« éveiller », définition dans le dictionnaire Littré

éveiller

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

éveiller

(é-vè-llé, ll mouillées, et non é-vè-yé) v. a.
  • 1Tirer quelqu'un du sommeil. … Les souris et les rats Semblent, pour m'éveiller, s'entendre avec les chats, Boileau, Sat. VI. Oui, c'est Agamemnon, c'est ton roi qui t'éveille, Racine, Iphig. I, 1. Il faut que tous les jours j'éveille tout mon monde, Racine, Plaid. I, 7. Dans mon réduit où l'on voit l'indigence, Sans m'éveiller assise à mon chevet, Béranger, Dieu des bonnes gens.
  • 2 Fig. Donner de la gaieté. Il est mélancolique, il lui faudrait quelque chose qui l'éveillât un peu.

    Rendre plus actif. L'ambition l'a éveillé.

  • 3Stimuler, exciter. Éveiller les soupçons, la jalousie. Mais laissez-nous le temps d'éveiller un parti, Voltaire, Mérope, v, 3. C'est moi qui la première éveillai son courage, Ducis, Macbeth, II, 2. L'aspect d'un tel censeur éveille ses remords, Lemercier, Agamemnon, I, 1.

    Absolument. Il faut que sa douceur [de l'idylle] flatte, chatouille, éveille, Boileau, Art p. II.

  • 4Faire naître. Quelle foule d'idées j'éveille dans son cerveau par ce peu de mots ! Rousseau, Ém. III.
  • 5S'éveiller, v. réfl. Sortir du sommeil. Il s'endort, il s'éveille au son des instruments, Racine, Esth. II, 9.

    Fig. Il n'est pas mauvais que le peuple s'éveille de temps en temps, Retz, IV, 128. [ô roi] Il est temps que tu t'éveilles : Dans le sang innocent ta main va se plonger, Racine, Esth. III, 3.

  • 6Prendre de la vivacité, en parlant de choses. Aussitôt des objets les images pressées En foule s'éveillaient dans ses vastes pensées, Delille, Imag. X. Dans mon cœur attendri quel sentiment s'éveille ? Delavigne, Paria, III, 4.

    PROVERBE

    N'éveillez pas, ou, il ne faut pas éveiller le chat qui dort, c'est-à-dire ne rappelez pas une mauvaise affaire assoupie.

SYNONYME

ÉVEILLER, RÉVEILLER. Ces deux verbes ne diffèrent que par le préfixe re-, qui marque réduplication de l'action. On dort et on s'éveille ; on se rendort et on se réveille. Cette distinction est réelle ; mais, dans l'usage, on la néglige souvent : Je vous réveillerai demain à six heures.

HISTORIQUE

XIe s. Charles se dort, qu'il ne s'esveille mie, Ch. de Rol. LV.

XIIe s. As oroilles vient la parole, Ausi come li vanz qui vole, Mes n'i areste ne demore, Se li cuers [cœur] n'est si esveilliez Qu'au prendre soit apareilliez, Chrestien de Troyes, Chev. au lyon, v. 157. Li sainz huem ne fist mie ses servans esveillier, Th. le mart. 101.

XIIIe s. Et que or avoit li rois d'Espaigne enveillet le chien qui dormoit, Chr. de Rains, p. 74. Car mesdisant felon et de put aire Font les amans à grant dolor languir, Qui sont touzjors esveillé de mau faire, Quant on cuide que il doient dormir, Poésies mss avant 1300, t. IV, p. 1468, dans LACURNE. Mez seulement pour le grant amour que il a en nous, nous esveille [Dieu] par ses menaces, Joinville, 285.

XVe s. Plus esveillé qu'un rat, Louis XI, Nouv. IX. Il appela son varlet, qui estoit un galant tout esveillé, Louis XI, ib. XVIII.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. esvelhar, esveillar ; ital. svegliare ; du lat. evigilare, s'éveiller, de e, ex, et vigilare, veiller.