« châtier », définition dans le dictionnaire Littré

châtier

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

châtier

(châ-ti-é) v. a.
  • 1Infliger une correction. Les enfants connaissent si c'est à tort ou avec raison qu'on les châtie, et ne se gâtent pas moins par des peines mal ordonnées que par l'impunité, La Bruyère, XI. [Ils] Adorent dans leurs fers le Dieu qui les châtie, Racine, Esth. III, 1.

    Terme de manége. Châtier un cheval, lui donner de la cravache ou de l'éperon.

  • 2Mortifier. Les plus grands saints qui châtient leur corps, Massillon, Car. F. légères. Son corps qu'elle avait toujours châtié, crucifié, Massillon, ib. Mort.
  • 3 Par extension, condamner, blâmer. Châtier en autrui ce qu'on souffre chez soi, Corneille, Poly. III, 5. On devrait châtier sans pitié Ce commerce honteux de semblant d'amitié, Molière, Mis. I, 1.
  • 4Rendre plus pur et plus correct, en parlant des ouvrages d'esprit. Châtier son style.
  • 5Se châtier, v. réfl. S'infliger à soi-même une punition. Il se châtiait lui-même en croyant châtier autrui.

    PROVERBE

    Qui bien aime bien châtie, et aussi, qui aime bien châtie bien, c'est-à-dire on a une affection éclairée pour celui que l'on reprend, que l'on avertit de ses fautes.

SYNONYME

CHÂTIER, PUNIR. Les juges punissent le coupable, afin qu'il satisfasse par sa punition à la justice et qu'il serve d'exemple. Les pères châtient l'enfant, afin qu'il se corrige et devienne meilleur. Dans punir, il n'y a que l'idée de l'expiation de la faute commise ; dans châtier, il y a de plus l'idée de l'amélioration de celui qui est châtié.

HISTORIQUE

XIe s. Vint tresqu'à els [eux], si's [si les] prist à castier, Ch. de Rol. CXXX.

XIIe s. Vus ne i devez pas tut son voil conseillier, Ainz le devez suvent reprendre e chastier, Th. le mart. 28. Tierce feiz i fu pris ; pas ne s'en castiheit, ib. 31. Reis, suef se chastie qui d'autrui se chastie, ib. 75.

XIIIe s. Il la [sa fille] fait enserrer en la tour et remaindre, Ainsi la cuide bien chastoier et destraindre, Audefroi le Bastard, Romancero, p. 15. Bele Yolans, je vous chastoi ; Ma fille estes, faire [je] le doi, ib. p. 53. Si lor comanda qu'il castiascent lor enfants, Chr. de Rains, 226. Mais ice ne ferai-ge mie, Ge qui por ton preu te chastoi, la Rose, 7033. Plus en sai que vous ne savés, Qui ainsinc chastié m'avés, ib. 6628. Sunt en terre establi li juge… Por ceus pugnir et chastoier Qui por ceste amor renoier Murdrissent les gens et affolent, ib. 5487. Moult a beneürée vie Cil qui par autrui se chastie, ib. 8042. …Si que par le bannissement il se castient de lor meffet, Beaumanoir, XXIV, 16. Que chascun seignor deit estre curious et ententif de faire justice de murtrier, por chastier les autres qu'il ne le seient, Ass. de J. 135. Nus ne puet tormenter son serf sanz cause ; mès il le puet bien chasteier atempréement, Liv. de just. 77. Tout se furent assis sor l'erbe qui verdie ; L'apostoles se dresce en piés, si les chastie [exhorte], Ch. d'Ant. I, 802.

XIVe s. Il convient punir, chastier et corriger celui qui appete choses laides, Oresme, Eth. 99.

XVIe s. Il s'en chastoia en eage virille, Fr. de Bonnivard, Bibl. des ch. 2e série, t. II, p. 394. Il estoit incontinent admonesté par les autres evesques voisins : s'il ne se chastioit, il estoit deposé, Calvin, Instit. 862. Chastie les : car ils sont en ta subjection, Calvin, ib. 901. Pensant que, quand il entendroit cela, il se chastieroit de l'aimer tant, Marguerite de Navarre, Nouv. I. Si, après avoir parlé à lui, il ne se chastie, je le chastierai si bien, que les autres y prendront exemple, Marguerite de Navarre, ib. LIII. On chastie aux enfants des erreurs innocentes, Montaigne, I, 37. Vous serez chastiez : les enfans et les fous, S'ils ne sont chastiez, jamais ne se corrigent, Sat. Ménip. p. 212. Belle doctrine prend en luy, qui se chastie par autruy, Génin, Récréat. t. II, p. 235.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. castiar, chastiar ; espagn. castigar ; ital. castigare ; du latin castigare, de castus, chaste (voy. CHASTE), et un suffixe igare. Chastier et chastoyer, qui n'est plus usité, sont dans le même rapport que charrier et charroyer.