« violon », définition dans le dictionnaire Littré

violon

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

violon

(vi-o-lon) s. m.
  • 1Instrument de musique à quatre cordes accordées de quinte en quinte (sol, ré, la, mi), et dont on joue avec un archet. Les acteurs laissant le masque antique, Le violon tint lieu de chœur et de musique, Boileau, Art p. III. Un violon faux qui jure sous l'archet, Boileau, Sat. III. Lulli, qui n'avait point encore le privilége de l'opéra, fit la musique du ballet de Pourceaugnac ; il y dansa, il y chanta, il y joua du violon, Voltaire, Vie de Molière. Un grand chanteur est un être essentiellement nerveux ; c'est le tempérament contraire qu'il faut pour bien jouer du violon, Stendhal, Vie de Rossini, p. 266, éd. Michel Lévy. Vers le XVe siècle, il paraît qu'on réduisit en France la viole à de plus petites proportions, pour en former le violon tel qu'on le connaît aujourd'hui, et pour borner cet instrument à quatre cordes ; ce qui peut faire croire que cette réforme se fit en France, c'est que le violon est indiqué dans les partitions italiennes de la fin du XVIe siècle sous le nom de petit violon à la française, Fétis, la Musique, II, 16. Le violon, destiné à l'exécution des parties aiguës les plus importantes de l'instrumentation, Fétis, Manuel du compos. II, 1.

    Violons d'auteur, violons des plus habiles facteurs, et qui se sont améliorés en vieillissant.

    Symphonie de violon, concerto de violon, symphonie, concerto où le violon exécute la partie principale.

    Un solo, un accompagnement de violon, un solo, un accompagnement exécuté par le violon.

    Donner les violons, donner une sérénade, payer les violons d'un bal. Le G*** [gouverneur] me donna les violons, que je trouvai très bons, Sévigné, 157. C'est moi qui donne les violons dans ce canton des Champs Élysées, Dancourt, Fête du Cours, sc. 16.

    Fig. Se donner les violons, être content de soi, s'applaudir, se vanter.

    Fig. Se donner les violons, avoir les violons de quelque chose, en tirer vanité. Il est cruel pour nous d'être en but à la maudite intrigue de gens qui, peut-être sans faire des choses merveilleuses, veulent avoir les violons de tout, Corresp. de Klinglin, t. II, p. 298.

    Fig. Payer les violons, faire les frais d'une chose dont les autres ont tout le profit, tout le plaisir. Je ne suis point d'humeur à payer les violons pour faire danser les autres, Molière, Comtesse, 21. Nous verrons s'il me faut, avec ces scélérats, Payer les violons quand je ne danse pas, Poisson, Les fous divert. dans LEROUX, Dict. com. On ne danse guère que dans la paix ; il est vrai que vous avez fait payer les violons à quelques puissances voisines ; mais c'est pour le bien commun et pour le vôtre, Voltaire, Lett. au roi de Pr. 15 mai 1742.

    Fig. Il paye les violons et les autres dansent, ou les autres ont dansé et il a payé les violons, se dit quand quelqu'un fait les frais d'un divertissement où il a le moins de part.

    On dit simplement aussi : Il a payé les violons.

    Couteau manche violon, couteau dont le manche est en forme de manche de violon.

  • 2Famille du violon ; ce sont les violons, les altos, les violoncelles et les contre-basses, dont la forme est exactement semblable sous des dimensions très différentes. La forme un peu bombée des deux tables, l'âme qui communique les vibrations de l'une à l'autre, la pression du chevalet, tout concourt à donner à ces instruments une sonorité, une puissance que n'ont pas les autres instruments à cordes. Les violons, violes et basses (comprenant les violoncelles et contre-basses) sont restés et resteront toujours le fondement des orchestres, Fétis, la Musiq. XVIII.
  • 3Violon d'amour, violon ordinaire auquel on ajoute quatre cordes de laiton.

    Violon harmonique, instrument d'invention récente.

  • 4Celui qui fait profession de jouer du violon. Ferme, ô violons de village ! Molière, Précieus. 13. Qu'on fasse venir les violons du village, et que la journée finisse par des danses, Marivaux, l'Épreuve, sc. 21. On fit entrer les violons, et l'on dansa, Diderot, Lett. à Mlle Voland, 15 sept. 1760. Ce violon fameux que nous devons entendre, Boissy, Deh. tromp. III, 5. Paganini, le premier violon d'Italie et peut-être du monde, Stendhal, Vie de Rossini, p. 266. Il ne faut pas entendre Paganini lorsqu'il cherche à lutter avec des violons du Nord dans de grands concertos, ID. ib. p. 267.

    Fig. Toutes nos langues modernes sont sèches, pauvres et sans harmonie, en comparaison de celles qu'ont parlées nos premiers maîtres, les Grecs et les Romains ; nous ne sommes que des violons de village, Voltaire, Lett. Mme du Deffant, 19 mai 1754.

