« dégoutter », définition dans le dictionnaire Littré

dégoutter

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

dégoutter

(dé-gou-té, ou bref) v. n.
  • 1Couler goutte à goutte. La sueur lui dégoutte du front. Il ne se sert à table que de ses mains ; il manie les viandes, les remanie, démembre, déchire… le jus et les sauces lui dégouttent du menton et de la barbe, La Bruyère, XI. L'eau dégouttait de tous les endroits de son manteau, Fénelon, Diog.
  • 2Il se dit aussi des choses d'où dégoutte quelque liquide. … le chêne de manne et de miel dégouttait, Régnier, Sat. VI. Voyez, voyez le sang dont ce poignard dégoutte, Rotrou, Vencesl. IV, 6.
  • 3 V. a. Fig. Pressez-les, tordez-les, ils dégouttent l'orgueil, l'arrogance, la présomption, La Bruyère, VIII.

PROVERBES

À la cour, auprès des grands, s'il n'y pleut, il y dégoutte ; c'est-à-dire on y a toujours quelque profit.

Quand il pleut sur le curé, il dégoutte sur le vicaire ; ou, dans le même sens, s'il pleut sur moi, il dégouttera sur vous, vous aurez part au bien ou au mal qui m'arrivera.

Il se conjugue avec l'auxiliaire avoir.

HISTORIQUE

XIIe s. Les enseignes à or batues S'en issent des cors degutantes, Descolorées e sanglantes, Benoit de Sainte-Maure, Chron. II, 9517. Devant le halt altel fu li cors sainz portez, E de moines e d'altres fu tute nuit gardez ; Receüs fu li sancs qui en ert degutez, Th. le mart. 153. [Il] Lui ront auprès l'espaule tote, Si que li sans [sang] jus en degote, la Charrette, 1147.

XIIIe s. Et certes li ciel degouterent d'esperital rosée, Psautier, f° 77. En la trace du sang [elle] s'est mise, Qui du chevalier degutot, Marie de France, Yvenec. Et se doit on faire laver le [la] tieste en ewe degoutant qui vient par tuiaus, Alebrand, f° 33. De pité et de dol [deuil] est aval aclinés, Les larmes li degotent fil à fil sor le nés, Ch. d'Ant. V, 479. Doulz Diex qui de doulceur serondes [abondes] et desgoutes, Sur mon dur cuer desgoutes de ta doulceur deux goutes, J. de Meung, Testam. 2092. Car il si durement suoit, Que touz ses cors en degoutoit, Saint-Graal, V. 1605.

XIVe s. Sans leur vie espargnier ne doubter char navrée, Ne saignie de sanc, ne sueur degoutée, Guesclin. 8394. À tel meschef cheï, ce nous dit li rommans, Que par bouche et par nés li degoutoit li sans, Baud. de Seb. III, 871.

XVe s. Hé dea ! s'il ne pleut, il degoute, Patelin V. 1211.

XVIe s. Au vase estroit, qui degoute Son eau, qui veult sortir toute, Du Bellay, J. III, 75, verso. Le nez lui degouttoit, principalement en hiver, comme la poche d'un pescheur, Despériers, Contes, LXXXV. … Tout moyte et degoutant s'est sauvé du naufrage, Du Bellay, J. VI, 10, verso. Souffrir des contractions et convulsions estranges, desgoutter par fois de grosses larmes des yeulx, Montaigne, III, 271.

ÉTYMOLOGIE

Dé… préfixe, et goutte ; provenç. degotar.