« odeur », définition dans le dictionnaire Littré

odeur

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

odeur

(o-deur ; la prononciation usuelle allonge l'o : ô-deur) s. f.
  • 1Impression particulière que certains corps produisent sur l'organe de l'odorat par leurs émanations volatiles. Puissent jusques au ciel vos soupirs innocents Monter comme l'odeur d'un agréable encens ! Racine, Esth. I, 2. Notre odorat fut saisi tout à coup d'une senteur agréable, nous nous tournâmes du côté de l'orient d'où nous venait cette odeur, Lesage, Gil Blas, dans LAFAYE, Synonymes. Je ne sais s'il faut féliciter ou plaindre l'homme sage et peu sensible, que l'odeur des fleurs qu'a sa maîtresse ne fit jamais palpiter, Rousseau, Émile, II. Oh ! laissez, laissez-moi m'enfuir sur le rivage ! Laissez-moi respirer l'odeur du flot sauvage ! Hugo, Éblouissements.

    Impression que les corps laissent dans l'air et que flairent les animaux d'un odorat exquis. Le loup sent l'odeur de la poudre. Mon chien bondit, s'écarte et suit avec ardeur L'oiseau dont les zéphirs vont lui porter l'odeur, Saint-Lambert, Saisons, III.

    Odeur de meule, odeur que la farine contracte par des meules neuves.

    Odeur électrique, odeur que l'on sent à l'approche d'un corps actuellement électrisé.

    Odeur de sainteté, odeur agréable que l'on dit que répandaient les sépultures des saints.

    Fig. En odeur de sainteté, se dit des personnes assez pieuses pour être regardées, de leur vivant, comme de saints personnages. Il passe pour constant qu'une religieuse qui est en odeur de sainteté a prédit, il y a deux ans, que la messe se dirait publiquement cette année à Utrecht, Pellisson, Lett. hist. t. I, p. 131, dans POUGENS.

    Mourir en odeur de sainteté, mourir en état de grâce.

    Familièrement. Il n'est pas en odeur de sainteté auprès de moi, c'est-à-dire il n'est pas bien dans mon esprit.

  • 2 Fig. Impression faite sur l'âme, sur l'esprit, et comparée à l'impression faite sur le sens de l'odorat. Je serais bien fâché d'avoir touché à la réputation de la reine… ni d'avoir voulu corrompre une mémoire de si excellente odeur que la sienne, Guez de Balzac, livre VII, lett. 5. Les Pays-Bas doivent au P. Bourgoing l'établissement de tant de maisons qui ont répandu au loin la bonne odeur de l'Évangile, Bossuet, Bourgoing. Aussi était-ce du fond de ses sentiments que se répandait sur ses principaux écrits une certaine odeur de vertu délicieuse pour ceux qui en peuvent être frappés, Fontenelle, Rép. év. Luç. Œuvr. t. III, p. 363, dans POUGENS. Vous répandez la bonne odeur de Jésus-Christ, Massillon, Pet. carême, Vices. L'innocence de leurs mœurs répandait déjà une odeur de vie, Massillon, Panégyr. St Bern. Tout son extérieur [d'Harlay] était gêné, contraint, affecté, l'odeur hypocrite, le maintien faux et cynique, Saint-Simon, 193,47. Votre nom répandra toujours une odeur de suavité dans les nations, Voltaire, Lett. à la Duch. de Choiseul, 13 mars 1771. Cela a une odeur d'antiquité qui plaît, Diderot, Salon de 1765, Œuv. t. XIII, p. 348, dans POUGENS.

    Être en bonne, en mauvaise odeur, avoir une bonne, une mauvaise réputation. Vous nous avez mis en mauvaise odeur devant Pharaon et devant ses serviteurs, Sacy, Bible, Exode, V, 21.

  • 3 Au pl. Parfums. Cet homme craint les odeurs. La chose du monde la plus malsaine c'est de dormir parmi les odeurs, Sévigné, 142. L'usage des odeurs produit ces affections spasmodiques, Beaumarchais, Barb. de Sév. II, 15.

SYNONYME

ODEUR, SENTEUR. Odeur est le terme général ; elle est bonne ou mauvaise. La senteur est une odeur agréable. De plus l'odeur est dans les objets qui l'exhalent ; la senteur est ce qui est senti par le sujet, l'impression qu'il reçoit.

HISTORIQUE

XIIIe s. Ce est cil [le basilic] qui de son odor ocist les oisiaus volans, Latini, Trésor, p. 192.

XVIe s. L'odeur du vin o combien plus est friant, riant, priant, plus celeste et delitieux que d'huyle ! Rabelais, Garg. I, Prol. Ils leur font perdre leur mauvaise odeur par la mixtion des choses odorantes et parfums, Paré, XXIII, 7. L'odeur vineux des grands banquets, Bouchet, Serées, livre I, p. 32, dans LACURNE. Son nom retint toujours quelque bonne odeur envers aucuns gentilhommes et la commune, Nuits de Straparole, t. II, p. 219, dans LACURNE. Il est dict d'aulcuns, comme Alexandre le grand, que leur sueur espandoit une odeur souefve, par quelque rare et extraordinaire complexion, Montaigne, I, 391.

ÉTYMOLOGIE

Bourg. odou ; prov. et portug. odor ; ital. odore ; du lat. odorem. Les latinistes du XVIe siècle tentèrent de faire odeur du masculin. Au reste Brunetto Latini, Italien écrivant en français, l'avait fait masculin au XIIIe siècle.