« écraser », définition dans le dictionnaire Littré

écraser

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

écraser

(é-kra-zé) v. a.
  • 1Briser par une forte compression, par un choc violent. Écraser le raisin. Écraser un insecte. Vous ne craignez pas Que du fond de l'abîme entr'ouvert sous ses pas Il ne sorte à l'instant des feux qui vous embrasent, Ou qu'en tombant sur lui ces murs ne vous écrasent ? Racine, Athal. III, 5. Amilcar les ayant enveloppés de toutes parts et ayant fait avancer contre eux les éléphants, ils furent tous écrasés ou égorgés au nombre de plus de quarante mille, Rollin, Hist. anc. Œuvres, t. I, p. 359, dans POUGENS. Le 28 octobre 1746, à dix heures et demie du soir, tous les édifices, grands et petits, s'écroulèrent en trois minutes ; sous ces décombres furent écrasées treize cents personnes, Raynal, Hist. phil. VII, 31. C'est un œuf de serpent qui, s'il était couvé, Serait aussi méchant que tous ceux de sa race ; Il le faut, dans sa coque, écraser sans pitié, Voltaire, Jules César (trad. de Shakspeare), II, 1. J'écraserais dans l'œuf ton aigle impérial, Hugo, Hern. II, 3.

    Terme de manufacture. Trop frapper une étoffe.

    Fig. et par hyperbole, dans le style badin. Du Parnasse, insecte risible, Je cesse un stérile combat ; Tu rampes tellement à plat Que t'écraser est impossible, Legouvé, Épigr. contre Fabien Pillet.

  • 2Défigurer par une forte compression. Telle est de ces rochers la bizarre structure ; On doute, en les voyant, si la fière nature A de l'art, à son tour, contrefait les travaux, Ou si sa main jalouse écrase et défigure L'ouvrage merveilleux des plus hardis ciseaux, Masson, Helv. V.
  • 3Anéantir, réduire à rien. [Il] Te présente une main qui pourrait t'écraser, Voltaire, Fanat. I, 4. Un peuple qu'Annibal écrasa sous ses pieds, Voltaire, Sophon. III, 2. Un livre est-il mauvais, rien ne peut l'excuser ; Est-il bon, tous les rois ne peuvent l'écraser, Voltaire, Ép. 100. Annibal tombe des sommets glacés des Alpes sur l'Italie ; écrase la première armée consulaire sur les bords du Tésin…, Chateaubriand, Itinéraire, VII. Depuis, comme il arrive toujours, l'infortune ayant écrasé ces guerriers, des reproches s'élevèrent, Ségur, Hist. de Nap. VIII, 8.

    Fig. Le sentiment du bonheur écrase l'homme, Rousseau, Ém. V.

  • 4Fatiguer, accabler, importuner. Être écrasé de travail. Être écrasé de visites. Écraser un peuple d'impôts.
  • 5Jeter dans l'infériorité, dans l'ombre. Il est écrasé par son rival. En Perse il n'est point de sujets, Ce ne sont qu'esclaves abjects Qu'écrasent d'un coup d'œil les têtes souveraines, Corneille, Agésilas, II, 1.

    Surpasser, vaincre. Écraser quelqu'un dans une discussion.

  • 6S'écraser, v. réfl. Se tuer par l'écrasement. Le monstre, furieux de se voir entendu, Du roc se lance en bas et s'écrase lui-même, Corneille, Œdipe, I, 4.

    Être écrasé. Les fraises s'écrasent facilement.

    Terme d'escrime. S'aplatir, c'est-à-dire pousser, après le coup tiré, le genou droit en avant, laisser tomber le corps et lever le pied gauche.

    Fig. S'écrouler par une sorte d'écrasement. Ainsi les grandes expéditions s'écrasent sous leur propre poids ; les bornes humaines avaient été dépassées [dans l'expédition de Moscou] ; le génie de Napoléon, en voulant s'élever au-dessus du temps, du climat et des distances, s'était comme perdu dans l'espace, Ségur, Hist. de Nap. IX, 14.

HISTORIQUE

XVIe s. Deux mois après un cheval qui rua, De coups de pied l'un de mes gens tua, Lui escrageant d'une playe cruelle Bien loin du test la gluante cervelle, Ronsard, 945. Je sçais qu'il s'est trouvé des simples païsans s'estre laissez griller la plante des pieds, ecrazer le bout des doigts, à tout le chien d'une pistole, Montaigne, III, 152.

ÉTYMOLOGIE

Génev. et Berry, acraser ; de l'ancien scandinave krassa, broyer ; suédois, krasa ; angl. crash et crush.