« rôtir », définition dans le dictionnaire Littré

rôtir

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

rôtir

(rô-tir ; quelques uns prononcent vicieusement ro-tir) v. a.
  • 1Faire cuire de la viande à la broche. Rôtir de la viande.

    Fig. Il n'est bon ni à rôtir ni à bouillir, il n'est propre à rien. Voiture lui dirait [à Mlle Clairon, dans le rôle d'Olympie] qu'on ne lui reprochera pas de n'être bonne ni à rôtir ni à bouillir, D'Alembert, Lett. à Voltaire, 6 avril 1764.

    Un feu à rôtir un bœuf, un très grand feu. Ce feu pris à matière sèche… Devint grand à rôtir un bœuf, Scarron, Virg. I.

    Fig. Rôtir le balai, voy. BALAI.

  • 2Rôtir au four, faire cuire de la viande dans le four.
  • 3Griller, faire cuire sur le gril ou autrement. Rôtir du poisson sur les charbons.

    Il se dit aussi de certaines choses qu'on fait cuire dans la braise et dans les cendres. Rôtir des marrons.

  • 4 Par exagération, chauffer trop fortement. On n'a chaud en hiver que dans les pays froids ; vos petites cheminées de Paris, où l'on se rôtit les jambes pour avoir le dos gelé, ne valent pas nos poêles [de Berlin], Voltaire, Lett. Mme Denis, 18 janv. 1752.
  • 5Causer un effet comparé à la brûlure, en parlant de la chaleur du soleil. Après une gelée, il arrive souvent que le soleil rôtit les jeunes bourgeons.
  • 6Il se dit, avec un sens d'ironie, du supplice du feu. Si vous pensez que les âmes de ces grands hommes [de l'antiquité] soient éternellement rôties par les diables, Voltaire, Dial. XXVI, 1. [Un sauf-conduit] sauvegarde rarement efficace, depuis que l'empereur Sigismond, ayant protégé Jean Huss, le laissa rôtir par le pieux concile de Constance, Voltaire, Quest. mir. XI.
  • 7 V. n. Être cuit à la broche, ou sur le gril, ou dans la braise. Le gigot rôtit. Nos deux maîtres fripons Regardaient rôtir des marrons, La Fontaine, Fabl. IX, 17. Il ne leur manque que la parole [aux bêtes]… quel est le barbare qui pourrait faire rôtir un agneau, si cet agneau nous conjurait par un discours attendrissant de n'être point à la fois assassin et anthropophage ? Voltaire, Dict. phil. Viande.
  • 8Recevoir une trop vive chaleur. Ce sont des sables brûlants, tout y rôtit. Que faites-vous là au soleil à rôtir ?
  • 9Se rôtir, v. réfl. Être rôti. Prenez garde que votre poulet ne se rôtisse trop.

    Familièrement. Se chauffer de trop près. Vous vous rôtissez.

    Éprouver l'action d'un soleil ardent. Il se rôtit au soleil.

HISTORIQUE

XIIIe s. Auquans en vit [il en vit quelques uns] mis en espeiz [épieux], E rostis od soufre e od peiz [poix] ; Li diable les rostisseient, Marie de France, Purgatoire, V. 1098. Que nulz ne cuise ou rostisse oues [oies], ou vel, agniaux, chevraux ou couchons, se il ne sont bons, loyaux et souffisans pour manger et pour vendre, Liv. des mét. 176. … Tybert le chat qui se gisoit Sor une roche, et rostissoit Sa pance encontre le soleil, Ren. 20554.

XIVe s. Un varlet de chevaux vint en la cuisine dudit hostel, et là se despoilla pour soy toster ou rostir, Du Cange, rostum. Icellui Perrin dit audit Gillet par maniere de moquerie : un tel rosti comme tu es, est bien taillé de saillir ces deux fosses, Du Cange, ib. Après [à la table d'Amour] a on un mès livré Et tramis à plusieurs personnes ; Il fu de rosties ramprones [reproches, querelles] à la sausse de jalousie, Jean de Condé, t. III, p. 16.

XVIe s. Mutius estendit sa main droicte sur le feu, en regardant franchement Porsenna entre deux yeulx, pendant que la chair de sa main se rostissoit, Amyot, Publ. 33. Il n'y a que telles gens qui ayent les bonnes graces des grands ; si c'eust esté quelque homme qui eust eu de la doctrine, on l'eust envoyé rostir le balay, Moyen de parvenir, p. 114, dans LACURNE. Ils [les sauvages de l'Amérique] le rostissent [un prisonnier de guerre], et en mangent en commun, Montaigne, I, 239.

ÉTYMOLOGIE

Berry, roûtir ; wallon, rosti ; provenç. raustir ; catal. et anc. espagn. rostir ; de l'anc. haut-all. rostjan, mot d'ailleurs commun au celtique : bas-bret. rosta ; kimry, rhostiaw ; gaélique, roist.