« séjourner », définition dans le dictionnaire Littré

séjourner

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

séjourner

(sé-jour-né) v. n.
  • 1Demeurer quelque temps dans un lieu. Il doit séjourner à Paris cinq ou six mois.

    Fig. Volontiers où soupçon séjourne…, La Fontaine, Coupe.

    Se reposer en un lieu durant un voyage. Ce régiment, en allant à sa garnison, ne séjournera qu'en deux endroits.

  • 2Retarder, faire un délai. Et s'il séjourne plus, penses-tu que je vive ? Tristan, Panth. II, 2.
  • 3 Fig. S'arrêter sur quelque objet pour y songer. Une absence continuelle, avec la tendresse que j'ai pour vous, ne compose pas une paix bien profonde à un cœur aussi dénué de philosophie que le mien ; il faut passer sur ces endroits sans y séjourner, Sévigné, à Mme de Grignan, 7 août 1675.
  • 4 Fig. Il se dit d'un liquide qui reste plus ou moins longtemps dans un endroit. L'eau du Nil, après avoir séjourné sur les terres, se retire et rentre dans son lit.

    Il se conjugue avec l'auxiliaire avoir.

HISTORIQUE

XIIe s. E alerent s'en andui, e surjurnerenten Naioth, Rois, p. 75. Li apostolies ert de Rume idunc fuitis, E surjorna à Sanz meis, semaines e dis, Th. le mart. 55. Grant desroi menent cil destrier sojourné [tenus au repos], Ronc. p. 45.

XIIIe s. Et quant il furent là venu, si sejournerent deus jours, Chr. de Rains, p. 60. Quatre chapons bien sejornez Lor avoit un borjois donez, Ren. 15208. Li sejorner i estoit biax, ib. 7203. Lesse li [à la fortune] sa roe torner, Qu'el torne adès sans sejorner, la Rose, 5926. Li tens qui ne puet sejorner, Ains vait tous jors sans retorner, Cum l'iaue qui s'avale toute N'il n'en retorne arriere goute, ib. 373.

XIVe s. Icellui suppliant pour raffreschir et sejourner ses chevaulx, qui estoient las et travailliez, Du Cange, sejornare.

XVe s. Le roi de Navarre… estoit durement courroucé de ce que les Anglois sejournoient tant à venir, Froissart, II, II, 40. Il est bien meilleur [le pays de Lombardie que la France] et plus fertile tant en bons fromens, qu'en bons vins et fruicts, et ne sejournent jamais leurs terres, Commines, VIII, 5.

XVIe s. Frere Thibaut sejourné, gros et gras, Marot, III, 65. Aucunes fois vers l'occident se tourne, Aucunes fois son œil jette et sejourne Sur l'orient, Marot, IV, 66. Rien ferme ne sejourne Que la divinité, Du Bellay, J. II, 46, recto. À la premiere poincte ilz [les Français] sont pires que dyables ; mais, s'ilz sejournent, ils sont moins que femmes, Rabelais, Garg. I, 48. Ponocrates, pour le sejourner de ceste vehemente intention des esperitz, Rabelais, I, 24. On se sejourne volontiers de tout aultre bien-faire sur ces reformations externes, Montaigne, III, 265. Chrysippus… conclud en elle [l'âme] une singuliere science des affaires du ciel, de l'enfer et d'icy, où elle a passé, repassé et sejourné à plusieurs voyages, Montaigne, II, 308. Le plus exquis miel est celui qui sejourne au fons du pot, De Serres, 451.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. sojornar, sejornar ; ital. soggiornare. Le mot jour, c'est-à-dire le lat. diurnum, est évidemment dans séjourner ; Scheler le tire d'un verbe fictif subdiurnare, de sub, et le lat. diurnare, durer longtemps ; cela est certain pour l'ital. soggiornare ; mais les plus anciennes formes françaises indiquent plutôt superdiurnare.