] plus avoit d'orguel en lui que n'ot Nobugodosor, qui par son orguel fu mués VII ans en bieste, Ch. de Rains, p. 98. Li tens qui tote chose mue, Qui tout fait croistre et tout norist, Et qui tout use et tout porrist, la Rose, 380.

XVe s. Quand le roi Philippe vit les Anglois, le sang lui mua, car il les heoit, Froissart, I, I, 287. Les dieux et les deesses à leur plaisance muoient les hommes en bestes et en oiseaux, Froissart, II, III, 14. Et ceulx là sont incontinent muez d'amour en hayne et de hayne en amour, Commines, I, 16.

XVIe s. La voix se mue et grossist si tost que le garçon se rue au jeu d'amour, Paré, VI, 18. La maladie des magneaux [vers à soie] se recognoist à la teste, qui s'enfle lorsqu'ils veulent muer, De Serres, 481. Cueur feminin se mue, et prend son cours, Comme la lune estant en son decours, Marot, J. V, 250. Je fourvoye, je ruse muant de lieu, d'occupation, Montaigne, III, 299. Quand ils [les cerfs] cherchent à se donner du bon temps pour se defaire du mauvais qu'ils ont eu durant l'hiver, la premiere chose qu'ils font, c'est de muer leur teste, Charles IX, Chasse royale, ch. IV. Muons de chance, Rabelais, III, 26.

ÉTYMOLOGIE

Wallon, mouwer ; namur. muwer ; prov. et esp. mudar ; ital. mutare ; du lat. mutare, changer. Mutare est moitare, voy. le grec μοῖτος, mutuel, et est de même radical que mutuus (voy. MUTUEL).