    Fig. Premier violon, deuxième violon, violons jouant la première, la deuxième partie.

    Les vingt-quatre violons du roi, la grande bande de violons, sous Louis XIV et Louis XV. Quand le cardinal Mazarin fit venir chez nous l'opéra, nous n'avions que vingt-quatre violons discordants qui jouaient des sarabandes espagnoles, Voltaire, Lett. Mme du Deffant, 12 août 1774.

    Anciennement, le roi de tous les violons, maîtres à danser et joueurs d'instruments, celui qui était à la tête de la communauté et qui la gouvernait avec les maîtres de la confrérie. Les aspirants devaient faire expérience devant le roi des violons.

  • 5Jeu d'orgues de tuyaux à bouche, ouvert de deux pieds, qui sert d'unisson au principal.
  • 6Prison contiguë à un corps de garde dans laquelle on dépose provisoirement des gens arrêtés le soir pour qu'ils y passent la nuit, en attendant que la justice prononce le lendemain matin si leur emprisonnement doit être ou non maintenu. Il fut mis au violon.
  • 7Anciennement, homme de rien, mauvais sujet. Godeau : Colletet, je vous trouve un gentil violon. - Colletet : Nous sommes tous égaux, étant fils d'Apollon, Saint-Évremond, les Académiciens, I, 2. … Cet homme-là [le grand Corneille], malgré son Apollon, Fut naguère cité devant cette police Ainsi qu'un petit violon, Gazette rimée de Robinet, citée par M. ÉD. FOURNIER, dans son Paris démoli, 2e éd. 1855, p. 185. On roua avant-hier un violon, qui avait commencé la danse et la pillerie du papier timbré, Sévigné, 229. Dans les nouveaux dialogues on lui donne un caractère aussi bas qu'au plus misérable violon qui ait jamais été, Fontenelle, Jugem. de Pluton.

    Il est comme les violons qui n'ont point de pire maison que la leur, se dit de celui qui n'est guère à sa maison.

    Sentir le violon, être sur le point de devenir misérable, Oudin, Curios. franç.

  • 8 Terme de marine. Poulie à violon, poulie dont la caisse a quelque chose de la forme d'un violon.

    Se dit de bordages épais, placés de chaque côté du beaupré pour le maintenir et découpés en forme de violon.

    Violons, nom donné, sur les paquebots, aux cordes disposées parallèlement d'une extrémité de la table à l'autre, pour permettre aux assiettes, aux verres, aux bouteilles, etc. de se tenir sans trébucher malgré les mouvements du navire.

  • 9Outil du treillageur, espèce de touret.

    Ustensile de chapelier.

    Terme de typographie. Longue galée sans coulisses pour mettre en pages.

  • 10Nom que les habitants de la Guyane ont quelquefois donné aux tatous.

    PROVERBE

    Du proverbe : sec comme rebec, nous avons fait : sec comme un violon, Castil-Blaze, Molière musicien, t. I, p. 9.

HISTORIQUE

XVIe s. Au son de la bourse, commencerent tous les chats fourrés jouer des gryphes, comme si fussent violons desmanchés, Rabelais, V, 13. Riz [Rizzio], chantre, joueur de lut et fils d'un violon de Thurin, D'Aubigné, Hist. I, 256.

ÉTYMOLOGIE

Dérivé de viole ; provenç. violon ; catal. violi ; espagn. violon ; ital. violino. Quant à violon, prison, Génin, Récréat. t. I, p. 226, dit que, dans le XIVe siècle, psaltérion, sorte d'instrument de musique, avait pris le sens de prison, parce que mettre au psaltérion, c'était mettre en pénitence pour chanter les psaumes avec le psaltérion, et que, le psaltérion ayant passé de mode, on y avait substitué le violon. D'autres ont dit que le violon était un local de la Conciergerie où l'on enfermait les perturbateurs pendant les audiences, en leur laissant la liberté de jouer du violon. M. Kastner, dans sa Parémiologie, remarque que le psaltérion était un cep en bois où l'on passait les pieds des gens que l'on condamnait à cette punition : Robert le fournier, pour le soupçon d'avoir robé Colin le varlet, rompu sa huche, et y prins onze solz tournois, fut mis ou cep dit salterion desdites prisons, Lett. de rémiss. 1377. Il remarque en outre qu'en allemand Fiedel ou Geige, qui signifie violon, a aussi le sens du cep des anciennes prisons. Il en conclut que violon a été dit, à l'imitation des Allemands, pour cep, qu'il a remplacé le psaltérion, et que du sens de cep le violon a passé au sens du lieu où était le cep. C'est de ce sens de cep que violon a pris celui de mauvais sujet.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

VIOLON. Ajoutez :
11 Planche carrée qui est garnie de fils de fer parallèlement placés, comme le sont les cordes de l'instrument de musique dont elle a pris le titre ; chacun de ces fils correspond à une des boîtes de couleur ; on se sert du violon dans l'impression des tissus, Magasin pittoresque, 1858, p. 175.