« vénal », définition dans le dictionnaire Littré

vénal

Définition dans d'autres dictionnaires :

Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

vénal, ale

(vé-nal, na-l') adj.
  • 1Qui se vend, qui peut se vendre, en parlant de charges, d'offices. Les charges de notaire, d'avoué, de commissaire-priseur, etc. sont vénales. Les offices vénaux étaient ceux de justice et de finance, les offices non vénaux étaient ceux de la couronne. On ne voit, je crois, dans l'antiquité aucune trace qui marque que les dignités soit de l'État, soit de la judicature, y aient jamais été vénales, Rollin, Hist. anc. Œuv. t. I, p. 206, dans POUGENS. Je vous avoue que je bats des mains, quand je vois que la justice n'est plus vénale, Voltaire, Lett. Florian, 1er avr. 1771. Il faut, dans une monarchie, que les charges de magistrature soient vénales, parce que, si elles ne l'étaient pas, l'intrigue les vendrait, et l'administration de la justice serait un brigandage, Condillac, Comm. gouv. II, 11.

    Fig. L'intérêt marchandant des épouses vénales, Delille, Parad. perdu, X.

    Valeur vénale, la valeur actuelle d'une chose dans le commerce. La différence de la valeur vénale de la marchandise sur les lieux d'où elle provient, et sur les lieux où elle arrive, Instit. Mém. scienc. t. VII, p. 441.

  • 2 Fig. Qui n'agit que par intérêt, que pour de l'argent. Mais, puisque tu te vends, va chercher qui t'achète, Perfide, et porte ailleurs cette vénale foi Qu'obtiendrait ma rivale à même prix que moi, Corneille, Tois. d'or, IV, 4. Un délateur vénal et formidable [sous Néron]… Suilius…, Diderot, Cl. et Nér. I, 59. âme vénale, Rousseau, Ém. I.

    On dit aussi : éloquence vénale, langue vénale. Si l'auteur voulait parler des présents donnés, pourquoi s'attacher à saint Cyrille, et ne pas dire un mot de l'argent avec lequel ses envieux achetèrent des langues vénales, pour le calomnier auprès de l'empereur ? Bossuet, Rem. Hist. conciles, II, 3.

    C'est une plume vénale, c'est un auteur qui soutient toutes les opinions, pourvu qu'on le paye. J'employai la plume vénale de G. Buchanan, J. Bruslé, Lucien en belle humeur, t. I, p. 349, dans POUGENS. Rien de vigoureux, rien de grand ne peut partir d'une plume toute vénale, Rousseau, Conf. IX.

SYNONYME

VÉNAL, MERCENAIRE. L'homme vénal vend sa moralité pour de l'argent. Le mercenaire est, il est vrai, au salaire et à la disposition de celui qui le paye, mais le mot exprime plus l'infériorité de position que l'immoralité.

HISTORIQUE

XIIIe s. Amours tousjors est tournée es mauvès ; Communaus est à ceuls qui ont monnoie ; D'amours venaus por rien bien ne diroie, Hist. litt. de la Fr. t. XXIII, p. 827. Prions… Après pour tous les cardonaus, Qui tous sont devenus venaus, Arch. des miss. scient. 2e série, t. III, p. 299.

XVIe s. Qu'ils pardonnoient aux barbares, s'ilz estimoient toutes choses venales à prix d'or et d'argent…, Amyot, Arist. 25. Il vouloit rendre venal le souverain magistrat, Amyot, Pomp. 62. N'en va il pas comme en matiere de livres, qui se rendent d'autant plus venaulx et publicques, de ce qu'ils sont supprimez ? Montaigne, III, 316.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. venal, venau ; espagn. venal ; ital. venale ; du lat. venalis, de venum, vendre ; comparez ὦνος, prix, ὦνη, achat ; sanscr. vasna, prix de vente.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

VÉNAL. - HIST. XIIIe s. Ajoutez : Sauf ce que del venel [choses à vendre] que li home acheteront dedenz la vile de Saint-Quentin à paier le jor de l'achat ou errant [aussitôt], li maires les en puet justicier et destraindre del paier, Charte du Vermandois, dans Bibl. des ch. 1874, XXXV, p. 474.