« dégoûter », définition dans le dictionnaire Littré

dégoûter

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

dégoûter

(dé-goû-té, ou long) v. a.
  • 1Ôter l'appétit. La vue de ce mets m'a dégoûté.

    Inspirer de la répugnance pour un aliment. Ils m'ont dégoûté du poisson à force de m'en faire manger.

  • 2 Fig. Inspirer de l'éloignement, donner de l'aversion. Ce pompeux appareil où sans cesse il ajoute Recule chaque jour un nœud qui le dégoûte, Corneille, Tite et B. I, 1. Savez-vous ce qu'a fait votre frère ? il ne quitte pas la demoiselle… il lui fait tourner la tête, il la dégoûte d'un parti proportionné, Sévigné, 384. Il y a assez d'injustice et de perfidie dans le procédé des hommes, assez d'inégalité et de bizarrerie dans leurs humeurs incommodes et contrariantes ; c'en est assez sans doute pour vous dégoûter ; hé ! ditesvous, je n'en suis que trop dégoûté [du monde] ; tout me dégoûte en effet, mais rien ne me touche ; le monde me déplaît, mais Dieu ne me plaît pas pour cela, Bossuet, la Vallière. Les artifices de Protésilas me dégoûtèrent de Philoclès, Fénelon, Tél. XII. Votre fierté est si ridicule qu'elle me dégoûte de la mienne, Marivaux, Préj. vaincu, sc. 9.
  • 3Ôter l'envie de… On avait de la peine à dégoûter les gentilshommes de voler sur les grands chemins, Raynal, Hist. phil. I, Introduction.
  • 4Fatiguer, ennuyer. La prolixité dégoûte le lecteur. L'on voit des gens qui dans les conversations… vous dégoûtent par leurs ridicules expressions, La Bruyère, V.
  • 5Se dégoûter, v. réfl. Prendre du dégoût. D'une vertu sauvage on craint un dur empire ; Souvent on s'en dégoûte au moment qu'on l'admire, Corneille, Othon, III, 3. Ne te dégoûte point surtout des paraboles, Quel qu'en soit le projet, Et ne les prends jamais pour des contes frivoles Qu'on forme sans sujet, Corneille, Imitation, I, 5. J'ai quelques infirmités sur mon corps qui pourraient la dégoûter. - Cela n'est rien, une honnête femme ne se dégoûte jamais de son mari, Molière, Mar. forcé, sc. 14. Comme les hommes ne se dégoûtent pas du vice, il ne faut pas aussi se lasser de le leur reprocher, La Bruyère, Caract. préface. Si les hommes se délassent quelquefois d'une vertu par une autre vertu, ils se dégoûtent plus facilement du vice par un autre vice, La Bruyère, XI. Tandis que tant d'autres [prêtres]… se dégoûtent de leurs fonctions, Massillon, Disc. syn. Observ. des stat. et des ordonn. du dioc.

    Absolument. On se dégoûte, on s'ennuie.

  • 6Renoncer à ce qu'on avait pris, commencé avec goût, perdre l'envie de… Le choc fut terrible ; tout fut reconquis une quatrième fois, et tout fut perdu de même ; plus ardents que leurs anciens pour commencer, ils [de jeunes soldats] se dégoûtèrent plus tôt et revinrent en fuyant sur les vieux bataillons qui les soutinrent, Ségur, Hist. de Nap. IX, 2.

HISTORIQUE

XVe s. Je ne me puis degouster De hanter Ces bons cerveaux de taverne, Basselin, XXIX.

XVIe s. Je suis desgousté de la nouvelleté, Montaigne, I, 121. Le degousté charge la fadeur au vin ; l'alteré, la friandise, Montaigne, II, 373.

ÉTYMOLOGIE

Dégoût ; bourguig. dég-ótai.