« destin », définition dans le dictionnaire Littré

destin

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

destin

(dè-stin) s. m.
  • 1L'enchaînement des choses considéré comme nécessaire. La mythologie faisait du destin une divinité supérieure à Jupiter même. Des arrêts du destin l'ordre est invariable, Corneille, Tois. d'or, V, 7. Le destin, aux grands cœurs si souvent mal propice, Se résout quelque fois à leur faire justice, Corneille, Poly. I, 4. Le plus heureux destin surprend par les divorces, Du trop de confiance il aime à se venger, Corneille, Sertor. II, 2. Qu'au livre du destin les mortels peuvent lire, La Fontaine, Fabl. II, 13. Le bien nous le faisons, le mal c'est la fortune, On a toujours raison, le destin toujours tort, La Fontaine, ib. VII, 14. …Quand le mal est certain, La plainte ni la peur ne changent le destin, La Fontaine, ib. VIII, 12. Mais un heureux destin le conduit en ces lieux, Racine, Andr. II, 3. Souffrez que je suive ce que les destins ont marqué, Fénelon, Tél. VI. Il est des êtres malheureux qui se promettent de tromper le destin en fuyant devant lui, Raynal, Hist. phil. V, 19.
  • 2Sort, issue. Solamir veut tenter le destin des batailles, Voltaire, Tancr. III, 5. J'ignore du combat quel sera le destin, Voltaire, Scythes, IV, 7.
  • 3Condition que le destin assigne. On ne peut fuir son destin. Mais elle était du monde où les plus belles choses Ont le pire destin ; Et rose, elle a vécu ce que vivent les roses, L'espace d'un matin, Malherbe, VI, 18. Laissez à son destin cette ingrate famille, Corneille, Poly. IV, 6. Là, je menai l'objet qui fait seul mon destin, Corneille, Ment. I, 5. Jusqu'ici don Louis… A caché ses destins aux yeux de tout l'état, Molière, D. Garc. I, 2. Et soudain il [le sénat] commet aux soins de ce grand homme La fortune du monde et le destin de Rome, Brébeuf, Phars. V. Pour savoir nos destins j'irai vous retrouver, Racine, Andr. I, 4. Vous l'accusez, seigneur, de ce destin bizarre, Racine, ib. III, 1. …Elle amène aussi cette jeune Ériphile, Que Lesbos a livrée entre les mains d'Achille Et qui de son destin qu'elle ne connaît pas Vient, dit-elle, en Aulide interroger Calchas, Racine, Iphig. I, 4. Qui seul fait à son gré le destin de la terre, Boileau, Poés. div. 18. Connais-tu ton destin ? sais-tu quelle est ta mère ? Voltaire, Zaïre, II, 3. Malheureux… ce mot seul déjà vous importune ! On craint d'être forcé d'adoucir mes destins ! Rassurezvous, cruels…, Gilbert, le Poëte malh.
  • 4Vie, existence. Lélie : Le trépas me doit seul prêter son assistance. - Mascarille : Voilà le vrai moyen d'achever son destin, Molière, l'Étour. V, 10. C'est dans votre festin Que ce soir, par votre ordre, on tranche son destin, Corneille, Sertor. I, 1. Si dans mes alarmes Le ciel me permettait d'abréger un destin…, Voltaire, Orphel. I, 5.

SYNONYME

DESTIN, DESTINÉE, SORT. Le destin est ce qui destine, c'est-à-dire l'enchaînement nécessaire des choses. La destinée est ce qui est destiné, c'est-à-dire ce qui résulte de cet enchaînement nécessaire. Le destin conduisit Alexandre à Babylone où une fièvre devait finir sa destinée de victorieux et de conquérant. Mais ces deux mots sont si voisins, que, pour peu qu'on en abuse conformément à cet abus qui est permis en toutes les langues, ils retombent l'un dans l'autre. Sort répond soit à destin, soit à destinée, avec cette nuance qu'au lieu de considérer la nécessité qui enchaîne les choses, on considère ce qu'elles ont de fortuit.

HISTORIQUE

XIIe s. Et tel destin m'ont doné li felon…, Couci, VI.

XIIIe s. Et ses filles andeux [toutes deux], Dieu leur doint bon destin, Berte, LV. Si est le moustiers de latin Fais en l'onnour et el destin [à la destination] De la douce mere saintisme, Ph. Mouskes, ms. p. 280, dans LACURNE.

XVIe s. Cela est escrit es destins, Rabelais, Pant. IV, Prologue de l'auteur.

ÉTYMOLOGIE

Voy. DESTINER ; provenç. desti ; espagn. et ital. destino.