« outrance », définition dans le dictionnaire Littré

outrance

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

outrance

(ou-tran-s') s. f.
  • Il n'est usité que dans ces locutions adverbiales : à outrance, à toute outrance, jusqu'à l'excès. Une comédie qui décriât les hypocrites, et mît en vue, comme il faut, toutes les grimaces étudiées de ces gens de bien à outrance, toutes les friponneries couvertes de ces faux-monnoyeurs en dévotion, Molière, Tart. 1er placet au roi. N'a-t-il pas ces adulateurs à outrance, ces flatteurs insipides qui n'assaisonnent d'aucun sel les louanges qu'ils donnent ? Molière, l'Impromptu, 3. [Charles Ier] Poursuivi à toute outrance par l'implacable malignité de la fortune, Bossuet, Reine d'Anglet. Jennings était fière à toute outrance, Hamilton, Gramm. 10. M. Hartsoëker devint cartésien à outrance, mais il s'en corrigea dans la suite, Fontenelle, Hartsoëker.

    Combat à outrance, combat qui ne devait se terminer que par la mort ou la défaite d'un des deux combattants. Il m'a dit… Qu'il se devait contre Votre Excellence, Battre tantôt, et battre à toute outrance, La Fontaine, Papef. On a vu que le duc Jean de Bourbonnais fit déclarer qu'il irait en Angleterre avec seize chevaliers combattre à outrance pour éviter l'oisiveté et pour mériter la grâce de la très belle dont il est le serviteur, Voltaire, Mœurs, 121.

    Fig. Le parlement se bat à outrance avec les jésuites, D'Alembert, Lett. à Voltaire, 8 sept. 1761.

    À outrance, à toute outrance, aussi loin qu'une chose peut aller. S'il faut pousser à toute outrance ce passage de saint Paul, Bossuet, Var. 14.

REMARQUE

Il serait à désirer que ce mot, qui est d'une grande force, ne fut plus borné à une locution adverbiale, et rentrât dans l'emploi de tout substantif. Pourquoi ne dirait-on pas l'outrance de son orgueil, de ses prétentions, comme a fait Ronsard ?

HISTORIQUE

XIIIe s. Il virent bien que il ne porroient à lor vaissiax repairier, ançois les covenoit combattre jusqu'à outrance de mort, Merlin, f° 51, verso.

XVe s. Nuls chevaliers de France ne la [ville de Compostelle] vouloient prendre à leur peril, pour la tenir ni garder honorablement jusques à outrance, car elle n'est pas trop forte, Froissart, II, III, 34. On se plaint de vous à outrance, Orléans, Chans. 33.

XVIe s. L'impudente esperance De ton sot appareil [révolte des huguenots] Perira par l'outrance D'un grand roy sans pareil, Ronsard, 403. Ains entendoit leur faire guerre mortelle à toute oultrance, Amyot, Crassus, 35.

ÉTYMOLOGIE

Outrant ; bourg. ôtrance ; provenç. ultranza ; ital. oltranza.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

OUTRANCE. - REM. Ajoutez : Voici un emploi d'outrance hors de la locution à outrance. Les défauts par saillie et comme qui dirait les outrances de Corneille, Sainte-Beuve, Port-Royal, t. I, p. 241, 3e éd. Ces essais de rendre la liberté à un mot confiné méritent d'être encouragés.