« moindre », définition dans le dictionnaire Littré

moindre

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

moindre

(moin-dr') adj. comparatif
  • 1Plus petit en étendue, en quantité, en qualité. Cette colonne moindre que l'autre en hauteur et en grosseur. La distance est moindre que je ne croyais. Ma douleur n'est pas moindre que la vôtre. Il tient un moindre rang que vous. Un moindre inconvénient. Ce malheur semble moindre, et moins rudes ses coups, Corneille, Hor. V, 3. Si l'effet a manqué, ma gloire n'est pas moindre, Corneille, Cinna, IV, 5. Ce Romain, dont l'effroi peut-être n'est pas moindre, Corneille, Nicom. V, 8. La reine pleine de foi ne se propose pas un moindre modèle que Marie, Bossuet, Mar.-Thér. À de moindres faveurs des malheureux prétendent, Racine, Andr. I, 4. Ma honte en serait moindre ainsi que votre crime, Racine, Mithr. II, 4.

    Rien de moindre, rien qui soit plus petit. Les éloges brillants que vous daigniez y joindre Ne me permettaient pas d'espérer rien de moindre, Corneille, Sertor. II, 2.

  • 2Qui est de moindre mérite, de moindre rang, en parlant des personnes. Ils étaient plus que rois, ils sont moindres qu'esclaves, Corneille, Sert. III, 2. Sans m'envoyer du Parthe embrasser les genoux, Sans vous-même implorer des rois moindres que vous, Racine, Mithr. III, 1.
  • 3Qui n'est pas aussi bon. Ce vin-là est moindre que l'autre.
  • 4Moindre avec l'article défini le, la, les, ou un adjectif possessif, est un superlatif signifiant le moins considérable, le moins important, le plus petit. Au moindre et premier bruit qu'eût fait votre malheur, Corneille, Androm. IV, 3. Et ne savez-vous pas qu'il n'est princes ni rois Qu'elle [Rome] daigne égaler à ses moindres bourgeois ? Corneille, Nicom. I, 2. Jamais la moindre grâce, Ni le moindre regard, le moindre mot enfin Ne lui fut accordé par ce cœur inhumain, La Fontaine, Fabl. XII, 26. Elle [la princesse de Conti] veut être enterrée à sa paroisse, simplement comme la moindre femme, Sévigné, 5 févr. 1672. Qui vit jamais paraître en cette princesse ou le moindre sentiment d'orgueil, ou le moindre air de mépris ? Bossuet, Mar.-Thér. Il étend ses soins jusqu'aux moindres de ses domestiques, Bossuet, Louis de Bourbon. Voyez comme elle frappe cette poitrine innocente, comme elle se reproche les moindres péchés…, Bossuet, Mar.-Thér. Elle savait de quel poids est non-seulement la moindre parole, mais le silence même des princes, et combien la médisance…, Bossuet, Reine d'Anglet. Et nos moindres guerriers Se promettent déjà des moissons de lauriers, Racine, Alex. I, 2. Je n'en avais prévu que la moindre partie, Racine, Bérén. V, 6. On ne s'attendait guère que des vainqueurs daignassent payer ; ceux qui les apportèrent [des vivres] furent bien étonnés d'être payés généreusement et sans délai par les moindres soldats de l'armée, Voltaire, Charles XII, 2. Qu'un ouvrage destiné à l'éducation d'un prince ait de la célébrité, le moindre gentilhomme le croit propre à l'éducation de son fils, Duclos, Consid. mœurs, ch. 2.

    C'est le moindre de mes soucis, et, plus familièrement, c'est le cadet de mes soucis, je ne m'en soucie, ne m'en inquiète aucunement.

    Familièrement, il se joint par une sorte d'exagération à petit. Au moindre petit bruit. Le moindre petit morceau de pain.

    Terme d'algèbre. Méthode des moindres carrés, recherche du résultat le plus probable entre un certain nombre d'observations qui ont donné des résultats différents.

  • 5Avec l'article, et précédé d'une négation, il signifie aucun. Je n'en ai pas la moindre appréhension. Il ne lui a pas dit le moindre mot.
  • 6Les quatre moindres, les quatre ordres mineurs. L'archevêque de Cambrai lui donna [à l'électeur de Cologne] en cinq jours de suite les quatre moindres, le sous-diaconat, le diaconat, le fit prêtre et le sacra évêque, Saint-Simon, 168, 260.
  • 7Le moindre, la moindre, s'emploie substantivement pour dire la personne la moins considérable, de la dernière condition. Et si la moindre tache en demeure à mon nom, Si le moindre du peuple en conserve un soupçon, Corneille, Nicom. IV, 1. Vous qui devez respect au moindre des Romains, Corneille, Pomp. III, 2. Comme on attend un bien qu'on n'a pas mérité, Et dont, sans regarder service ni famille, Vous pouvez faire part au moindre de Castille, Corneille, D. Sanche, I, 3. Et [Dieu] ne dédaigne pas de prendre la conduite Des moindres d'ici-bas, Racan, Psaume CXXXVII. …Je m'aviserais sur le tard d'être cause Que la moindre de vous commît le moindre mal ! La Fontaine, Oies. Tous les hommes, jusqu'aux moindres, veulent qu'on les flatte, et ne peuvent souffrir qu'on les reprenne, Bossuet, Méd. sur l'Év. 2e partie, 15e jour. Le moindre d'entre nous, sans argent, sans appui, Eût plaidé le prélat et le chantre avec lui, Boileau, Lutrin, III.

    Le moindre, ce qu'il y a de moindre. La sagesse éternelle, qui fait servir le moindre au plus digne, si l'âme a besoin d'un corps pour vivre dans sa naturelle perfection, lui rendra plutôt le sien que de laisser défaillir son intelligence par ce manquement, Bossuet, Connaiss. V, 13.

HISTORIQUE

XIIIe s. Il ne convient pas que la mendre abate la greigneur ; mais la greignor peut abatre la meneur, Digeste, f° 75.

XIVe s. Pupilles et menres d'ans [mineurs], Du Cange, aagiatus.

XVe s. Et [François Acreman] partit ses gens en deux, et prit la mendre part pour faire moindre friente [bruit], Froissart, II, II, 230.

XVIe s. S'en sa largesse il veut sa main estendre, Aimé sera tant du grand que du mendre, Marot, I, 153. Tant d'esprits dont le moindre Sçait mieux que toi, louer et poindre [peindre], Marot, II, 200. C'est le moindre de mon soucy, Que cette sapience, Marot, IV, 157. La condition des bestes brutes ne seroit de rien moindre à la nostre, s'il ne nous restoit quelque espoir d'eternité après la mort, Calvin, Instit. 517. Les prestres de Rome ont esté, le temps passé, beaucoup moindres que les evesques, au lieu que maintenant ils les precedent de loin, Calvin, ib. 919. Le nid du moindre oyselet, Montaigne, I, 235. Encor moindre je suis au compte de mes ans, Et desjà je suis vieux au compte de mes peines, La Boétie, 520.

ÉTYMOLOGIE

Wallon, moinr, mal portant ; messin, manre, mauvais ; provenç. mendre, menre ; du lat. minor, avec l'accent sur mi ; moindre, mendre, est le nominatif dont menor (mineur) est le régime (de minorem). Minor, forme comparative, se rattache à minuere, diminuer, en grec μινύω.